Il faut sauver le soldat Ryan, c'est la bascule d'un réalisateur de cinéma grand public à un cinéma plus engagé. Steven Spielberg, « The Entertainment King » (le roi du divertissement) signe avec « Saving Private Ryan » un monument du septième art, et je pèse mes mots. L'histoire prend place dans le cadre historique de la Seconde Guerre Mondiale, et plus particulièrement lors du Débarquement en Normandie le 6 juin 1944, symbole sanglant d'une guerre qui dépasse toutes les autres en termes de violences. Le Débarquement (ou Jour J, D-Day) est une étape clef de la victoire Allié. Le film commence par ces barques militaires qui tanguent et avancent lentement dans la Manche. Les soldats tremblants boivent leurs dernières gorgées d'eau, font leurs dernières prières, la boule au ventre. La brise du matin vient effleurer le visage du capitaine John H. Miller, à la tête d'une division de sept hommes. Une fois les troupes lâchées sur Omaha Beach, la plage principale du Débarquement, le déluge de balles commence et ainsi démarre la scène la plus forte (probablement) du cinéma. Les troupes subissent la mort ou la douleur, c'est avec une manière très réaliste et crue que le réalisateur montre le paroxysme de cette violence. Le rythme de la scène ralenti, les sensations sonores sont moindres et le cœur du capitaine Miller semble s'arrêter. Proche de lui, le feu, les explosions, les hommes agonisants et surtout le sang partout, qui se mêle à l'eau de la mer. Finalement, la progression sur la plage avance, au péril d'innombrables vies. Même lorsque la plage est conquise et que les américains arrivent par milliers, la violence ne s'arrête pas. Miller découvre des soldats américains tuer des prisonniers allemands désarmés. Cet acte cruel montre ce qu'engendre cette guerre sur l'Homme : la folie de la violence. Néanmoins, l'ennemi allemand reste bien souvent invisible, fuyant ou dans l'ombre des chars. Ainsi, Steven Spielberg montre constamment la déshumanisation de ce conflit, son absurdité. Peut-être le patriotisme américain est parfois trop prononcé, néanmoins le film ne fait aucune apologie et reste avant tout une aventure humaine. Chargé de retrouver un soldat du nom de Ryan, Miller et ses hommes vont vivre un voyage périlleux, sur la route symbolique de l'enseignement. En effet, tous vont apprendre une leçon lors de cette mission qui peut sembler absurde : mettre en danger la vie de sept soldats pour n'en retrouver qu'un. Cependant, c'est avant tout un prétexte de Spielberg pour nous faire vivre cette histoire : l'histoire d'un groupe, uni jusque dans ses derniers retranchements, uni par la force de la volonté et uni par la bonté que porte chacun d'entre eux malgré les difficultés. À travers le Nord de la France, le Soleil illumine régulièrement le chemin de la troupe en quête du soldat Ryan. Avec plusieurs péripéties, chaque personnage se questionne et aucun n'est alors laissé de côté par le réalisateur. Une manière de créer une vraie famille, ayant tous une philosophie, au sein d’un environnement qui leur est inconnu. La France est bien représentée même si des erreurs (parfois volontaires) viennent se glisser dans le récit. En revanche, la qualité des décors est impressionnante, à aucun moment on se sent hors du conflit mondial tant les détails sont nombreux. De plus, les visuelles caractéristiques du directeur de la photographie attitré de Spielberg, Janusz Kaminski, nous laisse dans une ambiance froide. John Williams fidèle au poste signe une bande originale somptueuse. Au final, on retrouve de l'action un peu partout dans le métrage mais la musique mélodieuse du célèbre compositeur vient par instant couper le rythme infernal subit par ces hommes. Un aspect important mais souvent oublié, le son, qui est particulièrement travaillé et réaliste. Cette ambiance sonore participe à l'immersion jusque dans chaque tir d'arme, le temps de secondes en suspens qui peuvent être les dernières pour nos héros. De plus, le film est relativement long, mais la façon dont Spielberg met en scène son histoire nous pousse à nous attacher aux personnages. Ainsi, on pense se retrouver durant tout le métrage aux côtés de la troupe du Capitaine Miller. On est plongé au cœur de l'action, caméra à l'épaule, car Spielberg sait très bien placer sa caméra pour nous immerger dans les combats. Tom Hanks est très bon, ce rôle était fait pour lui, et les personnages secondaires ne sont pas en reste, notamment Tom Sizemore qui trouve ici son meilleur personnage. Cette fresque historique est impressionnante, taillée pour être réaliste et prenante. Il faut sauver le soldat Ryan s'impose comme l'un des meilleurs films de guerre, un drame humain qui prend place dans une bataille qui marqua à jamais les mémoires, une preuve de la violence de la plus grande guerre de l'Histoire humaine.