« Detroit » a l’intelligence de nous immerger complètement dans l’enfer terrible qu’a connu cette ville en 1967, en cette période plus que troublée lors des révoltes qui ont touché d’ailleurs plusieurs villes d’Amérique...
À ce niveau, on est littéralement pris à la gorge par ce climat ambiant, terriblement anxiogène qui nous tétanise !
La violence des coups et des mots est telle qu’on suffoque de douleur face à ces exactions spontanées, comme lors de cette fête organisée par des Noirs américains que la police interrompt d’office et tout de go, en embarquant sans égard tout ce monde venu simplement s’amuser, certes dans un endroit illicite.
Il manque cependant juste un rappel plus exhaustif du contexte exact de cette révolte.
Celle-ci est en effet trop rapidement résumée par ces dessins montrés en prologue, et de fait pas assez explicite afin de comprendre ces pillages incessants que l’on nous montre ensuite, ce qui laisse ainsi planer une ambiguïté au sujet des réelles intentions et de la motivation de la population noire américaine.
La réalisatrice Kathryn Bigelow, resserre ensuite ces faits, en se focalisant sur ce petit groupe venu se détendre dans l’Algiers Motel, où l’horreur va ici se décupler, en se cristallisant sur quelques individus pris à parti par une poignée de policiers fédéraux et quelques militaires pour quelques coups de feu sans gravité, mais interprétés évidemment comme une agression...
Tout l’intérêt du film repose donc sur cette montée de violence et le déroulement machiavélique de son processus, dont un des instigateurs sera d’un cynisme et d’une perversité sans nom...
C’est alors qu’une foule de sentiments enfouis mais très lisibles passent par les regards hallucinés de ces policiers, tous les trois en position de force face à ces hommes et ces femmes terrorisés et maintenus tête contre mur, sous les coups et les menaces qui pleuvent sans répit.
Frustration, dégoût, sadisme transpirent par tous les pores de ces hommes de loi qui bafouent ainsi délibérément toute procédure légale !
La réalisatrice arrive de plus à semer un trouble évident par la présence sur ces mêmes lieux, d’individus pris à leur propre piège, comme ce vigile Noir, simple témoin effrayé et complice de ces crimes qui comme le spectateur assiste à ces scènes de folie sans pouvoir réagir, tout comme l’est aussi ce soldat pétri de bonnes intentions mais à la marche de manœuvre si limitée dans ce chaos impensable...
On reste donc effaré, les yeux écarquillés, devant la détermination épouvantable et infaillible de seulement trois policiers venus régler leurs comptes à leurs façons !
Parmi ces torturés, ressort en filigrane ce musicien Larry dont les retombées de ces actes barbares transformeront à jamais son destin.
Beaucoup d’instants seront plus d’une fois terriblement poignants, aussi bien lors de la tension extrême dans le motel, que par lors de toutes les suites de ce fait horrible.
Les comédiens que ce soit dans les différents camps, se montreront tous d’une justesse sidérante à faire frémir et pâlir le spectateur, aussi bien chez ce Krauss (Will Poulter) au racisme implacable, que chez ce vigile Dismukes (John Boyega) paralysé par la peur, ou ces prisonniers battus dont les expressions effrayées résonneront encore longtemps après !
Un film dont la violence pure et gratuite, tout comme ses conséquences, font froid dans le dos, d’autant plus que tel un documentaire, tout nous est dépeint sans concession aucune, et dont les images d’archives insérées intelligemment renforcent encore la crédibilité de ces actes inqualifiables !
Une histoire bouleversante, véritable témoignage du racisme et de la barbarie humaine à ne pas louper !