Jack and Jill n’exploite pas à fond son postulat et c’est bien dommage. En se cantonnant au strict minimum, soit la juxtaposition de scènes plus ou moins drôles dont le but n’est en rien de construire une mécanique burlesque cohérente mais, au contraire, d’enchaîner le plus de sketchs possible, le film devient un fourre-tout dans lequel l’ordre des séquences importe peu : nous pourrions aisément en déplacer certaines sans que le sens n’en soit changé. Dommageable également, la réalisation de Dennis Dugan s’avère franchement laide : les mouvements de caméra sont disgracieux et surtout dépourvus de signification, l’image est trop colorée pour accueillir les nombreux et répugnants fonds verts qui la composent, le montage brise parfois le dynamisme des gags en les surdécoupant. Néanmoins, il faut reconnaître au film une inventivité en matière de grand n’importe quoi qui va crescendo : et plus c’est invraisemblable, meilleur c’est. En témoignent l’idée saugrenue d’un jet ski en pleine piscine, d’une excursion en poney disons perturbée, d’une démonstration de corde à sauter en binôme, la relation amoureuse avec Al Pacino dans son propre rôle. L’acteur se délecte de son image médiatique qu’il casse avec l’énergie d’un sale gosse : son Richard III passe un appel téléphonique alors même qu’il quittait la scène quelques jours auparavant à cause d’une sonnerie de téléphone, son Don Quichotte vient déclarer sa flamme à celle qu’il aime tant, contre vents et marées, en dépit du bon sens (du bon goût ?). Jack and Jill double tout pour mieux détruire, son esprit potache passe les sujets de société à la moulinette, à l’instar du problème mexicain traité par métaphore fécale. Alors on pourra faire la fine bouche, et l’on aura certainement raison. Pourtant, règne ici une liberté foutraque qui réjouit par instants et cultive une imprévisibilité somme toute appréciable en ces temps de formatage artistique. On rit, et c’est déjà beaucoup.