Bien mais… Raaaa ! C’est rageant quand même ! Savant mélange de "The town", "Heat" et "Flic ou voyou", "Criminal squad" aurait pu être un grand film s’il ne restait pas des zones d’ombres (la principale étant comment les flics ont su devant quelle banque il fallait se mettre en planque) et si le montage n’était pas par moments si chaotique. Ce dernier point concerne principalement les flashbacks, pas forcément chronologiques, ce qui a tendance à décrocher le spectateur. En attendant, "Criminal squad" commence de la même manière que "The town", avec une présentation du contexte sous forme de tableaux tout en suivant un fourgon blindé évoluant dans une ville curieusement déserte. C’est concis et efficace, à la suite de quoi la multiplication des plans courts en changeant à chaque fois de point de vue, une note de musique lancinante et continue qui ondule lentement pour changer de ton progressivement instaurent une tension qui a vite fait de captiver l’attention (superbe trouvaille du compositeur Cliff Martinez !). Le spectateur sait qu’il va se passer quelque chose, et pas des moindres ! Il n’aura pas à attendre très longtemps que les choses se déclenchent. Le plus remarquable est qu’il va se retrouver pris au beau milieu d’une fusillade portée par une énorme bande son. Ouaouh ! Sacrée mise en bouche ! Une mise en bouche qui en met plein les oreilles, et qui va mettre la brigade des crimes majeurs sur le chemin de cette équipe de braqueurs. Dès lors s’installe peu à peu le face à face entre les deux leaders des deux corps (c'est là qu'on retrouve la notion de "Heat"). On retrouve alors au programme intimidations et défis, où arrogance règne en maître. "Criminal squad" se distingue davantage par son côté psychologique que par ses scènes d’action. C’est ce qui explique sans doute en partie la déception d’un certain nombre de spectateurs, car il est vrai que la bande-annonce laissait entrevoir davantage d’action. Il faut reconnaître que point de vue action pure, il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la dent, car les scènes d’action n’interviennent principalement qu’en début et fin de film. Mais quelles scènes d’action ! Assurément ça décoiffe, et je l’ai déjà dit, la bande son a été si soignée qu’on s’y croirait ! Ça tire de tous les côtés, les déflagrations sont puissantes, l’impact des balles parait ultra réaliste, d’autres qui fusent ponctuées (ou pas) par le bruit métallique quand elles rencontrent de la carrosserie… pousserait presque à trouver refuge sous le fauteuil. Dans tous les cas, c’est très immersif. Malgré tout, "Criminal squad" tient pendant longtemps toutes ses promesses. D’un côté nous avons Pablo Schreiber qui fait un beau braqueur ambitieux, si charismatique que son poste de chef d’équipe ne laisse aucunement la place à une remise en cause quelconque. Face à lui, Gerard Butler incarne un flic aux méthodes contestables : pas de limites, au diable les règles de l’art, la seule chose qui l’intéresse étant de boucler l’affaire dont il est chargé, quels qu’en soient les moyens. Et tant pis si l’éthique en prend un coup. Un chien fou en somme. Un trait de caractère appuyé par un look de biker genre Harley à qui il ne manque que le bandana. Un trait de caractère qui peut agacer mais qui lui sert aussi de carapace, autant dans la vie professionnelle (c’est que les flics doivent en voir, quand même…) que dans sa vie intime, tout simplement parce que perdre la face est absolument exclu. La preuve de cette carapace nous est donnée quand on le voit s’attendrir devant ses filles chéries, ou qu’a contrario il se lance dans des numéros pas possibles (scène de la signature en particulier, ou devant les fédéraux). Aussi, même si ce n’est pas le rôle que je préfère de Gerard Butler, on doit lui reconnaître une énorme implication dans son rôle. L’affrontement entre Merrimen (Pablo Schreiber) et Nick Flanagan (Gerard Butler) a tendance à mettre les autres personnages dans l’ombre. C’est notamment le cas pour les gars qui composent la brigade spéciale (Mo Mcrae dans le rôle de Gus et Kaiwi Lyman dans les traits de Tony principalement). C’est en revanche un peu moins vrai pour le gang de braqueurs. La cause en revient à la présence de gueules, à commencer par Bosco (Evan Jones) et celui qu’on verra le moins à l’écran, j’ai nommé Marcus (Marcus LaVoi). Sacré gabarit ce type-là, soi-dit en passant tout comme Enson, interprété par 50 Cent, lui qui a la lourde tâche de faire sourire le public par une savoureuse scène de famille. Et puis il y a Donnie (O’Shea Jackson Jr), pris entre deux feux mais qui a son rôle à jouer… Tout ceci a pour avantage de préserver au mieux les rebondissements, dont le principal qu’on peut cependant deviner à l’avance si on est attentif aux moindres détails. Un indice : observez bien la scène lorsque les sacs sont chargés dans la benne à ordures… Je n’en dis pas plus… Donc oui, bien que se distinguant par l’affrontement entre deux hommes et les formidables moments de tension bien soulignés par cette musique lancinante, "Criminal squad" aurait pu être un grand film, s’il n’était pas plombé par un manque de précision (un comble pour un long métrage de 140 minutes), comme par exemple le déchargement du fourgon blindé, qu’on ne voit pas. Au vu de la suite, ça peut entraîner de l’incompréhension, et il faut au moins quelques bonnes minutes après être sorti de la salle pour tout comprendre. A condition toutefois de prendre en compte les explications données par Merrimen lors de l’exposition de son projet. Sinon il est clair qu’il y a de quoi décrocher à plusieurs reprises, au point de trouver ce film horriblement long. On peut même avoir l’impression d’avoir affaire à une belle petite collection d’incohérences, ce qui peut éventuellement vous pousser vers la sortie avant l’heure. Ce serait une grave erreur, car bien des choses sont expliquées à la fin. Mais c’est en expliquant tout, que là oui ça amène une incohérence, et de taille ! Se peut-il que pour un endroit aussi bien gardé, aussi secret dans sa structure, les langues puissent se délier au cours de discussions informelles autour d’un verre ? Là, je doute fortement. Autrement dit, on a là un bon film, mais il reste tout de même une certaine insatisfaction qui dérange.