Pour faire un bon film, il faut aussi, absolument, trouver un « angle » pour raconter l'histoire. Celui choisi par Frédéric Tellier n’est pas nouveau, mais il est efficace : faire cheminer en parallèle la traque menée par la police, de 1991 à 1998, et le déroulement du procès, au début de l’année 2001. La partie policière se focalise essentiellement sur le rôle tenu par Franck Magne, surnommé Charlie, arrivé en 1991 dans un des groupes de la Police Criminelle, au 36 Quai des Orfèvres. Alors que, petit à petit, les meurtres s’accumulent sans qu’on ait la certitude qu’ils aient été commis par la même personne, Charlie et ses collègues sont confrontés à de nombreuses difficultés qui viennent handicaper l’enquête : la concurrence entre les différents groupes de la « Crim », les fausses pistes, la part du hasard, les erreurs commises par des témoins importants, les priorités qui viennent de la haute hiérarchie, le rôle parfois néfaste de la presse lorsqu’elle diffuse des informations qui auraient dû rester cachées. Très important aussi, le fait que, dans les années 90, tout ce qui concerne les recoupements d’ADN est à l’état embryonnaire. C’est d’ailleurs l’affaire du tueur de l’est parisien qui sera à l’origine de la création, en 1998, du FNAEG : Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques. De façon plus anecdotique, le film nous montre aussi l’arrivée du premier ordinateur au sein de la Brigade Criminelle. La partie procès nous permet de faire connaissance avec le tueur, Guy Georges, un homme dont son avocate peut dire que, depuis sa naissance, personne n’a joué pour lui le rôle qu’il aurait dû jouer : ni son père, ni sa mère, ni la DDASS, ni l’institution judiciaire. Pour le défendre, un couple d’avocats, Alex Ursulet et Frédérique Pons : ils ont été mariés, et Alex Ursulet a poussé Frédérique Pons à l’assister lors du procès, malgré ses réticences. Dans un tel procès, une rencontre entre police et avocats ne peut qu’être exceptionnelle. La rencontre à laquelle on assiste, entre Frédérique Pons et Charlie a-t-elle eu lieu dans la réalité ? Toujours est-il qu’elle donne lieu à un échange au cours duquel l’avocate évoque la différence qu’il y a entre leurs rôles respectifs : traquer le monstre d’un côté, traquer l’homme derrière le monstre de l’autre côté.