Zhou Zenong est un des petits parrains du vol de motos d’une ville de province chinoise. Lors d’une course-poursuite avec une bande rivale, il tue deux policiers. Il devient alors un fugitif dont la tête est mise à prix. Il ne laissera que la personne la plus innocente de la ville, une prostituée envoyée par un de ses complices, arrêter sa cavale pour que la récompense de sa capture revient à sa femme.
Le lac aux oies sauvages est un classique du genre du film noir. Il se déroule principalement de nuit. Le directeur de la photo est Dong Jingsong, le même qui signait les déambulations nocturnes et poétiques du Grand Voyage vers la nuit de Bi Gan. Les deux films partagent une partie de leur onirisme, mais dans le premier, la recherche était lente et rêveuse, dans le deuxième, effrénée et cauchemardesque. La signature visuelle de Dong Jingsong sont les éclaraiges colorés et notamment les néons. On a beau voir souvent ce type de lumières dans le cinéma actuel, il les renouvelle. Les policiers portant des baskets lumineuses, par exemple, passant d’une chorégraphie en groupe, dans une fête foraine nocturne, à l’identification d’un cadavre, dans l’obscurité d’un bord d’autoroute. La mise en scène est vraiment d’une grande beauté… (je suis loin d’être la seule à le dire).
Le récit est simple : un homme fuit la police et ses ennemis/rivaux. Cependant la trajectoire narrative est assez complexe, et on met un certain temps à remettre en place la chronologies des scènes. Ce qui n’a paradoxalement aucun impact sur l’intérêt du spectateur et la force du film. Les scènes sont des récits dans le récit, et certaines sont découpées de manière extrêmement brillantes. Une des première scènes, d’une extrême violence, dans une cave, se clôt d’un coup de pied qui fait exploser l’ampoule. Noir absolu, scène suivante.
Beaucoup de scènes se répondent, et vont « deux par deux ». Les deux scènes de baskets lumineuses par exemple, les deux scènes de bateau… Pour ma part, j’ai beaucoup aimé les deux scènes de « brief » durant lesquelles on découvre la carte de la ville. Dans la première, la ville est l’objet d’un partage entre voleurs de motos. Rue à rue, elles sont toutes distribuées par ordre de noblesse aux voyous, de la plus riche à la plus populaire. Dans la deuxième, ce sont les policiers qui se voient attribuer un secteur de la ville pour traquer le fugitif. J’ai adoré cette scène de commissariat, qui m’a beaucoup rappelé une scène très similaire dans Entre le ciel et l’enfer de Kurosawa (un de mes films préférés). Le chef de l’enquête nomme un quartier et le réalisateur nous le montre à l’écran tandis que la voix du policier nous le décrit. C’est à cette occasion qu’on découvre la zone de « non droit » qu’est le lac aux oies sauvages… et c’est le même procédé qui est utilisé dans les deux films.
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