Et voilà, j'ai enfin vu le dernier long métrage de Pialat qu'il me restait à voir. C'est bizarre de savoir que plus jamais je ne pourrai m'extasier pour la première fois devant un de ses films. C'est un peu triste.
Je dois dire que si j'aime bien Van Gogh en tant que peintre, que ça vie je la trouve intéressante, ici ce n'est pas sa vie à Van Gogh qui m'intéresse, mais bel et bien ce que Pialat peut en faire. Cette capacité folle à créer le sublime dans des moments ordinaires avec toute la crasse et la vulgarité qu'elle implique.
Et là les moments de narration pure, qui sont rares il faut le dire, la plupart des scènes sont juste des scènes de vie, Pialat ne s'enquiquine pas à filmer ce qu'il n'a pas envie de filmer, ne sont pas forcément ce qu'il y a de mieux dans le film. On comprend l'histoire, simple, sans qu'on en rajoute, alors le film possède de nombreuses petites ellipses passant sous silence les moments qui auraient pu causer au film quelques longueurs.
Pialat fait sans nul doute parti des grands parmi les grands pour cette capacité à filmer quelque chose que nul autre ne peut filmer (si ce n'est un cercle très réduit). Il peut filmer Jacques Dutronc et Alexandra London, qui jouent respectivement Van Gogh et Marguerite, sans que l'on voit les acteurs jouer, ou bien que l'on croit voir les vrais Van Gogh et sa vraie maîtresse, ou que l'on croit aux personnages, il arrive à filmer quelque chose de beau : pas seulement une représentation de la tendresse, mais bel et bien la tendresse elle même.
Lorsque dans les champs de blé l'on voit Marguerite en contre-plongée avec son chemisier grand ouvert ne laissant que peu de place à l'imagination sourire et Vincent Van Gogh couché derrière elle, on accède à une dimension absolument magistrale dans le cinéma.
Lorsque j'y réfléchis les seuls qui y sont parvenus à ma connaissance sont Pialat (bien sûr), Dumont, Bresson, Godard (de temps en temps lorsqu'il arrive à revenir à quelque chose de plus simple) ou bien encore Grandrieux. Bonello peut également y parvenir grâce à l'utilisation de la musique. Mais c'est les seuls et encore les deux derniers c'est dans une moindre mesure.
Il faut arriver à un cinéma tellement simple, tellement pur qu'il en devient transcendantal. C'est le cinéma que j'aime. Même si j'avais détesté le reste du film (ce qui est loin d'être le cas), ce genre de scène dans le film le sauveraient complètement.
Je dirai même que c'est dans ces instants de communion entre toutes les composantes qui font le cinéma et qui lui permette de jaillir hors de l'écran qui rendent parfois l'art plus vrai que la vie réelle et qui nous font envier la vie de ces personnages, leurs petits moments de bonheur.
Comment ne pas sentir son coeur s'envoler dans sa poitrine lorsque Marguerite pose pour la première fois son épaule sur Van Gogh ?
Contrairement aux autres Pialat comme Nous ne vieillirons pas ensemble ou à nos amours où j'adorai les scènes de cruauté ordinaire entre les personnages que je trouve incroyablement vraie et touchante, ici les disputes ne m'ont pas forcément émues. Ce que je voulais voir c'était cet amour pur, unilatéral naître. J'ai retrouvé ce qui m'avait ému dans Flandres de Dumont.
Il a aussi ce souci du détail, ce plan où un type ramasse Van Gogh agonisant, ce cadre parfait où on voit cette vieille bicyclette posée sur le côté, ou bien ce petit vieux qui donne de l'alcool à Van Gogh, des moments qui sont authentique par essence.
Ce Van Gogh n'est sans doute pas mon Pialat préféré, je lui préfère à nos amours, nous ne vieillirons pas ensemble et surtout la maison des bois, mais Van Gogh aura une place de choix dans mon coeur parce que justement c'est le genre de film qui laisse croire au bonheur.
Du cinéma du vrai. On est pas au théâtre, on est pas au spectacle, on est dans le réel, dans la beauté des moments simples et profanes.
Et je ne peux pas finir cet avis sans parler d'Elsa Zylberstein qui sans diffamation trouve enfin le rôle parfait pour elle, un rôle de …