Le Chocolat est un très beau film, et cette si douce gourmandise méritait bien d’être un héros de cinéma. Ce n’est pas totalement un chef d’œuvre, mais le réalisateur nous livre une partition délicieuse, et malgré une jaquette qui fait penser à un livre de la collection Harlequin, non ce n’est pas qu’un film sentimental à l’eau de rose. D’abord le scénario est original, et même s’il pioche indéniablement de ci de là dans les contes, les livres pour enfants, les histoires populaires, de sorte que l’on a l’impression d’avoir déjà vu à peu près tous les personnages qui défilent devant nous, il ne faut pas lui enlever sa singularité. Les acteurs sont bons, Juliette Binoche est lumineuse comme à son habitude, Johnny Depp est exact quoique ce ne soit pas sa meilleure prestation, le reste du casting (prestigieux d’ailleurs) tient la barre. Doté d’une très belle photographie, le Chocolat possède aussi une excellente musique et de très jolis décors. La reconstitution de l’atmosphère du village des années 50 est plaisante, et soignée. Dynamique, enjoué, le Chocolat semblera sans doute un peu naïf, un peu « nunuche » même, mais il fait du bien. Un peu comme Cactus Jack, que j’ai déjà critiqué, c’est agréable de voir de temps en temps ce genre de film apparaitre entre deux blockbusters, deux films d’auteurs larmoyants, deux comédies régressifs, deux navets de seconde zone ou deux série B bourrines. Et après tout, si le « couillu » Jack Sparrow joue dans ce film, même une carcasse endurcie doit pouvoir regarder Le Chocolat sans perdre sa virilité. Aux critiques presses dont la plume se veut aiguisée pour se croire intellectuelle, oui il y a un peu de la comtesse de Ségur, oui il y a de l’image d’Épinal, oui Johnny Depp ne retire pas la petite culotte de Juliette Binoche, mais je ne vois, là dedans, rien de négatif pour un film tout public. Je recommande ce film pour les périodes moroses, d’autant qu’il invite à se livrer à un plaisir coupable, et franchement il est bien le seul à l’heure des recommandations et des mises en garde.