"Fleuve noir", comme la célèbre collection de polars, mais aussi comme des antihéros promenés au fil d'une intrigue de plus en plus sombre, dans un marigot de plus en plus fétide - jusqu'au tout dernier moment.
Une intrigue moins classique qu'il n'y paraît ("Dany", 16 ans , un lycéen perturbé, a disparu : fugue, suicide, meurtre - ou enlèvement ?), menée avec obstination, et des méthodes originales, par un commandant de police qu'on a du mal quand même à imaginer dans la vie réelle (Vincent Cassel - un poil too much, entre un Quasimodo qui suinterait l'alcool et une sorte de Columbo, mais avec 20 centimètres de plus que le Californien, aux physique, vêture et posture), s'impliquant d'autant plus que son fils Denis, un ado du même âge que le disparu, lui donne du fil à retordre. L'originalité est à rechercher du côté d'un témoin (Romain Duris à la manoeuvre) pas très catholique - un écrivain raté, se muant, grâce à sa conception dévoyée de la création littéraire, en deux ex machina... On admirera aussi la complexité psychologique des personnages, en particulier chez la mère de Dany (Sandrine Kiberlain, qui domine la distribution - pourtant remarquable dans son ensemble). Et encore la description de milieu, impitoyablement réaliste, tout autant que poétiquement barrée.
Zonca est plutôt rare. Ce 4e "long" pour le grand écran ("La Vie rêvée des Anges" - son premier essai, et succès, a bientôt 20 ans) est d'une grande rudesse (et devrait être interdit aux moins de 12 ans - au lieu d'un simple "avertissement"), mais a de vraies qualités de style (bien que toujours sur le fil du rasoir - à la limite de la surcharge...).