Auteur du livre-enquête "Mainstream", le sociologue Frédéric Martel analyse pour AlloCiné quelques tendances de l'industrie du 7e art : l'hégémonie du cinéma américain, les relations entre studios et indépendants, le poids d'Internet... Propos recueillis par Camille Lamourette.
Frédéric Martel : On croit que la mondialisation tue les cultures nationales. Or, les cultures nationales et le cinéma national se portent relativement bien partout dans le monde. En France, le box-office de cette année est certes un peu faible par rapport aux années précédentes (soit autour de 37% pour les films français, de 59% pour les films américains et de 3-4-5% maximum pour les films d’autres pays) mais le cinéma français reste à un taux assez stable de 40%. Les chiffre sont sensiblement les mêmes à Prague, où la part du cinéma tchèque est assez importante, et c’est aussi vrai pour beaucoup d’autres pays tels que le Japon, la Chine, l’Inde ou encore la plupart des pays arabes. L’Amérique latine fait néanmoins figure d’exception.
Dans beaucoup de pays, le cinéma national se porte bien parce que les Allemands font des films pour les Allemands, les Tchèques pour les Tchèques, les Français pour les Français, etc. Mais ce que tous ces pays-là n’arrivent pas à faire, c’est un cinéma global pour tout le monde. Seuls les Américains arrivent pour l’instant à produire ce cinéma dit mainstream, américanisé, globalisé. Cela s’explique par des facteurs historiques, par leur capacité presque illimitée à se diffuser. Nous sommes d’une certaine manière « binationaux » au niveau culturel, c'est-à-dire à la fois français et américains. Le problème c’est que nous ne sommes plus européens. Les autres pays européens sont comme nous, ils sont nationaux partout ET américains. Cependant, le problème est que la seule culture qui relie les Européens entre eux (du point de vue des masses et non de l’art), c’est la culture américaine.
La seule culture qui relie les Européens, c'est la culture américaine...
Parler de show business aux Etats-Unis et de show art en France est néanmoins beaucoup trop réducteur. Les Etats-Unis font aussi de l’art, de l’avant-garde, de la culture très élitiste, et les Français font aussi du business. Beaucoup de films français qui marchent sont des blockbusters, des films commerciaux. En réalité, les Etats-Unis font à la fois du mainstream globalisé, de la culture élitiste, de la culture d’avant-garde, de l’expérimentation, de la recherche et du développement. Ils jouent sur toutes les échelles à la fois. Les Français, comme les Européens en général, ne parviennent pas à faire de la culture mainstream. Et ce en partie pour des raisons de pur business, liées à la puissance nationale. Aujourd’hui un film coûte souvent plus de 100 millions de dollars, ce qui constitue un budget considérable. Or, pour faire du mainstream, on a avant tout besoin de moyens, c’est-à-dire d’une puissance marketing et d’une distribution internationale que seuls les Américains possèdent. En ce qui concerne le contenu, ils racontent des histoires qui parlent à tous parce qu’ils s’adressent au monde entier, alors que nous nous adressons avant tout aux Français, par les références culturelles, par l’humour parfois et par tout un ensemble de facteurs très ethnocentriques.
Les Etats-Unis, un monde en miniature
S’ajoute à cela le fait que les produits nationaux européens ont du mal à intéresser, à concerner et à parler aux Européens en général. Les Etats-Unis sont définis par leur diversité culturelle : rappelons qu’ils comptent sur leur sol près de 40 millions de Latinos, 38 millions de Noirs et entre 12 et 14 millions d’Asiatiques. On a ainsi un pays qui n’est pas simplement un pays mais un continent, et le monde en miniature. En France, la diversité culturelle est beaucoup moins grande. Ce qui concerne les Etats-Unis concerne la plupart des pays du monde, des Iraniens comme des Indonésiens, des Européens, des Russes, des Juifs, les Latinos de toutes sortes, et des Asiatiques de toutes îles. Les identités de chacun existent fortement, les Etats-Unis sont un pays où vous êtes à la fois vous-mêmes et où vous devenez américain. En France, on souhaite que vous deveniez français et ça passe par une acculturation qui vous fait perdre votre identité culturelle natale. C’est toute la différence entre assimilation culturelle à la française et communautarisme à l’anglo-saxonne.
Soulignons qu’il faut, avant tout, avoir une production nationale forte pour parler aux populations nationales et ensuite viser un public international. C’est important d’être puissant sur son marché domestique et d’avoir un box-office national fort. On y réussit partiellement en France mais pas tout le temps. Ensuite, il y a notre capacité à produire des films qui aillent au-delà du public domestique. Luc Besson par exemple, se dirige vers ce genre de produit, même si Adèle Blanc-Sec et Arthur et les Minimoys, qui n’arrivent pas à convaincre entièrement les Français, auront probablement du mal à convaincre le reste du monde. Mais grâce à des films comme Le Cinquième élément, Taken, Le Grand bleu à l’époque, et beaucoup d’autres, Luc Besson a réussi sur le marché national et international. L’expérimentation de Besson est très intéressante, et les Français devraient davantage s’intéresser à ce phénomène.
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