En octobre 2020, Terminator Dark Fate sortait sur nos écrans avec la ferme intention de reconquérir des fans déçus par les récents volets de la franchise, et particulièrement un Terminator: Genisys désavoué en personne par Arnold Schwarzenegger.
Sur le papier tout semblait d’ailleurs bien parti avec la nomination au poste de réalisateur de Tim Miller, alors tout juste auréolé du succès international de Deadpool tandis que James Cameron était annoncé de retour comme superviseur créatif; le tournage des prochains épisodes d’Avatar ne lui permettant pas de se libérer pour réaliser lui-même ce nouveau Terminator.
Pour rappel, Terminator Dark Fate, sixième long métrage de la franchise, n’est pas la suite des précédents volets, mais le prolongement direct de Terminator 2 (ultime opus réalisé par James Cameron en 1991). Par conséquent il efface de la chronologie officielle de la saga les Terminator 3, Terminator Renaissance et Terminator Genisys donc, tous désavoués – à des degrés divers – par le public.
Un enthousiasme initial nettement tempéré
Une intention noble donc, qui offrait à Dark Fate la position plus confortable de ne pas avoir à faire de lien avec des épisodes mal-aimés, mais aussi la contrepartie de devoir proposer un résultat à la hauteur de Terminator 2, encore considéré à ce jour comme un monument du genre et l’une des meilleures suites jamais produite dans l’Histoire du cinéma.
Pourtant, le résultat n’a pas été à la hauteur des attentes, et c’est peu de le dire. Dès le premier teaser dévoilé, l’enthousiasme né à l’annonce du projet est retombé, la faute à un film-annonce chargé d’action et de scènes à grand spectacle bourrées de grossiers ralentis, bien loin du film dépouillé de fonds verts censé renouer avec les origines de la franchise ainsi que l'avait promis Tim Miller avant d’entamer la production du film.
Avant même sa sortie, il ne semblait d'ailleurs plus faire de doute que Terminator Dark Fate ne serait pas bon, et des rumeurs ont même prétendu que Disney, distributeur du film après le rachat de la 20th Century Fox, a décidé de "sacrifier" le film en opérant la campagne promotionnelle la plus minimaliste qui soit.
Des impressions pessimistes confirmées ensuite par les piètres scores du film au box-office. Ironiquement, le film de Tim Miller a par ailleurs rapporté en fin d'exploitation moins d'argent que les précédents volets que le cinéaste n’avait pas hésité à qualifier de "m**diques" dans l’entretien qu’il nous avait accordé lors de notre visite sur le tournage du film à Budapest.
Tensions en coulisses
A défaut de sauver la franchise, Terminator Dark Fate l’a donc précipitée dans la tombe. Mais comment expliquer un tel naufrage commercial et artistique, puisque le film n’était effectivement pas bon, en témoigne par exemple sa note spectateurs sur AlloCiné de 2,6/5 ? Un premier élément de réponse est lié aux tensions d’ordre créatif qui ont opposé le cinéaste à son producteur James Cameron.
S’il a personnellement pris des mesures pour remettre sa franchise sur de bons rails, James Cameron n’a guère pu s’atteler lui-même à la réalisation du film, puisque déjà impliqué sur le tournage des deux prochains volets d’Avatar.
En choisissant Tim Miller pour le remplacer, le cinéaste canadien pensait avoir trouvé la bonne solution, encore aurait-il fallu que les deux hommes partagent la même vision de l’histoire, ce qui n’a pas été le cas. Peu après la sortie du film, Tim Miller n’a pas hésité à revenir sur ce tournage quelque peu chaotique, affirmant à cette occasion que plus jamais il ne travaillera avec James Cameron.
"Les choses que les spectateurs ont le moins aimé à propos du film sont celles sur lesquelles je n’avais pas le contrôle. Je n’y peux rien si vous n’avez pas aimé Genisys ou si vous vous êtes senti trahi par Terminator 4, ce n’est pas de ma faute.
Bien que Jim (Cameron) et David Ellison soient les producteurs du film, ce qui leur donne le final cut, je suis toujours crédité au générique comme le réalisateur. Et bien que la bataille soit perdue d’avance, je me sens toujours obligé de me battre pour préserver la qualité du film car c’est ce qu’un réalisateur est censé faire : se battre pour ses films." a-t-il notamment déclaré à nos confrères du Hollywood Reporter en novembre 2019.
Selon lui, le principal souci du film serait lié à sa vision diamétralement opposée à celle des deux producteurs mais à en croire Linda Hamilton, l’interprète de Sarah Connor, cet échec serait plutôt la conséquence du scénario.
Dans une interview accordée au site américain The A.V. Club, la comédienne de 63 ans à l'époque a en effet dénoncé l’absence d’un script complet au début de la production, avançant même que le film aurait été écrit au fur et à mesure du tournage en dépit de la cohérence de l’intrigue :
"Le scénario n'était pas tout à fait fini lorsque l'on a commencé et il était écrit au fur et à mesure. Et nous avons tous trouvé que c'était très difficile de travailler ainsi. Beaucoup de gens m’ont dit que c'est comme ça que l'on fait des films désormais. Mais jai besoin d'un début, d'un milieu et d'une fin."
Avec un scénario improvisé en cours de tournage et des conflits entre le réalisateur et la production du film, on comprend mieux la catastrophe industrielle qu’a été Terminator Dark Fate et pourquoi il apparaît comme peu probable que la saga ne ressurgisse dans un futur proche; tout du moins tant que Disney disposera des droits de la saga.
Reste désormais à savoir si James Cameron tentera de nouveau de réhabiliter la licence en s’attelant cette fois-ci lui-même à la réalisation d’un septième opus ou si les leçons des quatre (!) échecs consécutifs l’ont désormais convaincu que la franchise Terminator appartient au passé et – dans le cas de ses deux premiers volets – au panthéon de l’Histoire du cinéma.
"C'était papy Terminator !"
Dans un exercice de post mortem, bien tardif au demeurant, James Cameron s'est exprimé sur le sujet en décembre dernier, au micro du site Deadline, alors qu'il était en pleine promotion d'Avatar 2. Et déclarait être tout à fait disposé à prendre sa part de responsabilité dans le fiasco de l'entreprise, qui a quand même fait perdre près de 120 millions $ à la Twentieth Century Fox.
"Je pense que le problème vient de moi, car j'ai refusé de le faire sans Arnold [Schwarzenegger]. Tim ne voulait pas [de lui], mais je lui ai dit : 'Ecoute, je ne veux pas de ça. Arnold et moi avons été amis pendant 40 ans et je l'entendais d'ici dire : "Jim, je ne peux pas croire que tu fasses un film Terminator sans moi".
Il ajoutait : "Je pense que ce qui s'est passé c'est que le film aurait pu survivre avec Linda, ou il aurait pu survivre avec Arnold. Mais lorsque vous mettez Linda et Arnold ensemble, elle est dans la soixantaine, lui a dans les 70, tout à coup ce n'est plus votre film Terminator. Ce n'était même pas celui de votre père. C'était Papy Terminator, et nous ne l'avons pas vu".