« Waouh… », C’est ce que la plupart des gens avait dit devant District 9, le chef-d’œuvre d’un réalisateur désormais adulé, Neill Blomkamp. On attendait pour renouveler la SF avec Star Trek Into Darkness, il ne l’a pas fait. Neill Blomkamp révolutionne-t-il la SF avec Elysium ? La réponse dans quelques lignes.
Si le réalisateur profite du début du film pour placer des flashbacks de Max, notre héros, c’est en premier lieu l’idée du concept de la société divisée qu’il affiche qui frappe le plus le spectateur. Et l’acte un est ainsi une démonstration magistrale du fonctionnement de cette société : Les riches vivent sur Elysium (une station orbitale gigantesque), avec tout le confort que cela occasionne, les pauvres vivent sur la Terre, devenue bidonville, avec tout l’inconfort que cela occasionne. Ce qui frappe le spectateur, ce n’est pas l’idée elle-même de la séparation des classes, mais tout ce que le film mettra en œuvre pour la traiter et ainsi lui assurer une percussion, un impact chez le spectateur. Dès lors le moindre petit détail a un effet sur nous et c’est ce qui fit la force du film. Neill Blomkamp ne compte pas sur une interprétation symbolique pour donner corps à ses messages. Dans District 9, il ne dit pas clairement que les aliens doivent être le symbole des noirs durant l'apartheid. Ici, il impose d’ores et déjà ce qu’il veut faire comprendre, nous rattache à une idée, pas une interprétation, ce qui est malin car cela rend les vérités du film encore plus parlante et ancre directement le spectateur dans le récit. On suit alors chaque scène avec intérêt, comme si on suivait le héros à travers chaque étape de son périple et qu’on vivait son aventure. Rajoutons que le scénario est travaillé et l’histoire très bien construite, ponctuée de retournements des plus appréciables.
En héros du film, Matt Damon s’en sort très bien, torturé physiquement comme mentalement. Son interprétation et l’écriture de son rôle forment un tout original des pus dépaysant. Vient ensuite Jodie Foster, très convaincante en méchante manipulatrice. A noter également la bonne prestation d’Alice Braga, vraiment touchante dans son rôle. Mais le personnage (et la grosse surprise) du film est sans conteste celui qu’on attendait le moins. Mesdames et mes lecteurs…l’immense Sharlto Copley, tout simplement inoubliable en bad guy ultra classe. Et finalement, c’est peut-être à lui qu’on s’attache le plus. Il ne sert pas à véhiculer de messages particuliers contrairement aux autres personnages, mais il constitue un élément nécessaire à tout bon film qui se respecte, un mélange de style et de panache, qui en l’occurrence nous arrache des rires exaltés ou des instants d’admiration à chaque apparition. Il fait également plaisir de retrouver William Fichtner en personnage secondaire de luxe. Le traitement et les situations accordés aux différents personnages reflètent bien la mentalité schismatique de l’œuvre. Chacun sert à donner vie à la satire sociale qu’effectue le film.
Le film est néanmoins dopé à ‘action. Le rythme haletant garde le spectateur en joue et le fusille de séquences d’action très dynamiques. Bien aidées par de bonnes idées de mise en scène, elles apparaissent maîtrisées et sont cependant quelquefois mal filmées (shaky cam de malade et plans ultra courts), rendant l’action illisible, ce qui est fort dommage. Notre immersion est renforcée par des prises de vue sublimes soutenues par des effets spéciaux magnifiques qui n’ont pas l’air d’en être et accentuent le fort réalisme de l’histoire.
On reconnaît le style de Blomkamp, même si contrairement à chez Tim Burton, ça n’en fait pas un film stéréotypé. Il y a toujours une grande construction circulaire (ici Elysium, dans District 9, le vaisseau) le style des navettes est très proche du style de celle de District 9, il y a des bidonvilles…Mais malgré ses ressemblances, Blomkamp arrive à donner à son œuvre une réelle personnalité et à faire exister son histoire. Toutefois, il montre un travail qui aurait été perfectible. Un rallongement de dix minutes nous aurait fait nous accrocher au héros encore plus et aurait eu un bon effet sur le crescendo d’intensité, qui aurait pu donner encore plus de force au dénouement. Ses défauts sont cependant mineurs devant toute la réussite du film. On sent que le réalisateur a surtout beaucoup travaillé son concept et la manière de lui donner de la réalité. Il se dégage alors une certaine beauté artistique. Blomkamp arrive même à donner plus de puissance à des scènes dramatiques qu’à des scènes d’action, ce qui en dit long sur son potentiel et son talent.
Elysium ne révolutionne pas la SF et risquerait de décevoir ceux qui attendaient une véritable claque. Il n’en reste pas moins un des meilleurs films de l’été, un très bon moment, et une aventure exceptionnelle. Il prouve également que Neill Blomkamp, à défaut d’être parfait dans sa réalisation, reste un très grand cinéaste et une valeur sûre, un magnifique conteur d’histoire. Son film est donc bien meilleur que Transformers 3.