La guerre de Tchétchénie est un conflit trouble dans l'Histoire de l'humanité qui fut très (trop) peu médiatisé au moment où il eut lieu. "The Search" se déroule pendant la Seconde Guerre qui s'opéra d'août 1999 à février 2000. Elle fut déclenché par des attentats qui survinrent un peu partout dans le Caucase et plus particulièrement par l'un d'eux, qui éclata à Moscou dans des circonstances floues, et qui fut tout de suite attribué aux indépendantistes tchétchènes déjà sur le coup des précédents attentats. Beaucoup de journalistes, enquêteurs, politiciens, agents secrets ou je ne sais quoi d'autre remirent cependant en question la signature de l'attentat, qui pour beaucoup d'entre-eux fut commis par les services-secrets russes... Selon eux, le but (probable) des russes était de faire porter le chapeau aux Tchétchènes, liguant tout leur "empire" contre ces derniers et réunissant ainsi suffisamment d'opinions et d'hommes pour anéantir ces indépendantistes "indésirables"... Bon je vais arrêter là l'Histoire et la géopolitique car je m'engouffrerai dans des débats sans fin... Mais il fallait situer et présenter un contexte difficile à comprendre et à interpréter pour quelqu'un qui n'en a pas vraiment une connaissance approfondie (mon cas jusqu'à présent). "The Search" est le genre de film qui peut gravement diviser, de par son propos et son point de vue, et de la manière dont il est traité. Il y aura toujours des gens pour dire un truc déplacé du genre "pfff encore une grosse propagande anti-russe"... Mais ces gens ont oublié un truc important, primordial même : dans cette guerre, les Russes étaient bel et bien les fautifs, les intrus, et les Tchétchènes (ou autres populations habitant le Caucase) les victimes ! Après, il est clair que c'est plus compliqué que ça, mais quand même ; vous allez pas me dire que les Russes étaient dans leur bon droit lorsqu'ils enrôlaient de force des jeunes, en faisaient des combattants, les déshumanisant au plus haut point ?! Lorsque ces mêmes jeunes - complètement déboussolés à cause d'un entraînement bestial et un bourrage de crâne pas possible - exécutaient sommairement des familles entières (femmes et enfants compris) ?! Ou rien que lorsque les forces armées russes sont entrées de force sur un territoire administratif et démocratique ?! Mais venons-en au film à présent. Michel "The Artist" Hazanavicius revient ici avec "The Search", un film de guerre ambitieux. Mais après le succès fou (tant il était improbable) de son "The Artist", il aurait pu se la jouer pépère et nous pondre un 3ème "OSS 117" ou un truc commercial de bas étage, mais non, Michel, c'est un bosseur, il a eu droit à un budget de 22 millions, alors "aussitôt dit, aussitôt fait" (enfin façon de parler hein), il réalise "The Search" un projet très (trop ?) ambitieux qui doit lui tenir à cœur... Ce "The Search" à moi aussi il me tenait à cœur parce que cette guerre méritait un gros coup de projecteur, et les Russes un gros coup de pied au cul, et puis les "OSS 117" et autres "The Artist" m'avaient pleinement convaincu qu'il existait un certain talent chez Hazanavicius. Mais lorsqu'on voit le résultat, on se dit que ce dernier aurait finalement dû prendre un peu de recul avant de s'attaquer à plus gros que lui... Parce que si la bande-annonce promettait une œuvre simple et émouvante, un film prenant et haletant, on se demande, au vu du résultat, où est passée toute la tension, la justesse, la finesse et la tendresse que véhiculait la BA ! Déjà, le film est trop long, enfin trop lent, car ce n'est pas la durée le problème mais le manque de rebondissements, d'intensité voilà c'est ça. Hazanavicius a décidé de structurer son film autour de cinq protagonistes, à savoir un jeune de 19 ans enrôlé plus ou moins de force dans l'armée russe, un petit garçon de 9 ans dont les parents ont été tués, sa grande-sœur partie à sa recherche, une chargée de mission des Nations-Unies, et une bénévole au sein de la croix rouge. Le film est donc carrément découpé, et partagé entre ces différentes histoires. Ceci n'était pas une mauvaise idée au départ, cela pouvait éviter une intrigue à sens unique, malheureusement, Hazanavicius ne sait plus où donner de la tête, il hésite trop, il hache le tout, ce qui retire à l'ensemble la moindre tension et intensité... Ce choix de faire avancer le film autour de cinq points de vues distincts était un moyen de montrer la guerre intégralement, de décrire avec le plus de fidélité et de justesse possible la situation, en plaçant la caméra au cœur des combats, des camps d'entrainement et de réfugiés, mais aussi du côté des ONG et des représentants de l'ONU pour bien montrer que l'opinion international n'avançait pas d'un pouce... Seul problème, Hazanavicius ne fait que survoler le conflit, il ne filme pas "au plus près des comédiens" comme il l'avait lui-même annoncé mais laisse carrément une distance frustrante entre les personnages et les spectateurs ! Et son montage est tellement haché (il passe d'un champ de bataille à un centre de réfugié sans transition) qu'il en devient difficile de suivre et de s'attacher aux personnages (on est trop partagé entre ces histoires diverses et variées qui s'enchainent aussi vite qu'elles se déroulent)... Ce qui est quand même aberrant pour un film de ce genre, dans lequel le spectateur est supposé être constamment bouleversé ! Ces histoires (croisées) ne passionnent pas toutes, chacun aura sa préférence ; personnellement j'ai préféré celle de l'ado enrôlé, qui est d'après moins la plus convaincante, la plus dure et la plus juste. Car n'est-ce pas dans les séquences "d'entrainement" que la violence est la plus rude ? La formation que subissaient les jeunes recrues était absolument monstrueuse : insultes, discrimination, bizutage et lynchage de la part des officiers et sous-officiers étaient d'accoutumés... Concernant le casting, je suis également moyennement convaincu... Bérénice Bejo présentée comme étant l'interprète principale, incarne un personnage manquant d'envergure et de nuances, elle joue bien, c'est indéniable, mais elle est un peu trop coincée, ce qui tient à un rôle un peu trop lisse. Je ne parlerais pas d'Annette Bening qui m'a presque laissé de marbre. Finalement, seuls l'ado et le petit garçon s'en sortent, et assez bien je dirais. Le premier a dans son jeu une maturité et un naturel proprement incroyable pour un garçon de son âge et le second a le profil type pour jouer son rôle d'ado influençable qui
découvre d'abord l'horreur de l'armée, puis l'horreur des combats, avant de sombrer dans un état de complaisance perverse et inhumaine absolument traumatisante...
Pour conclure je pourrais donc (re)dire que "The Search" est une déception, qu'il ne remplit pas entièrement le cahier des charges, mais une déception qui a tout de même le mérite de traiter d'un sujet sous-traité, justement, et d'offrir quelques scènes choc prenantes et intelligentes qu'il faudrait présenter aux populations, pour dévoiler au grand jour la violence et la stupidité de cette guerre.