Connaissez-vous Snowpiercer ? Le film de Bong Joon-ho avec Chris Evans (Captain America) adapté de la bande-dessinée Le Transperceneige de Jacques Lob et Jean-Marc Rochette est diffusé ce soir sur Arte. Il se déroule en 2031, dans une Terre envahie par la glace. Les derniers survivants ont pris place à bord du Snowpiercer, un train gigantesque condamné à tourner autour de la Terre sans jamais s’arrêter. Dans ce microcosme futuriste de métal fendant la glace, s’est recréée une hiérarchie des classes contre laquelle une poignée d’hommes entraînés par l’un d’eux tente de lutter...
Une post-production de l'enfer...
Or, la post-production de Snowpiercer a été un enfer, comme le réalisateur coréen l'a révélé au site Vulture, car à l'époque, le distributeur du film aux États-Unis, Harvey Weinstein, voulait charcuter pas moins de 25 minutes du long métrage, soit le réduire de 126 à 101 minutes.
Des envies de coupe effectuées par le producteur désormais déchu, surnommé "Harvey aux doigts de ciseaux", qui avait d'ailleurs provoquées une vive indignation de Tilda Swinton, venue en 2013 présenter le film au Festival du film américain de Deauville.
Dans le viseur du fondateur de Miramax : les dialogues, qu'il voulait entièrement supprimer, retirant alors toute motivation aux personnages et rendant le film incohérent. Bong Joon-ho se souvenait de ses discussions avec Weinstein :
C'était une rencontre vouée à l'échec. Je suis quelqu'un qui jusqu'alors avait toujours sorti les director's cut de ses films. Je n'avais jamais réalisé un montage que je ne souhaitais pas. Le surnom de Weinstein est "Harvey aux mains d'argent" [en référence aux coupes qu'il instaure en salle de montage, NdlR] et il était très fier de son montage du film.
Bong Joon-ho se souvenait notamment d'un problème sur une scène que Weinstein voulait retirer. Dans celle-ci, Chris Evans, Jamie Bell et leurs alliés se confrontent à des combattants cagoulés et équipés d'armes blanches. Dans cette séquence, l'un des cagoulés ouvre un poisson d'un coup de hache.
"Pourquoi un poisson ? On veut de l'action !", ce à quoi Bong Joon-ho lui répond : "mon père était pêcheur, je dédie ce plan à mon père". Weinstein est touché et s'incline... Mais Bong a menti, son père n'a jamais été pêcheur ! Et voilà comment un mensonge a sauvé un plan devenu emblématique du film.
Mais "la scène du poisson" réglée, Weinstein n'a pas lâché le film pour autant, cherchant à imposer son montage. Il fut décider de tester la version du distributeur (amputée donc de 25 minutes) devant un public. La salle répondit en sortant qu'elle n'avait pas compris l'intrigue et donna de mauvaises notes au film.
Si Weinstein avait insisté pour que sa version soit gardée, Bong était prêt à enlever son nom du générique. Mais au final, le distributeur accepta de garder le montage de Bong Joon-ho mais décida de sortir le film non plus largement mais de façon plus confidentielle.
Philosophe, le réalisateur coréen concluait : "Pour Weinstein c'était peut-être une punition envers un metteur en scène qui ne veut pas l'écouter, mais de mon côté, tout le monde était content. Nous avions notre director's cut !"