Un vrai film de réalisateur, dont l'atout principal réside essentiellement sur l'écriture scénaristique et la construction du film (réalisation, construction des séquences, montage).
Pour évacuer le point faible du film : on ne ressent pas la passion qui s'empare des personnages de Chanel et Stravinsky, et pourtant on ne peut pas dire que les deux acteurs principaux jouent mal. Ils sont justes et tiennent leur personnage sur la longueur, mais bizarrement les regards manquent d'intensité, et la consistance de cette passion nous reste hermétique.
En fait, les moments d'émotion nous parviennent soit grâce à la construction de séquences (celle qui amène la première scène de sexe entre les personnages avec Chanel face au portrait de son ex défunt, celle aussi qui clot le film), soit grâce au jeu de l'actrice qui joue le personnage de Katia, et qui est d'une vraie justesse émotionnelle.
Un autre point fort du film : le champ sonore exploité judicieusement: que se soit la musique, les silences ou la concision des dialogues, tout contribue à créer une atmosphère qui donne son rythme au film, rythme non trépidant, et pour autant pas ennuyeux.
On sent que le réalisateur a fait de vrais choix artistiques ; les choix esthétiques ont aussi leur consistance. Le film s'ouvre sur la représentation du "sacre du Printemps" et il se clôt sur la préparation d'une nouvelle représentation. "La ganse est bouclée", a-t-on envie de dire !
Cette séquence finale est particulièrement émouvante. Elle entremèle avec virtuosité la fin de vie des personnages chacun de leur côté, dans leur solitude, mais réunis par le souvenir commun de cette dernière représentation musicale où on va les laisser. Loin d'être grotesque, c'est une belle séquence d'émotion pour clôturer un film bien construit, correctement joué, mais où la dimension passionnelle qui unit les deux personnages principaux manque de corps. Après il y aurait certainement encore beaucoup à dire, mais autant aller le voir !