Teen-movie mordant
C’est la 1ère fois que Céline Rouzet écrit et réalise un film de fiction. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’avec ces 104 minutes, elle parvient à renouveler le mythe du vampire. Philémon est un adolescent pas comme les autres : pour survivre, il a besoin de sang humain. Dans la banlieue pavillonnaire un peu trop tranquille où il emménage avec sa famille, il fait tout pour se fondre dans le décor. Jusqu'au jour où il tombe amoureux de sa voisine Camila et attire l’attention sur eux… Un récit poignant sur la différence, l’acceptation et… l’amour. Une belle surprise qui a reçu le Prix du Jry au Festival de Gérardmer.
Certes, ce n’est ni l’Elephant Man de David Lynch, ni Edward aux mains d’argent de Tim Burton, mais ça n’en n’a pas non plus la prétention. Ce film regarde la famille comme à la fois un refuge et un poison, l’amour comme une substance addictive, et s’interroge sur la question de l’identité. Vaste programme. Peut-être un peu trop pour un 1er film. On retiendra surtout l’habile métaphore des ravages de la stigmatisation des personnes en situation de handicap et de la justice populaire. L’autre force de ce film reste le personnage central, celui d’un vampire moderne fragile et touchant. Techniquement, le film est très soigné et l’interprétation impeccable. La seule faiblesse – souvent inhérente à un 1er film -, reste le scénario sans doute un peu trop touffu pour que tous les thèmes soient traités à fond. Alors on reste un peu sur sa faim, il faut dire que Céline Rouzet nous a ouvert l’appétit.
C’est une 1ère apparition à l’écran pour le jeune Mathias Legoût Hammond. A 23 ans, il parvient à faire croire à ce garçon pas comme les autres. Son jeu très intériorisé est assez étonnant et son duo avec Céleste Brunnquell, - un de nos espoirs féminins qui n’en finit plus de monter -, fonctionne à merveille. Les parents Elodie Bouchez et Jean-Charles Clichet sont également parfaits. On aurait pu craindre que ce film reste un peu à l’ombre de ces prestigieux modèles. Mais, heureusement, il tire admirablement son épingle du jeu et sort de l’ordinaire surtout dans le paysage du cinéma français pourtant de moins en moins frileux dans le style cinéma de genre. On ne peut que s’en féliciter. Espérons qu’il trouve son public, car il le mérite.