Considérer un remake avec condescendance en arguant que l’auteur emprunteur a fait preuve de moins de créativité est stupide. Certains remakes sont tout aussi originaux, et créatifs, que leur modèle de départ. Certains sont parfois même supérieurs. C’est le cas de « Sleepless » par rapport à « Nuit Blanche ». Le film français, l’originel, accroche de manière très dynamique pendant toute la première demi-heure. Hélas, très vite après, il s’embourbe lourdement. Il en devient tellement soporifique, que l’on désespère qu’il finisse pour abréger la souffrance que procure son l’ennuie. La cause revient à de nombreux choix, très malheureux de Frédéric Jardin. En premier lieu, celui de faire découvrir trop tôt le ripoux dans l’histoire. En second lieu, l’étirement excessif par le réalisateur de certaines scènes de bagarres, sans compter la pauvreté des dialogues, ainsi que les nombreuses incongruautés scénaristiques. Tous ces choix sont autant de balles que Jardin se tire dans le pied. S’il s’est contenté de « pomper » tous les ressorts dramatiques importants de Nuit Blanche, Baran Bo Odar a repéré astucieusement les défauts du film français, les a évités soigneusement, et s’est ingénié à ajouter de la substance là où il y avait inconsistance. Ainsi la relation du héros avec son fils, ainsi que celle avec son ex, sont plus subtilement exposées. Les bagarres sont mieux rythmées dans l’intrigue et bien mieux chorégraphiées. Les contours psychologiques des malfrats et les dialogues sont incontestablement mieux travaillés. Pour couronner le tout, le réalisateur Suisse se permet même d’ajouter, à la fin du film, une amorce laissant supposer une suite possible. A noter cependant, un point commun, entre le Suisse et le Français : leur bonne maîtrise des séries polar télévisées. En témoignent les très solides épisodes de Braquo, pour Jardin, et les excellents épisodes de Dark, pour Odar.