https://leschroniquesdecliffhanger.com/2022/10/03/blonde-critique/
Marylin est martyre, dans cette adaptation sulfureuse d’Andrew Dominik du roman éponyme de Joyce Carol Oates publié en 2000. C’est ici comme un baroque contre-biopic, qui plonge dans l’intimité bien tourmentée d’une des plus grandes icônes de tous les temps. Le cinéaste dit de son œuvre que c’est un film « exigeant« , en ajoutant « Si le public ne l’aime pas, c’est leur problème. Il n’est pas fait pour plaire à tout le monde ». Il se veut en tout cas défendre la star en filmant avec une forme d’horrifique virtuosité, ses pires souffrances.
L’antithèse d’un conte de fée, mais ici une trajectoire assez monstrueuse, ou quand strass et paillettes sont une bombe à fragmentation, quand la gloire n’est qu’une couverture qui vous laisse les pieds gelés. Avant Marilyn objet de désir et de fantasme, il y avait Norma Jean, enfant face à ces adultes inconstants, inconséquents et finalement assez inconscients, qui négligent ce qui devrait pourtant faire l’objet de la plus sacralisée des attentions, les enfants, ces anges innocents, qui ne demandent qu’amour, rêve et que l’on fait grandir de nos yeux émerveillés.
Une mise en scène à la Orson Welles, avec forcément moins de puissances métaphoriques que le maître. On y retrouve cependant des corps qui diffèrent en permanence dans le cadre, entre petitesse et démesure, fonction du propos qui est tenu et défendu. L’image ici est tel un chaos saccadé, très mobile, hyper changeante, et pas que dans les mouvements de couleurs, noirs et blancs, mais aussi ultra déstabilisante dans ses coupes et alternances mais finalement assez enivrant. Le son est tantôt hurlant, tantôt silencieusement réflexif. Formellement, Blonde est un délire très intriguant et somme toute assez fascinant. Il est aussi tourmenté que celle dont il nous peint le sombre tableau de l’intérieur. C’est aussi vertigineux que fatiguant par moment… Les délires psychanalytiques, ses confusions, ses hallucinations sont touchantes, mais aussi éreintantes.
Blonde est un monstre de 2H46. Évidemment il y a ceux qui crieront au génie, et les autres au scandale. A l’image de ce destin tragique et passionnel qui exacerbe une forme d’universalité tant il rend palpable et visible la folie du trauma et ses ravages. C’est parfois épuisant, mais c’est tout le temps bouleversant. C’est incontestablement à voir.