A l'opposé d'un Vincente Minnelli proposant une vie de Van Gogh flamboyante et romanesque, Pialat raconte sur un mode naturaliste les dernières semaines du peintre à Auvers-sur-Oise, auprès du docteur Gachet et de sa fille. Le postulat de Pialat est de tourner le dos au mythe de l'artiste maudit, de la bohème romantisée, et le cinéaste s'interdit tout effet dramatique, ainsi qu'on le mesure plus encore au moment du suicide et de la fin de Van Gogh, séquences presque anodines, totalement dépourvues de pathétique.
Le film est long (pas toujours intéressant, disons-le), évoque Van Gogh, l'homme et le peintre, dans un quotidien dépassionné, à travers ses relations avec ses hôtes, ses amies prostituées ou son frère et soutien Théo. Et même, la description minutieuse d'Auvers-sur-Oise en 1890 invoque une douceur de vivre, un passéisme chamant avec ses parties de campagne qui sont une vraie contribution au sujet.
Pialat ne s'intéresse pas seulement à Van Gogh; il reconstitue le décor, l'esprit et l'esthétique fin de siècle que reproduisaient les peintres de l'époque, les impressionnistes en particulier. Toutefois, il est difficile de voir dans la composition minimaliste de Jacques Dutronc, sans éclat ni affectation, mais parfois avec cette goguenardise, ce sourire en coin, qui caractérisent surtout la causticité de l'acteur, une création passionnante.
En réalité -et c'est pourquoi le film m'a laissé sur ma faim- les tourments humains et créatifs de VanGogh ne sont pas étayés, Pialat se refusant à l'étude psychologique. La personnalité de Van Gogh, sa difficulté de vivre, son insatisfaction restents vagues et demeurent une énigme parce que le réalisateur l'a voulu ainsi.