Après Une famille chinoise, l'année dernière, Une famille brésilienne, il y a peu, le nouveau film de Kiyoshi Kurosawa aurait pu s'appeler Une famille japonaise sans que l'on y trouve à redire. Tokyo sonata est un titre plus élégiaque qui ne convient que partiellement à cet extraordinaire moment de cinéma qui brise plusieurs tabous de la société japonaise : la famille (dysfonctionnelle), le travail (quand il devient chômage), l'école... Tout vole en éclat sous la caméra d'un Kurosawa inspiré, chantre habituel du cinéma fantastique, qui opère un virage à 180° au service d'un sujet social, classique en apparence, mais où les existences se délitent peu à peu, dès lors que l'épanouissement personnel ne trouve plus sa place dans l'esprit collectif de la société nippone. Le thème était déjà bien présent dans le cinéma japonais des années 50, mais la crise économique lui donne ici une résonnance nouvelle que le cinéaste exploite dans un premier temps de façon retenue. Avant une dernière demi heure étonnante, quasi irréelle (on ne se refait pas) qui annonce une conclusion empreinte d'une émotion, elle, tout à fait réelle.