L’un modeste comptable, simple et droit, et l’autre fils d’aristocrate disgracié par son despotique paternel, ces deux frères de tranchées de la boucherie de la 1ère Guerre, dite « Grande » par les sabreurs moustachus galonnés, décident de se réinventer une vie dans le Paris misérable d’après-Armistice. Le premier a perdu sa foi, son métier et son épouse, et l’autre, gueule cassée qui s’est fait arracher la mâchoire et le larynx, décide de ne plus jamais porter que des masques selon ses jours et ses humeurs. Prêt à exploiter son talent de dessinateur, également la boue généralisée des vautours qui s’enrichissent sans vergogne sur les cercueils et les charniers, grâce au feu de la morphine qui le maintient en vie, et la douce compagnie d’une orpheline de guerre, il mènera le trio pour s’enrichir, et prendre sa revanche sur la France et sur son père.
Rappelant le ton des Caro et Jeunet des 90’s, cette surprenante chimère, jouée, écrite et réalisée par l’excellent Albert Dupontel nous embarque dans un conte à la fois sombre et tragique, insolite et historique, drôle et abominable. Entre la brillante et pathétique quête d’un super-vilain à l’ancienne, une sorte de Fantôme de l’Opéra post-1ère Guerre, une formidable arnaque nationale en réponse à l’abominable bain de sang, au désordre, à la misère et à la corruption généralisée qui l’ont engendrée, et grâce à la schizophrénie salvatrice des amputés du corps et de la raison, s’appliquera l’extravagante revanche familiale dont dépend ce qui reste d’univers au triste héros. Il en ressortira une belle aventure pleine de douleur et d’espoir, de folies et de vertus, un hymne à la renaissance tragique des plaies vivantes et un chant poignant de tendresse et de fraternité.