Difficile de faire une critique sur cette série tant elle aura marqué le petit écran français car, oui, on peut affirmer sans pouvoir se faire contredire, qu'il y a eu un avant et un après Walker Texas Ranger en France. Si les coutumes ancestrales de notre pays reposaient sur la messe du dimanche matin, de 1995 à 2012, cette grand-messe se déroulait toujours le dimanche, certes, mais en début d'après-midi.
Rarement une série télévisée n'aura été aussi audacieuse tant sur le plan scénaristique qu'idéologique car oui, Walker Texas Ranger nous prodiguait un message universel basé sur le respect des vraies valeurs (travail, famille, patrie, flingues...) et sur le patriotisme participatif : chacun de nous était un Walker qui s'ignorait. De plus, rarement une série n'aura autant joué avec les sentiments du téléspectateur. Moments d'action anthologiques (Chuck Norris est un Dieu, tout simplement), mais également bonnes tranches de rigolade (ah, les brèves de comptoir chez CD !) et surtout moments de grande émotion. Qui ou plutôt quel être doté d'un cœur n'a pas versé une larme lorsque, par exemple, le bison pleurait ou bien lorsqu'une femme porto-ricaine accoucha dans une masure placée sous l'étoile du Berger qui, étrangement, scintillait plus que d'habitude le soir-là ?
Par ailleurs, cette série nous faisait voyager, nous transportait tant dans les grands espaces sauvages que dans les espaces urbains, berceaux des self-made men qui sommeillent en nous. Et puis ça fleurait bon l'Amérique, la vraie ! 4X4 américains (qui n'a pas rêvé d'avoir le fameux Dodge Ram série 1500 gris métallisé avec les phares sur le toit), Stetson vissés sur la tête, jeans Lee Cooper, blousons à franges, ceintures imposantes et apparentes, santiags, l'apparition des Cherokee... le tout créait une ambiance singulière qu'aucune série n'a pu ne serait-ce qu'effleurer. Il faut préciser d'ailleurs que la chaîne de restaurants Buffalo Grill s'en est outrageusement inspiré...
Ces éléments réunis, il fallait un casting qui tienne la route. Et le choix s'est naturellement porté sur l'inénarrable, l'inébranlable, l'incorruptible et non versatile Chuck Norris. Là où des Bruce Willis, Sylvester Stallone ou encore Brad Pitt auraient lamentablement échoué, le Grand Chuck a rempli sa mission haut la main : nous transmettre le goût des valeurs républicaines, démocratiques et surtout l'amour des arts martiaux. Quel acteur pourrait encore aujourd'hui se targuer d'aligner les scènes de combat sans pour autant perdre sa perruque ? Des acteurs comme Bruce Willis ou encore Jason Statham n'en ont même pas le courage et se rasent vulgairement le crâne. Que c'était jouissif de voir Monsieur Norris transmettre ses vœux aux brigands, aux macs sans scrupules et aux canailles en tous genres ! Et ses acolytes n'étaient pas en reste ! Pour le rôle de Trivette, les scénaristes ont eu le courage de poser leurs attributs sur la table en enrôlant un acteur de l'envergure de Clarence Gilyard qui a joué, rappelons-le, à la perfection l'informaticien machiavélique de Hans Gruber dans Piège de Cristal, excusez du peu. Et quel mâle viril qui se respecte n'a pas fantasmé au moins une fois devant la grâce et l'élégance de Nia Peeples ? Quand une série met autant de moyens dans son casting et dans ses effets spéciaux et cascades, forcément on a devant les yeux un spectacle tout à fait époustouflant. Tout cela sans oublier que la série s'est permis d'inviter des monuments du 7e art comme par exemple l'époustouflant Hulk Hogan, parfait dans le rôle de Boomer.
Et puis il y avait les épisodes portés sur les origines de Walker. Rien que de repenser à Aigle-Blanc, j'en ai des frissons. Là où tous les programmes écologistes ont échoué, et bien avant Nicolas Hulot ou Georges Pernoud, Walker Texas Ranger savait nous émouvoir et nous interpeller sur la nécessité de protéger Dame Nature. Quant au générique de la série, que dire ? Chuck Norris, homme touche-à-tout extrêmement talentueux, s'est permis modestement de pousser la chansonnette. Et le résultat est époustouflant tant le générique marqua les générations et sonnait comme les cloches de l’Église après les repas gargantuesques du dimanche midi après le journal soporifique de Jacques Legros. Un générique entré dans les mémoires collectives, autant dire que cette série était un miracle pour les yeux mais également pour les oreilles (faut-il rappeler le réalisme saisissant des scènes de bagarre). Personnellement, je me suis acheté l'intégrale de la série en blu-ray et j'y ai laissé une oreille.
En conclusion, Walker Texas Ranger est ce genre d'OVNI du petit écran qu'on ne risque pas de revoir de sitôt, alliant panache et audace. En tout cas, j'ai la fierté de pouvoir dire : je l'ai vu de mes propres yeux ! Et cela vaut tout l'or du monde. On peut même dire, sans l'ombre d'un doute, que Chuck Norris était en fait le (grand-)père bienveillant qu'on a tous rêvé d'avoir. Et c'est bien dommage de voir que cette série n'est plus diffusée car elle avait le mérite d'inculquer des valeurs fondamentales pour le jeune public. Il ne faut pas s'étonner si on constate actuellement une recrudescence de la violence et du manque de respect dû à la non-diffusion de la série. Pour tout cela, je dirai juste « merci » à Monsieur Norris et ses acolytes d'avoir apporté de la lumière dans l'obscurantisme télévisuel et ce n'est pas les pâles séries que sont Breaking Bad ou True Detective (copie soporifique de WTR) qui viendront remettre en cause la suprématie totale de Walker Texas Ranger dans l'imaginaire collectif.