Les romans de Patricia Highsmith sont généralement de bonnes pioches pour le cinéma même si, tout aussi généralement, leur adaptation ne parvient pas à restituer correctement l’atmosphère vénéneuse qui se dégageait des bouquins. ‘Eaux profondes’ aurait sans doute été plus intéressant s’il avait été situé à l’époque de la sortie du livre, soit les années 50. Dans les intérieurs néo-bourgeois d’aujourd’hui, il manque un peu de caractère. Evidemment, le scénario a ce qu’il faut en stock pour tenir le spectateur en haleine (un couple qui implose, une épouse qui s’affiche avec ses amants pour faire enrager son mari, un mari qui reste placide et des amants qui disparaissent les uns après les autres)...même si le suspense reste finalement assez modéré : on s’est vite fait une idée sur la possible culpabilité du mari, et il y a toutes les chances que ce soit la bonne. On parlait d’ambiance trouble un peu plus haut, et c’est un autre domaine où le film se loupe à peu près complètement. ‘Eaux profondes’ se veut érotique et torride…c’est même pour ça qu’il y a Ana de Armas dedans…mais ça n’explique pas pourquoi il y a Ben Affleck qui, en terme d’abandon au plaisir des sens, donne juste envie d’enfiler une chemise canadienne pour aller faire un peu de tour à bois. ‘Eaux profondes’, c’est aussi le grand retour de Adrian Lyne. Mais oui, ‘9 semaines ½’, ‘L’échelle de Jacob’, ‘Liaison fatale’, ‘Proposition indécente’...et puis, plus rien. Après plus de vingt ans de silence, le réalisateur n’a pas changé, il tourne toujours ses thrillers comme à l’époque. ‘Eaux profondes’ étant un film des années 2020, tout le problème vient peut-être de là.