J’avais pas mal d’à priori sur ce film, notamment celui de deviner d’emblée ce que ça allait être : une œuvre formatée pour plaire à un jury de festival et remporter des prix, j’avais raison…
En cela ils mettent le paquet : une histoire larmoyante qu’on ne peut critiquer sous peine de passer immédiatement pour un raciste. Oui mais désolé le pitch est loin d’être passionnant, sauf pour les américains car un analphabète qui côtoie les hommes les plus puissants du pays c’est la réussite pour eux, alors si en plus c’est une minorité visible... La mode des biopics a vécu selon moi, on creuse toujours plus loin pour trouver les sujets. Puis là c’est si moralisateur et bien-pensant que ça en devient lourd. A part ça ? Rien, un plaidoyer pour la cause des Afro-Américains à travers les âges. Pas mal certes mais vu la vitesse à laquelle on passe sur les présidents et sur les évènements ça n’accroche pas, Forrest Gump trouvait une meilleure répartition en cela. D’autant plus qu’historiquement parlant on s’arrange pas mal : Kennedy par exemple était plus opportuniste et lâche que visionnaire et adepte de la cause des minorités, il ne s’en occupait que quand c’était sans risque ou obligé. Enfin ça vogue trop sur la vague de repentir de la cause noire, comme si pour se faire pardonner on devait accorder davantage maintenant, comme une compensation, ce qui contribue à continuer de creuser les inégalités.
De plus, je trouve le casting très orienté et loin d’être bon. Si Forest est adéquat en figure modeste qui se réalise, il ne se ressemble pas selon les âges traversés, Cuba Gooding Jr se rattrape des nanars auxquels il était habitué depuis un moment, Mariah Carey fait un caméo alors qu’elle est très mise en avant (affiche, générique, son nom doit y être pour quelque chose), tout comme Lenny Kravitz méconnaissable, Terrence Howard nous fait sa spéciale bad boy et Oprah est clairement là pour sa renommée plutôt que pour son jeu (absent). Hormis ça la diction est plate tout comme le discours est vide, la musique s’oublie, le rythme est très lent notamment à cause des nombreuses longueurs et c’est prévisible jusqu’à la petite phrase du début reprise à la fin (et Obama). Je note toutefois une double histoire pas mal entre celle du père et du fils, mais du coup ça contribue à tirer l’ensemble en longueur, et du pathos plutôt évité.
C’est somme toute très académique, pas de grosses fausses notes mais pas d’attrait particulier non plus. On a l’impression qu’on a cherché une histoire exemplaire, qu’on l’a formaté pour plaire aux critiques actuelles, puis on a balancé ça comme paravent afin de se disculper de l’inaction réelle au sujet de cette cause, tout en récoltant des récompenses. Perso j’y vois plus du prosélytisme que du cinéma, mais ça semble marcher…