On n’est pas surpris que ce curieux film soit sorti d’abord au festival de Sundance, où l’on n’apprécie rien tant que le bizarre et le bien-pensant... En fait, le film est une illustration du principe de la soumission à l’autorité, déjà illustré par la séquence la plus marquante d’un film d’Henri Verneuil, "I comme Icare", et par une émission de télévision passée il y a quelques années sur France 2, qui avait produit un tel scandale qu’elle est restée sans suite : un volontaire, dans le cas du film, ou plusieurs, dans le cas de l’émission de télé, soumettai(en)t un individu à des chocs électriques de plus en plus intenses, parce que le maître de jeu de l’expérience "scientifique" à laquelle il(s) croyai(en)t participer leur en donnait l’ordre. S’estimant couverts par une autorité supérieure, ils obéissaient, sans savoir que la victime était en réalité un comparse, un acteur simulant la douleur qu’il était censé ressentir. Le but caché était de voir jusqu’où iraient ces véritables cobayes, apprentis tortionnaires. Lorsqu’on leur révèlait le pot-aux-roses, on les interviewait sur leurs motivations, et c’était gratiné.
Ici, la gérante d’un fast-food reçoit un coup de téléphone que lui passe un prétendu policier, lui prescrivant de fouiller l’une de ses jeunes employées, qui aurait volé une cliente. De fil en aiguille, cela va très loin, la pauvrette est déshabillée entièrement, puis laissée à la garde d’un autre employé masculin, puis à celle du fiancé de la gérante, et tous obéissent au "policier", qui est en fait un employé de banque, père de famille et... détraqué sexuel, la séquence culminant lorsqu’il ordonne au fiancé de fesser la fille pour la "punir", puis de se faire faire une fellation pour le récompenser d’avoir si bien obéi au policier ! Bien entendu, celui-ci sera démasqué lorsqu’un homme, employé du fast-food et possesseur, lui, d’un cerveau, refusera de prendre la succession de cette chaîne d’imbéciles naïfs, enverra promener ce faux policier qui lui demande "des trucs pas nets", et fera prévenir la véritable police !
L’astuce du scénario consiste à ne pas montrer le faux policier pendant la première moitié du film, donc à ne pas révéler l’imposture, laissant le spectateur comprendre par lui-même qu’il y a imposture. Le défaut du scénario, c’est qu’on peine à croire que les personnages soient bêtes à ce point et avalent tout... bien que, dans la réalité, les choses se soient passées ainsi ! En somme, le vrai peut n’être vraisemblable, un autre l’a dit avant moi. Mais passons, et ne pinayons pas.
Techniquement, presque tout le film est réduit à cette longue conversation téléphonique en temps réel et quasiment à huis-clos. Comme souvent, des cartons de début et de fin avertissent que tout cela est tiré de faits réels, mais peu importe, les États-Unis sont un pays de fous, de crédules et de barbares, où de telles choses n’étonnent plus.
La réalisation est très classique, et très fauchée, ce qui ne nuit pas en l’occurrence. On s’étonne en revanche un peu que certains passages musicaux soient joués au violoncelle. On croyait que ce genre de prétention était typique des films français ! Mais la fin, superflue, est assez plate, où la gérante, poursuivie en justice par la victime, avoue qu’elle a tout gobé. On l’avait compris...