Bullhead fait partie de ces claques cinématographiques qu'on rencontre que trop rarement, et qui vous marquent l'esprit comme nul autre film. Le réalisateur filme la Belgique paysanne comme personne, et propose une vision noire et décalée de cette guerre interminable entre Wallons et Flamands.
Si le scénario n'a absolument rien de passionnant, sous fond de trafic d'hormones pour faire grossir le bétail, l'essentiel est surtout ailleurs. Matthias Schoenaerts, en premier lieu, crève l'écran à chaque apparition, un charisme à couper le souffle, et son histoire personnelle est au centre des préoccupations. Si on identifie assez rapidement le caractère du personnage, monstrueux, écorché vif, sorte de bombe à retardement, on n'attend qu'une seule chose : le moment où ça va péter.
Si Bullhead est une réussite, c'est aussi parce que le cinéaste alterne habillement les genres, entre comédie et grotesque (voir les deux garagistes), drame (des vies de famille sont en jeu), et tragédie (quoiqu'il arrive, le destin est tout tracé). Sans oublier le petit brin de romance vite rattrapé par la fatalité. Un mélange tonitruant qui nous maintient scotché à l'écran, décidés à en découdre avec notre héros.
Enfin, le long métrage est d'un réalisme troublant, filmé en toute simplicité, des images épurées, des scènes sans artifice, sans effet grandiloquent. Pourtant, la mise en scène n'en reste pas moins exemplaire et parfaitement maîtrisée. La caméra, toujours plus proche de l'acteur principal, suffit amplement à nous offrir toutes les émotions imaginables. Respect.
Bref, il se dégage un sentiment général rarement vu auparavant, qui fait de Bullhead une oeuvre à part, à la fois brutale et poétique. On en viendrait presque à l'identifier au cinéma de Nicolas Winding Refn (cf : Drive), comparaison plus que flatteuse, qui montre à quel point Bullhead est envoûtant et passionnant.