Second long-métrage de François Truffaut, Tirez sur le pianiste nous plonge dans le Paris morose des années 50, morosité que l'on retrouvait par ailleurs dans son long-métrage précédent, son premier, Les Quatre Cents Coups. Cette morosité, Truffaut sut l'exploiter d'une réelle pertinence. En effet, le film narre le quotidien d'un jeune pianiste, aux abords plutôt minables (il n'y a qu'à voir et écouter le piano sur lequel le protagoniste joue), mais doué d'un talent féerique. À l'origine Édouard Saroyan (interprété par Charles Aznavour), celui qu'on appellera Charlie Kohler cherchera à fuir son passé et son présent, chose déjà accomplie durant son enfance, durant laquelle le personnage trouva par le piano un réel moyen de s'extirper de sa famille, alors toxique pour lui-même. Chagrin d'amour, timidité, famille, talent bafoué et carrière ratée sont les mots de l'anti-héros. Aznavour nous signe alors la prestation d'un personnage d'une triste nonchalance, dont la vie n'a que peu de saveur, même devant son bel instrument. La fin, mélodramatique par excellence, pourra surprendre le spectateur, qui, au travers d'un film relevant d'une banale mélancolie, ne s'attendra pas à contempler la Mort.
Un bon film, porté surtout par un Charles Aznavour rejeté et attachant. Je relève tout de même la qualité esthétique du film qui est très décevante pour un film de cette époque (1960). Le son est souvent mal géré à tel point que certains dialogues sont inaudibles. La luminosité, quant à elle, laisse parfois à désirer.