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gimliamideselfes
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3,5
Publiée le 29 septembre 2012
Lorsqu'un dinosaure comme Resnais sort un film, c'est à chaque fois un événement. Et puis il ne se presse pas, il fait un film tous les 3 ans et c'est à chaque fois l'occasion de s’engouffrer dans univers différent de ce qui se fait d'habitude. Je pense que rien ne pouvait prévoir les herbes folles, et bien rien ne pouvait prévoir Vous n'avez encore rien vu. Le pitch restant très évasif, bien avisé était celui qui pouvait se douter de se qui pouvait se tramer dans ce film. Alors certes c'est mille fois moins bien que les herbes folles (pour ne parler que de son dernier film), mais c'est quand même vachement bien. Déjà je n'ai pas senti le temps passer. Alors que dieu sait que ce genre d'expérience pourrait devenir assez chiantes. On a donc réuni un casting assez impressionnant, casting dans lequel Amalric a bien entendu ma préférence bien que j'adore aussi Girardot, Consigny, Piccoli… Et puis voir Lambert Wilson dans un film de Resnais c'est très plaisant aussi. En fait pour que la fête soit complète il ne manque qu'André Dussolier. D'ailleurs cela m'avait fortement ennuyé au début de ne pas le voir au casting, et puis finalement on s'en tamponne grave. Je ne sais pas trop ce qu'a voulu dire ou faire Resnais avec ce film, mais néanmoins, cette volonté de raconter encore une fois l'histoire d'Eurydice m'a touché. Surtout qu'il rend hommage à Anouilh dont j'aime beaucoup le peu de pièces que j'ai lu de lui. Le film parle de pleins de choses, de l'amour, de la mort, du temps qui passe. Et le fait d'avoir réunit le couple Arditi Azéma et le couple Consigny Lambert c'est déjà quelque chose. Deux Orphée, deux Eurydice. Deux façons de l'interpréter, deux sensibilités. Et puis cette troisième version réalisée par Podalydès avec deux acteurs juvéniles qui offrent une nouvelle version. Comme quoi les thèmes de l'amour et de la mort sont universels. De plus on ne peut que saluer la mise en scène de Resnais qui ma jouer avec tout ce qu'il peut pour justement faire du cinéma, ne pas se contenter de filmer platement ses acteurs. Et puis finalement l'histoire s'enchaîne avec les différents personnages, en changeant les acteurs, mais elle se suit très bien et puis c'est captivant de voir ainsi plusieurs façons de faire. Et l'interprétation est plutôt bonne, sachant que les acteurs sont censés jouer leur propre rôle, mais en fait on ne voit qu'Orphée, qu'Eurydice, etc. Je dois souligner aussi le rôle d'Amalric qui lui va à merveille, terriblement inquiétant, tout comme celui de Girardot. On a affaire à une sorte d'expérimentation très émouvante, très belle, peut-être pas complètement aboutie, mais certaines scènes transpirent la beauté et je ne demande pas grand chose de plus.
L’ode ultime du cinéaste Alain Resnais à ses acteurs. Ce film est une curiosité qui prouve que théâtre et cinéma peuvent être en parfaite osmose. Tous les acteurs sont grandioses, avec une préférence à Pierre Arditi, Anne Consigny et Mathieu Amalric. Effectivement, nous n’avions pas encore tout vu M. Resnais !
"Dès qu'il eut franchi le pont les fantômes vinrent à sa rencontre" : cet inter-titre repris de Murnau donne le ton. Ce sera un film, mais bien autre chose aussi, un voyage (très) littéraire vers et dans des univers oniriques, par exemple. Resnais signe ici (à 90 ans !) une oeuvre magnifique, d'une grande richesse et intelligence, où mythe et théâtre se fondent et se prolongent dans un jeu complexe en miroir (« Vous n’avez encore rien vu » !). Le mythe est antique, qui donna même naissance à un culte, l'orphisme, la vision est scénique - doublement : la captation-prétexte de la bien-nommée "Compagnie de la Colombe" répétant dans un entrepôt sous la férule intrigante d’un pendule, et la fausse improvisation des 13 comédiens (jouant sous leur vrai nom – mention spéciale à Mathieu Amalric en « M.Henri ») à la poursuite de leur auteur, « Antoine d'Anthac » (Bruno Podalydès) dans une étrange demeure au coeur d'un village accroché à flanc de montagne (arrière-pays niçois ?) où les a priés à sa demande son homme de confiance et majordome « Marcellin » (Andrzej Seweryn), et même en triple, puisque les rôles d’Orphée et Eurydice sont assurés par deux couples différents d'interprètes, les 5 autres acteurs assurant leur partie en double, le texte est superbe (deux pièces d'Anouilh réunies, adaptées et scénarisées) et les décors, la musique, comme la scénographie remarquables. Ce vrai/faux « tombeau » (au sens bien sûr d’hommage, ici dramaturgique) est un régal. « Orphée » a donné quelques beaux films (avec Cocteau par exemple). Resnais livre là une « Eurydice » passionnante, enchâssée dans une réflexion générale sur la création, l’amour, la mort, le destin : enfin quelques thèmes majeurs… se payant même le luxe d’un épilogue malicieux.
Alain Resnais,90 ans et une énergie de jeune homme! Ça force le respect. Toujours sur un rythme d'un film tous les 2-3 ans,il adapte cette fois Jean Anouilh et sa pièce "Eurydice". Une histoire d'amour,de mort et d'amour après la mort. La gageure était de rendre cela suffisamment attrayant pour le public actuel. "Vous n'avez encore rien vu" est un film dans le film original et regroupant une troupe impressionnante d'habitués. Il a enchanté la critique presse et nul doute que certains ont savouré comme il se doit cet exercice de style d'un autre temps. Ma note provient du fait que je suis resté totalement hermétique et prodigieusement ennuyé à la vue de ce théâtre filmé,qui joue sur la répétition d'un même texte par des acteurs différents,et qui n'a aucune envie de moderniser ou de dynamiser le texte désuet de la pièce. Bien évidemment,les puristes diront exactement le contraire... Sabine Azema et Pierre Arditi d'un côté,Anne Consigny et Lambert Wilson de l'autre,sont ainsi Eurydice et Orphée. Resnais clame son amour du théâtre et du jeu expressif. Respectable,mais sans moi.
Alain Resnais nous annonce tout dans le titre : on va assister à une expérience cinématographique unique. Cela dit pas besoin de nous prévenir, avec le cinéaste on commence à connaître la chanson. Nous surprenant sans cesse, il nous offre ici une réinterprétation du mythe d'Eurydice doublée de superbes mises en abymes dans lesquelles se plongent avec délice une pléiade d'acteurs qui jouent tous leur propre rôle. Ainsi à la mort de leur ami metteur en scène et à la visualisation d'une captation de la pièce, les acteurs commencent à rejouer la pièce. On a donc trois Orphée et trois Eurydice, on a donc une distribution de haut vol qui nous interprète le mythe. Au début on se demande si ça va durer jusqu'à la fin de leur interprétation mais Resnais va au bout des choses quitte à parfois être un peu lourd, quitte à ce qu'on s'ennuie un peu parfois. Mais il sait surprendre dans sa mise en scène et surtout, il sait confier à ses acteurs des rôles qui leur vont à ravir. Rien que pour le texte et l'interprétation, ''Vous n'avez encore rien vu'' vaut le détour. Que ce soit pour Pierre Arditi qui compose un Orphée émouvant ou pour Sabine Azéma, à la fois un peu folle et fragile en Eurydice, que ce soit pour Mathieu Amalric qui compose un personnage intriguant ou Hippolyte Girardot qui nous joue un beau salaud, que ce soit enfin pour le plaisir de revoir Michel Piccoli et Anny Duperey ou même de voir Lambert Wilson et Anne Consigny être Orphée et Eurydice également. En plus jeunes certes mais quelle qu'en soit l'interprétation, le mythe reste intact et l'amour toujours aussi fort.
Très grand film doté d'un pouvoir artistique aussi profond et beau que ses intérêts philosophiques. Belle démonstration d'image temps mais également grand film sur l'art, qui représente celui-ci comme producteur de tolérance (que ce soit entre les âges, entre les couleurs, entre les inconnus). Incroyable métaphore sur la vie, le temps, l'art qui vient conclure la carrière d'un réalisateur inoubliable.
Ah, ces éloges, mes aïeux! Des coeurs, des étoiles comme s'il en pleuvait. Dès qu'Alain Resnais filme sur son portable son assiette de spaghettis, la profession-critique hurle au génie. En l'occurence, toutes ces couronnes ne sont elles pas du genre qu'on dépose sur le tombeau d'un vieil ami atteint d'Alzheimer, en se disant qu'on n'aura plus à en porter d'autres....
Drôle de destinée cinématographique que celle d'Alain Resnais. Devenu célèbre pour avoir réalisé un certain nombre de chefs d'oeuvre emmerdantissimes, le v'la t-y pas qui, à un âge déjà avancé, tombe amoureux d'une adorable rouquine spécialiste du boulevard. Et qui se recycle dans la comédie. On passe à A quatre pattes à Marienbad et à Kamasoutra mon amour. Avec des bonheurs divers: j'avais bien aimé, par exemple, le parti tiré de l'opérette ô combien désuette Pas sur la bouche. Mais toujours avec un esprit de système, quelque chose de faux et d'artificiel.
Aujourd'hui, c'est l'histoire d'un écrivain de théatre qui se fait passer pour mort (Denis Podalydes) afin de réunir ses anciens interprètes pour visionner la vidéo d'Eurydice de Jean Anouilh, représentée par une petite troupe de théatre. Au fil de la vidéo, les interprètes retrouvent leur ancien texte, se substituent à l'écran, la salle de projection s'ouvrant, par exemple sur le quai de gare.... [Les petits acteurs sur l'écran sont mauvais comme des cochons, est ce délibéré pour nous faire mieux apprécier les vedettes qui prennent leurs places?] C'est le coup du théatre dans le théatre, de la réalité modifiée, des trucs qui nous faisaient baver du temps de la nouvelle vague -il y a cinquante ans quoi.... C'est lourdingue et barbantissime. La toujours jolie rouquine Sabine Azéma, avec Pierre Arditi, rejouent Orphée et Eurydice, ainsi que le couple Anne Consigny et Lambert Wilson, mais eux, on voit bien qu'ils ne sont là que pour faire doublure! Les rôles secondaires étant occupés brillamment par Annie Duperey, Michel Wuillermoz, Mathieu Amalric et Michel Robin. Brillamment, mais..... là encore, dans un esprit complètement vieillot. Anouilh a t-il vieilli? Non, mais à condition..... de ne pas l'interpréter comme cela, avec des trémolos et des chichis. Film de vieux.... joué à la vieux par des vieux.
Si ce film avait été accueilli..... normalement, on aurait aimé en vanter l'originalité, par exemple. Mais, enseveli sous son catafalque de fleurs, on n'en voit plus que les défauts.
Film de vieux.... mais naturellement, vous comprendrez bien qu'il ne s'agit pas de vieux au sens de l'état civil. La vieillesse d'état civil, elle ne veut rien dire. Tiens, William Friedkin a 77 ans.... Et il vient de réaliser Killer Joe! Ahahah! Je rigole!
A 90 ans, Alain Resnais n'a rien perdu de son inventivité et de son caractère facétieux et c'est une œuvre très libre et très jeune d'esprit qu'il avait offerte au Jury du dernier Festival de Cannes. A l'heure du palmarès, ce dernier, sans démériter par ailleurs, l'avait oubliée. Il n'empêche que les spectateurs qui aiment à la fois le théâtre et le cinéma vont se retrouver totalement en phase avec ce film et beaucoup d'autres avec eux. Avec une bande d'acteurs où se mélangent habitués du cinéma de Resnais et "petits nouveaux", on a droit à une leçon de théâtre filmé qui prouve qu'il peut y avoir énormément de qualités cinématographiques dans ce genre trop souvent méprisé. On peut même assister en un rien de temps à deux façons différentes de s'approprier un rôle, l'Eurydice de Jean Anouilh étant joué en alternance par Sabine Azéma, toute en vivacité, et par Anne Consigny, toute en sensibilité. Pour terminer, un conseil : si, au cinéma, vous n'aimez que la castagne et les effets spéciaux, passez votre chemin. Sinon, allez y ! Critique complète sur www.critique-film.fr
La bande-annonce a fait son boulot : je ne concevais pas de passer octobre sans aller voir Vous n'avez encore rien vu, profondément intriguée par l'originalité de cette bande annonce qui ne dit finalement rien du tout mais est une parfaite mise en bouche. Je m'y attendais, le film est difficile à cerner. Mais il est finalement plutôt fascinant. Des comédiens de deux troupes ayant interprété Eurydice à des moments différents se retrouvent tous convoqués par leur metteur en scène, soudainement décédé. Leur mission : à visionner une version "jeune" de la pièce et donner leur avis. L'action se déroule dans un grand manoir à la froideur intriguante dont un homme à l'allure de valet se fait le guide. Ce décor très baroque et cette ambiance un peu mystique ne sont pas sans rappeler les étranges demeures de Boulevard du Crépuscule ou de Citizen Kane. Dès le début du film cette atmosphère très singulière réussit à nous emporter : l'arrivée progressive des comédiens dans le manoir, accueillis par ce valet énigmatique, l'ambiance glaciale qui se dégage du lieu, le bruit du vent... Autant de détails qui nous interpellent. Une fois qu'ils sont tous là commence la projection d'Eurydice nouvelle génération. Et au fur et à mesure que la pièce se joue sur l'écran, les comédiens des différentes époques se rappellent. Le souvenir se mêle alors à la réalité, on a comme une mise en abyme de l'imagination, de la comédie. Alain Resnais brouille tous nos repères spatio-temporels : on passe des sièges où sont assis les acteurs nostalgiques à des décors totalement déconnectés de l'intrigue initiale. Tantôt c'est les nouveaux comédiens que l'on voit interpréter la pièce, tantôt c'est la bande à Arditi, tantôt celle à Lambert Wilson. C'est au fil des souvenirs de chacun. Et cette idée d'une pièce dans le film, d'un décor imaginaire qui se met en place au fil de la pièce, d'une interprétation en canon des mêmes scènes, est réellement ludique. C'est un peu difficile à suivre quand on est très terre à terre et que l'on aime les choses cohérentes, mais si on se laisse aller à l'onirisme ambiant, on peut très vite planer. Et il est très intéressant de voir comment chaque comédien interprète un même personnage. J'allais lister ceux qui m'ont bluffée, mais ils sont tous excellents. Chacun apporte sa touche personnelle, chacun met son vécu dans sa façon d'interpréter. L'interprétation très jeune et pourtant très grave d'Anne Consigny quand elle joue Eurydice forme un beau parallèle avec l'interprétation plus mature et pourtant plus candide de Sabine Azéma. Les repères de l'âge se brouillent aussi alors. Jouent-ils avec leur vécu au moment T, ou se revoient-ils jouer quelques années plus tôt, mais avec leurs physiques d'aujourd'hui ? Le film entraine pas mal de questions, et est surtout réellement beau. On a droit à des moments de théâtre très forts également, entre toutes les Eurydice et tous les Orphée. De quoi être parcouru de frissons.
Trop de mise en abyme projette tout le monde dans l'abîme. Du théatre mal filmé dans un décors grotesque. Chaque réplique est répétée 3 fois sur le même ton par au moins 3 personnes. Il ne manque que le sous-titrage pour les mal entendants. C'est lourd, pesant et à éviter.
Alain Resnais revient (après deux films plutôt décevant) avec un film original et audacieux, autant dans le fond que dans la forme. Le réalisateur reprend la pièce de théâtre de Jean Anouilh "Eurydice" et se joue du genre avec une construction du récit qui effectue une passerelle entre théâtre et cinéma. L'idée géniale des scènes intercatives apportent un charme évident... Mais c'est bien les acteurs qui sont l'essence même du film. Des acteurs au sommet de leur art, ils offrent un magnifique panel de nuances, des performances (sauf Azéma parfois too much notamment dans les cris) sublimes. On peut se demander pourquoi le couple Azéma-Arditi prend autant le pas sur le couple "Anne Consigny-Lambert Wilson ; en effet leurs rôles et le montage auraient dû les mettre sur un même pied d'égalité. Dans la même réserve, il est dommage que l'alternance avec la pièce de la troupe perde en présence effective d ans la seconde partie du film. Un poil long peut-être (la fin ?!) mais le film est assez intriguant pour qu'on s'y accroche. A mon humble avis une partie du public risque d'être hermétique à cet exercice de style, et pourtant c'est un film unique et rare qu'il faut savoir savourer. 1h55 d'un jeu de rôle succulent.
Sublime, unique, inventif mais un peu vain! Un film lyrique et onirique, un peu comme le Orphée de Cocteau. Un film qui détruit les frontières entre le cinéma et le théâtre. On est perdu rapidement mais si on se laisse guider on est transposé dans un monde fantomatique, puissant, incroyablement beau. Entre transparences visiblement accentuées, lumières de théâtre, ton de cinéma, ambiance de surréalisme. Et un casting absolument exceptionnel bien que malheureusement mal repartie (Sabine Azéma et Pierre Arditi écrasent littéralement le reste de la distribution)... Mathieu Amalric splendide, rare, exceptionnel mais vraiment sous exploité c'est dommage. Le vrai problème du film c'est que maintenant que c'est fait ce n'est plus à faire! Une oeuvre donc unique mais onirique, intense et poétique!
Du fait de son ovation par la critique cannoise, le nouveau coup d’essai d’Alain Resnais était sûr d’attirer les cinéphiles curieux d’exercices de style surprenants. En mettant ainsi en abyme deux pièces d’Anouilh en parallèle aux formes théâtrales et cinématographiques, le réalisateur créé chez le spectateur un effet de vertige. Un vertige aussi nauséeux qu’éblouissant. Le but avoué de ce délicat exercice de jonglage artistique est bien entendu de rendre hommage aux acteurs et à leur gout du jeu. Mais cette volonté poussive qu’a le réalisateur de démontrer le talent de ses acteurs fétiches a de quoi devenir, sur le long, pénible et expansif. Ceci dit, sans l’expérience et la notoriété du casting (qui est aux films d’auteur français ce que celui d’"Expendables" était à celui des actionners anglo-saxons), cette nouvelle approche du théâtre serait bien fade.
Resnais a toujours aimé jouer avec le spectateur mais cette tendance semble s'accentuer a mesure que le cinéaste prend de l'âge. Parfois, c'est très réussi (Smoking/No Smoking), parfois pas du tout (Je t'aime, je t'aime), parfois sublime (Providence). Vous n'avez encore rien vu, assez déconcertant de prime abord, sentiment renforcé par son intemporalité, est bien de cette veine là. Il y a ce texte d'Anouilh, souvent désuet et parfois difficile à saisir, qui brouille les cartes. Le dispositif mis en place par Resnais est déroutant, risqué et agaçant et ne fonctionnerait pas sans le talent de ses acteurs et aussi leur dévotion à un metteur en scène dont on sent bien tout l'amour qu'ils lui portent. Certains d'entre eux interprètent le même rôle, le réalisateur les fait se confronter, comparaison inévitable entre des jeux très différents, le genre d'exercice qu'un comédien n'accepte pas de n'importe qui. Cette mise en abyme côtoie l'abîme, on y perd parfois son latin mais pas sa raison. Pas question de tomber dans les bras d'Orphée, ça, c'est réservé à cette insaisissable Eurydice. Le côté expérimental du film est finalement gratifiant et s'inscrit parfaitement dans la trajectoire d'un cinéaste libre qui innovera sans doute jusqu'à son dernier souffle.
Alain Resnais a 90 ans et nous sommes heureux de découvrir aujourd'hui un film qui sent bon la jeunesse. Quelque chose comme "L'année dernière à Marienbad" avec moins de solennité dans le ton mais tout autant de profondeur. Profitant de deux pièces de Jean Anouilh, Alain Resnais revisite le mythe d'Orphée et Eurydice par le biais de nombreux acteurs - et quels acteurs! - qui ont tous interprété un rôle dans la pièce "Eurydice" d'un certain Antoine d'Anthac qui les a rassemblés dans un adieu posthume. Inutile de dire qu'il s'agit de la pièce d'Anouilh, "Eurydice", mais chez Alain Resnais les pièges sont monnaie courante - et c'est bien cela qu'on aime. La mise en abyme, chère à Anouilh, devient la règle du jeu dans le film. Mais ici un même rôle est joué par deux ou trois acteurs de générations différentes. Bien sûr le film convoque des thèmes chers à Alain Resnais: la mort, l'illusion théâtrale, "l'amour à mort"... Mais il s'agit avant tout d'un hommage à tous ces acteurs et actrices que le réalisateur aime tant. Les fidèles d'abord: Pierre Arditi et Sabine Azéma, Lambert Wilson; les nouveaux venus, remarqués dans un des derniers films du maître: Mathieu Amalric, Anne Consigny, mais aussi ceux et celles qui n'ont pas eu l'heur d'entrer dans l'univers d'Alain Resnais. Et quel plaisir d'assister à une démonstration virtuose de l'art de la comédie! Arditi superbe et raffiné, Azéma excessive - c'est son péché mignon -, Consigny parfaite dans sa théâtralité, Piccoli toujours grand seigneur malgré le grand âge, Vuillermoz dont on apprécie l'humour (il lui suffit de si peu pour exprimer beaucoup) et tous ceux que l'on aime et que l'on ne peut citer tant le casting est riche et impressionnant. Un film par conséquent sur le théâtre et évidemment sur le cinéma, les deux étant liés comme on le sait.