Grand polar. Interprétation sidérante de Adoma Niane (Guy Goerges), à la fois glaçant et limite touchant (voire le scène des aveux au procès, qui retourne complètement). Grande surprise avec Raphaël Personnaz, que je trouvais tjs insipide : il est ici assez bouleversant, engagé, ému, traqueur... Un beau rôle et une belle interprétation. Nathalie Baye toujours aussi majestueuse dans un rôle pas simple d'une avocate (femme!) qui défend l'indéfendable avec fougue et grand talent (plaidoirie dantesque et qui met le doute au début) mais c'est par elle justement que Guy Georges devra assumer la vérité et la monstruosité de ses actes, assez renversant pour une avocate de la défense. Gourmet est tjs aussi exceptionnel aussi : certains n'ont pas besoin d'en faire de trop, ils sont juste présents à chacune de leurs scènes, un regard, un sourire ou autre, leur physique en impose tout simplement.
Côté réalisation, c'est très bien fait, documenté, intelligent. Avec La French, on sent un frémissement dans le ciné français pour ce genre renouvelé. C'est un vibrant hommage aux victimes (plus jeune à l'époque, je n'avais pas réalisé le réel danger qui existait - ce film m'a glacé pour ça aussi), à la police (je n'ai pas senti que c'était une charge contre leur erreur de 1995 d'avoir relâché Guy Georges - à l'époque, l'ADN n'était pas fiché donc impossible de remonter sa piste. C'est même malheureusement ces meurtres et cette longue traque qui ont développé les fichiers internationaux des ADN et c'est même parce que la loi a été contournée pour comparer l'ADN qu'il a été retrouvé), du relais aussi par les médias (on ne peut que constater que c'était bcp plus simple et respectueux à l'époque). C'est une réal donc pêchue, puissante à certains moments puis, posée et au coeur des émotions à d'autres. On est pris aux tripes de plus en plus fort, au fur et à mesure qu'avance la conclusion, et paradoxe, même si on la connait. On hallucine que cela est pu se produire il n'y a pas si lgtps. On avait oublié presque ce monstre. C'est aussi un témoignage de l'époque : pas d'internet, de téléphones portables, les méthodes étaient autres aussi. On est glacé aussi de revoir des images de l'attentat de St Michel : quand les grandes histoires s'entrechoquent!
Le réal prend le temps aussi de montrer l'ambiance du 36 avec ses rivalités qui ont pu ralentir l'enquête. Mais ça n'est jamais un jugement. On sent toute la complexité de ces hommes et femmes qui cherchent et recherchent le moindre détails, quitte à y sacrifier leurs familles (bémol par contre sur les scènes de Personnaz en famille, un peu longues et parfois redondantes surtout qu'on ne sait rien des autres flics).
Un grand et bouleversant témoignage d'un événement dramatique, sanglant, immonde (attention aux yeux : les scènes des victimes assassinées sont complètement montrées et c'est particulièrement violent), avec une prise de recul, une analyse de tous les rouages et protagonistes. Tout est complexe y compris l'assassin, montré autrement qu'un simple fou au passé "déconstructeur". Au contraire, c'est bien argumenté et amené pour ne pas faire de raccourcis. Ca n'a pas du être évident de faire le montage et de rendre à l'ensemble cette fluidité dans le récit. Je recommande, pour l'histoire et vibrer avec les enquêteurs qui ont tout donné pour stopper cet homme, libérable en 2020 rappelons-le.