Le 18 octobre dernier, Killers of the Flower Moon débarquait au cinéma en France. Le long-métrage de Martin Scorsese, d'une durée de 3h26, était un pari risqué pour Paramount. Trois semaines plus tard, le film avec Robert De Niro et Leonardo DiCaprio a franchi la barre du million d'entrées.
Parvenir à passer ce cap fatidique relève de l'exploit pour une oeuvre aussi longue et foisonnante, racontant un épisode sombre de l'Histoire des Etats-Unis. Scorsese lui-même s'était agacé des critiques sur la durée du film, estimant qu'il fallait respecter le cinéma.
Le mythique metteur en scène de Taxi Driver, récemment moqué par Joe Russo, réalisateur d'Avengers Endgame, a souvent critiqué l'hégémonie Marvel au cinéma, suscitant de nombreux débats. Il est donc cocasse de constater que Killers of the Flower Moon possède un lien avec les célèbres comics de super-héros.
De Scorsese à Black Panther
Dans l'oeuvre de Scorsese, l'intrigue suit notamment la tribu Osage, une communauté amérindienne ayant fait fortune dans les années 20 en découvrant du pétrole sur leurs terres de l'Oklahoma. Ces derniers possèdent une culture spirituelle très riche, vénérant les Dieux à travers différents rituels sacrés.
Une des "divinités" louées par les Osages se nomme Wakonda, ou Wah’Kon’Tah ; il s'agit d'un grand pouvoir créateur des tribus Osage, Omaha et Ponca. Selon ces clans amérindiens, Wakonda est une force créatrice abstraite et omniprésente. Cela signifie "le mystérieux" dans le langage des ces tribus.
Pour les fans de l'univers Marvel, une autre orthographe sera plus parlante : Wakanda. Ce pays fictif inventé par Stan Lee et Jack Kirby, est la terre ancestrale de Black Panther. L'origine de ce nom n'est pas officiellement connue ; cependant, une théorie explique que les auteurs se sont inspirés du Dieu amérindien Wakonda.
Le Dieu créateur
Si ce nom peut se traduire par "le mystérieux" pour les clans Osage, Omaha et Ponca, il a également une signification pour les Dakotas. Pour eux, c'est "l'omniprésence invisible des forces de la vie." Il s'agit aussi de la personnification du créateur Dakota. À noter que Wakanda est également une variante de "Wakan Tanka", le grand "Manitou" des Algonquins. Par ailleurs, pour les amérindiens Lakotas, Wakonda veut dire "le pouvoir du dessus."
Wakanda est également un prénom féminin d'origine nord-amérindienne. Pour le peuple Sioux, il signifie "pouvoir magique intérieur." Tout cela corrobore l'idée selon laquelle Stan Lee et Jack Kirby se seraient inspirés de la culture amérindienne pour créer le Wakanda. En effet, ce pays fictif possède des similitudes avec les tribus amérindiennes, notamment dans son folklore spirituel.
Par exemple, selon la tradition wakandaise, il existe une dimension astrale où l'âme s'installe après la mort. C'est ici que les Black Panthers peuvent se rendre afin de communier avec leurs ancêtres après avoir ingéré l'herbe-cœur. On peut notamment voir des séquences se déroulant sur ce plan astral spirituel dans les films du MCU.
L'idée d'un "grand pouvoir mystérieux" comme celui du Black Panther et d'un univers onirique dans lequel on pourrait communiquer avec les défunts rappelle beaucoup les rituels sacrés amérindiens. Ainsi, Stan Lee et Jack Kirby auraient savamment puisé leurs influences pour les comics en piochant dans les cultures africaines et amérindiennes ; ils ont ensuite mélangé le tout pour créer le Wakanda et l'univers riche et pasionnant qui gravite autour.
La panthère noire
Enfin, il faut noter que l'histoire d'un homme noir élevé par les indiens a également pu être une source d'inspiration pour les auteurs Marvel. En 1864, l'écrivain Frederic Charles Lascelles Wraxall a publié un roman intitulé The Black Panther : A Boy’s Adventures Among the Redskins.
L'histoire suit les aventures d'un jeune garçon noir nommé Percy ; ce dernier est kidnappé par un groupe de guerriers amérindiens et emmené dans leur village. Là, il est adopté par la tribu et reçoit le nom de "Panthère noire". Au fur et à mesure qu'il grandit au sein du clan, Percy apprend leurs coutumes et adopte leur mode de vie. Il devient un chasseur et un guerrier émérite, gagnant le respect de sa famille adoptive.
Cependant, sa vie paisible est interrompue lorsqu'un groupe de colons blancs arrive dans la région, menaçant la vie de la tribu. Percy se retrouve déchiré entre sa loyauté envers les siens et son désir de les protéger des colons. Le jeune homme va devoir naviguer dans les relations complexes entre les deux groupes et trouver un moyen de réconcilier leurs différences avant qu'il ne soit trop tard.
Entre Afrique et Amérique
Enfin, d'autres théories mentionnent l'influence de The Man-Eater, roman écrit par Edgar Rice Burroughs en 1915 et publié à titre posthume en 1957. Il met en scène une tribu africaine fictive dont Stan Lee et Jack Kirby se seraient inspirés. Le nom Wakanda proviendrait aussi de la tribu kényane Kamba, Akamba ou Wakamba ou bien du mot "kanda", qui veut dire "famille" en Kikongo.
On ne saura sans doute jamais le fin mot de l'histoire, mais toutes ces inspirations différentes sont passionnantes à décrypter. En tout cas, si vous voulez vous plonger dans la culture Osage et découvrir un pan méconnu de l'Histoire américaine, rendez-vous dans les salles pour voir Killers of the Flower Moon.