Après avoir fait un bouleversant discours lors de la cérémonie des César dans lequel elle dénonce les violences sexuelles dans le milieu du cinéma et demande à ses paires de faire entendre leurs voix, la comédienne et réalisatrice Judith Godrèche a pris, ce jeudi 29 février 2024, la parole devant le Sénat.
Cette dernière a été entendue par la délégation aux droits des femmes du Sénat, composée d'une dizaine de parlementaires, durant presque 2 heures.
Création d'une commission d'enquête sur les violences
Judith Godrèche demande ainsi la création d'une commission d'enquête sur les violences sexuelles et sexistes dans le milieu du cinéma, la réhabilitation du juge Edouard Durand, évincé de la Ciivise en décembre 2023 et le retrait du président du CNC Dominique Boutonnat, lui-même accusé d'agressions sexuelles.
La réalisatrice de Icon of French Cinema précise : "Je demande le retrait de Dominique Boutonnat, dont le procès va bientôt avoir lieu je crois. Il y a des charges de violences sexuelles contre lui.
C'est quoi cette blague ?
Dominique Boutonnat est le Président du CNC, une institution dans laquelle se rendent les producteurs en rigolant car ils se disent que c'est drôle de faire une formation contre les violences sexuelles à l'intérieur d'une institution dont le président est lui-même accusé de violences sexuelles. C'est quoi cette blague ?"
Mieux protéger les enfants sur les tournages
Judith Godrèche - qui évoque dans son discours les "agresseurs déguisés en réalisateurs" - réclame également une meilleure protection pour les enfants sur les tournages et dénonce "l'écrasement de la parole" et "l'invisibilisation de la souffrance des enfants" dans le milieu du 7e Art.
Elle demande en conséquence, la présence d'un référent neutre - qui n'est pas payé par la production et ayant une formation en psychologie - quand un mineur est sur un tournage, qu'il y ait un coach d'intimité pour les scènes impliquant de l'intimité et de la sexualité et qu'il y ait un coach de jeu pour que l'enfant - facilement impressionné par la figure d'autorité - ne soit jamais laissé seul sur le tournage. La comédienne réclame également que la DDASS fasse des contrôles réguliers sur les tournages sur lesquels des enfants sont impliqués.
Borde Jacovides / Bestimage
Judith Godrèche, désormais figure de proue du MeeToo français, demande au Sénat de l'aider à faire en sorte que les violences sexuelles et sexistes s'arrêtent dans le monde du cinéma qui n'est que le reflet de la société. Elle déclare : "Cette famille incestueuse du cinéma n'est que le reflet de toutes ces familles et de tous ces témoignages que je reçois chaque jour."
Des propos que l'actrice avait déjà tenu sur le plateau de l'émission Quotidien le 26 février dernier après la Cérémonie des César, précisant au sujet de Dominique Boutonnat que le poste de Président du CNC était "un poste symbolique" et qu'il fallait à la tête de cette institution "quelqu'un dont on ne puisse pas mettre la confiance en doute".
"Ses paroles font écho et sauvent d'autres femmes qui n'ont pas de voix"
La comédienne Golshifteh Farahani, que nous avons rencontré hier pour la promotion de son prochain film Roqya, est revenu à notre micro sur le discours de Judith Godrèche aux César : "Judith parle de quelque chose qui existe partout, dans les usines, dans les endroits où les femmes n'ont pas de voix. Elle, elle a de la voix. Et ses paroles font écho et sauvent d'autres femmes qui n'ont pas de voix. Et c'est ça le travail des artistes."
Le cinéma est le reflet de la société et en faisant entendre sa voix et en réclamant des mesures d'encadrement précises Judith Godrèche peut parvenir à faire évoluer le monde du cinéma et la société.
Mercredi 27 février, le Syndicat Français de la Critique de Cinéma a publié une lettre ouverte pour affirmer son soutien à Judith Godrèche, dans laquelle les 342 signataires écrivaient : "Vos coups contre la porte blindée de l’indifférence cognent fort. Vous avez raison : les films nous regardent autant que nous les regardons. Comme vous, nous aspirons à un jour nouveau, où aucun enfant, aucune jeune fille, aucun jeune homme ne sera contraint de vivre ses rêves de cinéma comme des cauchemars."
