Truffaut après ses « 400 coups », satire sociale virulente aux apparences anodines ne veut pas se laisser enfermer dans un genre ni dans un style particulier. Il veut démontrer sa liberté créatrice et choisit de détourner un polar. Echec total en France. Succès durant plusieurs années aux USA. Nos amis ricains, bien moins bourrins qu’on ne croit en France, ont parfaitement compris la démarche de Truffaut, consistant à instiller, dans ce qui était sensé être un film noir, des éléments de burlesque, de pure poésie, et des procédés techniques décalés de la norme (superpositions de plans, non synchronisation des dialogues, etc…).
Très engagé dans des positions idéologiques à la mode à l’époque, communisme et maoïsme, c’est surtout à Goddard qu’allaient les éloges de la critique française à l’époque. Pourtant, aujourd’hui que l’adhésion des artistes aux idéologies gauchistes est moins indispensable pour avoir la reconnaissance de la critique française, force est de constater que ce cinéma, appelé expérimental par les disciples du politiquement correct, mais appelé « prise de tête et brise burnes » par les partisans du parler franc, a fait fuir le grand public. S’il ne reste plus grand monde aujourd’hui pour aimer les films de Godard, le nombre des aficionados de Truffaut reste important. Et ce n’est que justice ! Car en plus du verbiage gauchiste de l’époque, des marottes stylistiques des lideurs de la Nouvelle Vague, il y avait, chez Truffaut, un souci essentiel de raconter une histoire, d’en respecter l’action, et de la rendre captivante à son public. Cadets soucis chez les autres surfeurs de la Nouvelle Vague à l’époque, plus préoccupé à concocter du « cinéma éprouvette », que du cinéma tout court. A (re)voir ne serait-ce que pour la cultuelle « Avanie et mamelles » de Bobby Lapointe.