C'est quoi, le cinéma mainstream ?
lundi 23 août 2010 - 06h00

Auteur du livre-enquête "Mainstream", le sociologue Frédéric Martel analyse pour AlloCiné quelques tendances de l'industrie du 7e art : l'hégémonie du cinéma américain, les relations entre studios et indépendants, le poids d'Internet... Propos recueillis par Camille Lamourette.

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Frédéric Martel : La puissance d’Hollywood s’est affirmée dès les années 1910 aux Etats-Unis, et partout dans le monde dès les années 20 et surtout 30. Il existait déjà alors en Amérique une culture de masse très importante. Mais jusqu'aux années 50, les Etats-Unis, qui se sont longtemps construits sur leurs racines européennes, ont repris la hiérarchie culturelle héritée de l’Europe. Dans les années 60, l’Amérique, en matière culturelle, est devenue l’Amérique, c’est-à-dire un pays où la hiérarchie culturelle est inversée, effacée, où la frontière entre la haute culture et la culture de masse s’estompe. Par exemple, Leonard Bernstein à la tête du New York philarmonique, Ives ou encore Copland, mélangent constamment la haute et la basse culture : Bernstein est à la fois le directeur du philarmonique et le créateur de West side story à Broadway.

 

 

De ce point de vue, les grands studios et leurs dirigeants sont très pragmatiques : ils font des films mainstream destinés à la planète entière, mais ils utilisent aussi des maisons de production internes, qui leur appartiennent totalement, qui sont des unités spécialisées. C’est le cas de Focus Features (société du groupe NBC Universal). Miramax a également joué ce rôle lorsqu’elle a été rachetée par Disney, et on peut considérer que Pixar joue ce rôle aujourd’hui. De même, Dreamworks, qui est plus complexe dans son montage, joue aussi un petit peu ce rôle pour Disney, mais il y a beaucoup d’autres exemples. Ces unités spécialisées sont très centrales à Hollywood, certaines ont fermé ces dernières années mais beaucoup restent très actives.

 

A Hollywood aujourd’hui, tout le monde est à la fois studio et indépendant

 

Jusque dans les années 50, les studios se définissent comme des industries à fabriquer du rêve, où tout le monde est salarié, et où un produit est fabriqué du début à la fin par un studio. Ces studios sont alors extrêmement identifiables et leurs productions très liées à leur histoire. Ce modèle industriel s’écroule dans les années 50 à cause d’une décision de la Cour Suprême qui interdit la concentration verticale dans les studios et qui sépare obligatoirement, la distribution, l’exploitation des films, les studios et leur fabrication. Dès lors, les studios vont devenir de plus en plus complexes et de moins en moins des usines. Aujourd’hui, le studio est essentiellement une banque, qui finance soit des unités spécialisées, soit des producteurs indépendants. Un film comme Spider-Man est fait par une société de production indépendante, ce qui veut dire que les studios travaillent avec les indépendants, que les indépendants ont besoin des studios.  A Hollywood aujourd’hui, tout le monde est à la fois studio et indépendant, la distinction film indépendant-film de studios n’existe plus.

 

 

Il y a des passages et des échanges constants entre d'un côté les Blockbusters, la culture Mainstream et de l'autre la périphérie, la diversité, les minorités, l’avant-garde, la contre-culture ou encore la culture des universités. C’est là que se font l’expérimentation, la recherche et le développement, c’est un système très complexe qui est l’écosystème même de la Californie. D’une certaine manière, les indépendants deviennent inévitablement des studios. Historiquement, Hollywood a été créé par des indépendants qui ont fui la Major de l’époque, Edison, sur la côte Est. Le mainstream et le studio ne peuvent pas se reproduire par eux-mêmes. Ils ont besoin pour se renouveler de la contre-culture, de l’innovation, de la prise de risque, de la diversité, de la recherche et du développement qu'on trouve dans les universités. C’est la même chose pour les nouvelles technologies, elles sont souvent portées par des petites start-up qui vont contribuer à faire évoluer Hollywood.

 


Qui travaille pour qui ? Grands studios et studios indé


Disney : Le Walt Disney Motion Pictures Group regroupe les studios de cinéma Walt Disney Pictures (pour les longs métrages), Touchstone Pictures, Hollywood Pictures, récemment Marvel Entertainment, et Miramax qui comprend la division Dimension Films. Walt Disney Pictures est subdivisé en Walt Disney Animation Studios,  Pixar Animation Studios et Disneynature.  Depuis 2009, La distribution des productions des studios Dreamworks  désormais indépendant est également assurée par Walt Disney Studios Distribution.


Paramount : Paramount Vantage, Amblin Entertainment, United International Pictures


Fox Filmed Entertainment : (une branche de la division Filmed Entertainment du Fox Entertainment Group) : Twentieth Century Fox, Fox 2000, Fox Searchlight Pictures, Twentieth Century Fox Animation, Blue Sky Studios Inc.


Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc. (une filiale de Sony Pictures Entertainment Inc., une société de la Sony Corporation of America) : MGM Pictures, United Artists


Columbia TriStar Motion Picture Group (une filiale de Sony Pictures Entertainment Inc., une société de la Sony Corporation of America) : Columbia Pictures, Sony Pictures Classics, Screen Gems


NBC Universal : Universal Pictures Group, Universal Pictures, Focus Features, United International Pictures

 

Time Warner Company : Warner Bros. Entertainment, Warner Bros. Pictures, Warner Independent Productions, Castle Rock Entertainment, New Line Cinema, Fine Line Features, Home Box Office, HBO Films

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Commentaires

  • Kick-

    Très bon dossier.

  • JokerDreizen

    Oh putain le rédacteur s'est complètement lâché sur le chapitre sur Hadopi xD ! Pas mal !

  • irongaordon

    D'accord avec toi JokerDreizen, excellent ce paragraphe :)

  • Buzzleclair

    Très bon dossier, et ça donne envie de lire l'étude complète.

  • dvdmike452

    les sociologues comprennent bien mieux le monde que les hommes politiques ; le paragraphe sur hadopi (entre autre) en est encore une fois la preuve !

  • heathledgerdu62

    un très bon livre sur le cinéma !!!

  • TheLionandtheCobra

    pas mal comme dossier et analyse très pertinente même si personnellement je n'ai pas appris grand chose

  • tit-flo

    Dossier très intéressant. Je ne suis pas tout à fait d'accord cependant sur le rôle de la critique. Chaque semaine, je lis les critiques des films qui m'intéressent, car à plus de 10€ la séance en plein tarif dans les multiplex, je n'ai pas envie de gaspiller autant d'argent pour voir film de mauvaise qualité, même si tout le monde l'a vu...

  • bloodtear

    Vraiment trop vague comme dossier.
    On pioche ici et la , avec quelques détails et titres sans explications. L'analyse est bonne mais ne se risque à rien donc cela ne surprend pas.

  • Maibondieu

    Intéressant, en particulier cette remarque sur le fait que les européens font du cinéma national mais n'arrivent pas à faire du cinéma européen ni du mainstream... Ca fait vraiment réfléchir. Et puis je suis ravie de constater que de plus en plus de gens réconcilient le cinéma intellectuel et populaire, sans bouder ni l'un ni l'autre.

  • Picoscrope

    Dossier très intéressant et l'analyse bien élaborée.

    Au niveau des films Mainstream que les Américains peuvent produire, je dirais que c'est surtout ( en ce moment) grâce à des réalisateurs talentueux à leur imaginaire imparable ( James Cameron, Christopher Nolan, Scorcese...) qu'Hollywood arrive à séduire tout le monde et imiter leur modèle dans d'autres films . Tout le monde n'est pas pour cette culture mainstream, mais c'est un fait, les Américains y arrivent et sont les meilleurs dans ce domaine.

    Luc Besson quant à lui est dans l'effet la sinusoïde dans ses réalisations et productions. Pourquoi pas l'apparition d'un autre producteur autant capable dans l'industrie du cinéma.

  • sadijin

    Excellent dossier. De plus, vois que je ne suis pas le seul à consentir au paragraphe sur Hadopi. Je suis d'accord avec toi, dvdmike452, les sociologues comprennent vraiment mieux le monde que les hommes politiques...

  • Musarise

    Mouais. "L'analyse" du succès d'Avatar détruit la crédibilité gagnée dans le reste de l'article. "Avatar a du succès, c'est qu'il est incroyable" est un raisonnement totalement faux. On l'a déjà vu avec Bienvenue chez les chtits ! Phénomènes de modes, engouements inexpliqués, ameutement, on appelle cela comme on veut, mais quand on se dit sociologue et cinéphile on évite de dire des trucs pareils :)

    (dommage car comme je le pense le reste est plus qu'intéressant bien que résumé sommairement)

  • cineberry

    Excellente analyse. Il y a quand même deux petits bémols. Premièrement : Frédéric Martel prétend que le succès des films américains dans le monde tient au fait qu' "ils racontent des histoires qui parlent à tous parce qu’ils s’adressent au monde entier". Ce n'est pas tout à fait vrai : certaines comédies qui ont cartonné aux États-Unis ne trouvent pas leur public dans le reste du monde à cause des problèmes de spécificités nationales qu'il est parfois impossible à traduire. L'inverse est vrai : les studios américains ont refait à leur sauce des succès du box-office français (La totale devenu True lies, Un indien dans la ville devenu Un indien à New York ou plus récemment Le dîner de cons devenu Dinner for Schmucks) pour franchir cette même barrière de la langue.
    Deuxièmement, là où le spectateur du monde entier voit des films américains doublés dans leur langue maternelle sans a priori, le spectateurs américain rechigne à voir des films doublés. Le marché des films doublés aux USA dépasse rarement les 10 millions de dollars au box-office et est réservé plutôt à une élite friande de cinéma du monde. Les rares films français à avoir marché aux USA étaient pour la plupart tournés en langue anglaise (Taken 145M$, Le cinquième élément 63M$...) ou étaient des documentaires avec voix-off donc pas vraiment doublés (La marche de l'empereur 77M$, Oceans 19M$...)

  • Baal-84

    "Hadopi (...) est une absurdité sarkozyste". Sociologue, hein ? Si demain les gens squattent les maisons parce qu'ils les veulent gratuitement, on reprochera aux vendeurs de les vendre trop cher et on culpabilisera les préfecture d'oser expulser les squatters et d'avoir un système de fichier pour les reconnaitre ? Faut arrêter la masturbation intellectuelle, surtout quand il n'y a rien à masturber. Le principal problème d'hadopi c'est d'avoir à exister, à savoir qu'aujourd'hui on vole ce qu'on a pas envie d'acheter, sous prétexte que c'est nul (à tel point qu'on viole la loi pour le consommer). A partir du moment où un mec arrive pas à s'élever au delà de "bouh hadopi c'est nul et c'est la faute à sarko parce que les médias sont trop cher" (faux, ils ne sont chers que quand ils sont neufs !), il perd à mes yeux toute crédibilité. Après on pourra toujours débattre du reste de l'analyse, moi je perd pas mon temps avec quelqu'un qui recrache des stéréotypes.

  • Watchmen

    Jetez un coup d'oeil sur mon dernier court métrage. Un film sans 3D mais avec le célèbre procédé sonore... la quadriphonie !!!!!

    Personne ne viendra vous aider
    http://www.dailymotion.com/vid...
    Bon film !

  • benjimagne

    Il faut lire le livre pour pouvoir ce faire une réelle idée de la qualité de l'analyse et ne pas se fonder seulement sur un dossier Allociné qui ne peut éviter les raccourcis.

  • Adrien P.

    Une analyse courte et bref, mais qui permet de s'interesser au sujet.
    Claude Lelouch: Le monde du partage devra remplacer le partage du monde.

  • kevinbarnes

    Très bon article, argumenté et documenté sans être manichéen et trop simpliste

  • echoglacial

    Bien,mais pourrait être meilleur.

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