Est-ce une mode ?
Injecter de la fiction dans un film documentaire.
Après « Les filles d’Olfa », « Little Girl Blue » de Mona Achache.
Pour relater l’absence de ses deux premières filles parties rejoindre l’Etat islamique, Olfa se voit adjoindre trois actrices : l’une jouant ponctuellement Olfa elle-même et deux jeunes actrices jouant ses deux premières filles.
Un documentaire troublant dans la mesure où la vraie Olfa reconstitue un passé avec deux actrices jouant ses deux filles.
Avec « Little Girl Blue » c’est la réalisatrice Mona Achache qui demande à Marion Cotillard de prêter ses traits à sa maman Carole Achache.
Ce qui est troublant, ce n’est pas tant que Mona Achache se confronte à Marion Cotillard qui joue sa mère, c’est l’actrice Marion Cotillard qui me donne à voir son processus de création pour parvenir à être la maman de Mona Achache.
Moi qui suis sensible à la direction d’acteurs, au travail de l’acteur, j’ai été agréablement servi.
Comme j’ai apprécié l’option du décor : plusieurs lieux en un seul lieu ; une usine désaffectée pour restituer l’appartement de Carole Achache, une brasserie, une station de radio, un plateau de télévision.
Enfin ce qui est impressionnant, ce sont tous ces documents constitués de lettres et de photos, de cassettes audio et vidéo, un océan de témoignages sous lequel Mona Achache tente d’émerger afin de mieux comprendre et connaître cette mère.
Elle y parviendra... peut-être.
On n'est jamais sûr de rien.
Pour le reste, comment ne pas être indifférent aux abus sexuels de ces deux femmes victimes d’hommes plus âgés alors qu’elles étaient de toutes jeunes filles : 11 ans pour Carole, donc la maman de Mona, et Mona elle-même à 13 ans !
Comment ne pas s’indigner de ces mères faussement silencieuses sur ses crimes d’attouchements : la mère de Carole, Monique Lange et surtout Carole elle-même !
Comme une monstrueuse fatalité.
Dernièrement « Le consentement » : milieu littéraire où un certain Matzneff sévissait grâce à l’hypocrisie des uns, au silence des autres, quand ce n’est pas les deux à la fois !
A part le dispositif, à part le travail captivant de Marion Cotillard, à part ces crimes odieux dont ont été victimes ces deux femmes, je suis resté à distance de leur vie.
A aucun moment, j’ai envié cet anticonformisme adoubé par Marguerite Yourcenar. J’ai préféré mille fois l’histoire de madame Olfa, qui elle aussi partage malheureusement la même et triste part d’ombre que Monique Lange et Carole Achache…