Monstre sacré du cinéma, acteur populaire par excellence ayant incarné des personnages entrés depuis longtemps dans la mémoire cinéphilique des français, Jean-Paul Belmondo a tiré sa révérence à l'âge de 88 ans. "Il était très fatigué depuis quelque temps. Il s'est éteint tranquillement", a précisé à l'AFP son avocat, Me Michel Godest.
Les hommages pleuvent pour saluer la mémoire d'un immense acteur, qui joua dans près de 80 films et une trentaine de pièces de théâtres, au cours d'une exceptionnelle carrière de plus de 50 ans. Victime d'un accident vasculaire cérébral en 2001, il n'avait presque plus tourné depuis.
La Disparition du Magnifique, icône populaire
"C’est une perte énorme… C’était un confort total de tourner avec Belmondo… Les grands acteurs, c’est toujours un grand confort" a promptement réagi au micro de RTL le réalisateur Bertrand Blier, qui l'avait dirigé sur le film Les Acteurs en 1999.
"Je suis très triste mais il ne faut pas qu’on le soit, il n’aurait pas supporté qu’on soit triste. Il avait une élégance et une pudeur vis-à-vis de la souffrance qui étaient extraordinaires. Il faut qu’on continue à rigoler, qu’on continue à l’aimer" commente de son côté Michel Boujenah.
"Les gens ne meurent pas tant qu’on ne les oublie pas et c’est impossible d’oublier Jean-Paul. Jean-Paul c’est comme l’Arc de Triomphe, comme la Tour Eiffel, c’est notre Tour Eiffel à nous. Je suis évidemment inconsolable mais je refuse d’être triste".
Le fils de son éternel rival à l'écran, Anthony Delon, a exprimé sa tristesse sur Instagram. "Adieu le Magnifique. Je suis bouleversé. Un homme de grande valeur" a-t-il écrit, saluant celui qui fut récompensé en 2011 par une Palme d'honneur au Festival de Cannes pour son immense carrière.
"J'attends moi-même de mourir pour pas m'emmerder tout seul..."
Alain Delon justement, son vieux complice, s'est dit "complètement anéanti", au micro de CNews et Europe 1. "Ca fait quelques semaines qu'on y pense, et ça me fait moins mal maintenant. C'est un ami que je perds, ça faisait 60 ans qu'on se connaissait, 60 ans qu'on travaillait ensemble" a déclaré celui qui a tourné pas moins de 7 films avec Belmondo, dont l'inoubliable Borsalino.
Delon, désormais un des derniers monstres sacrés du cinéma français, a d'ailleurs ajouté ces propos bien tristes : "j'attends moi-même de mourir pour pas m'emmerder tout seul..."
La direction du Festival de Cannes, à travers Thierry Frémaux, rappelle que "sa générosité d’homme et d’acteur a inventé parmi les plus grands moments de l'histoire du cinéma" :
"Jean-Paul Belmondo, c’était la France, son cinéma, sa liberté, son avant-garde et ses grands succès populaires… [...] Belmondo c’était surtout une attitude, une assurance, une vitalité, un charisme hors du commun" a réagi dans un communiqué Dominique Boutonnat, le président du CNC.
Il ajoute : "Il a osé prendre des risques, être l’emblème à jamais de la Nouvelle Vague, la figure de l’homme moderne, autant que le roi du box-office et de la cascade à partir de L’Homme de Rio qui en a fait l’une des plus grandes légendes du cinéma français. [...] La légende demeure, entretenue par les rediffusions de ses innombrables succès, et par les révérences de ses admirateurs. Adieu Bebel, le cinéma a été Magnifique avec toi".
"Il va manquer au cinéma français dans ce qu'il a de plus grand..."
Invité sur BFM TV, le comédien Philippe Torreton était très ému. "C'était un acteur que j'admirais énormément, que j'ai eu la chance de rencontrer une fois. Il avait voulu déjeuner avec moi et le réalisateur de Présumé Coupable, qu'il avait adoré et il voulait nous le dire. Et ça a été un des grands moments de ma vie d'acteur", se souvient-il.
"C'était un héros aussi bien devant que derrière la caméra" a réagi Claude Lelouch avec qui il avait tourné le mémorable Itinéraire d'un enfant gâté, pour lequel le comédien avait obtenu le César du Meilleur acteur, qu'il n'est pourtant jamais venu récupérer.
Ainsi que Les Misérables, en 1995. "Il était dans la vie comme dans ses films", a réagi le réalisateur sur franceinfo. "Il va nous manquer et surtout, il va manquer au cinéma français dans ce qu'il a de plus grand, merveilleux et talentueux".
Vincent Cassel a publié quant à lui une photo de Belmondo sur Instagram, en la commentant d’un «Notre homme de Rio» et d’un émoji coeur brisé, hommage aussi au formidable et classique film de Philippe de Broca, un des grands succès de l'acteur.
Nicolas Bedos a partagé une photo réunissant notre Bébel national, Jean-Loup Dabadie, Michel Sardou, Guy Bedos, Michel Drucker et Jean-Dujardin. Ce dernier n'a jamais caché son admiration pour son idole, étant d'ailleurs présent lorsque l'icône du cinéma français a reçu en novembre 2019 les insignes de Grand Officier de la Légion d'honneur des mains du président Emmanuel Macron.
Jean Dujardin a logiquemenrt réagi à l'annonce du décès de son idole, avec qui il avait joué dans Un homme et son chien, en postant un message sur Instagram : "Tu vas me manquer… tu vas tellement nous manquer. Merci Jean-Paul".
Tandis que Line Renaud "pleure un ami de toujours", Claudia Cardinale, qui a joué avec lui dans La Viaccia, s'est exprimée publiquement dans un communiqué adressé à l'AFP :
"Je suis bouleversée par la disparition de Jean-Paul. Il était et restera pour moi comme pour tant d'autres l'image même de la vitalité. Il ne cessera jamais d'être en mouvement dans mon coeur et dans ma mémoire. Il est sourire et joie de vivre. Audace et simplicité. J'ai vécu auprès de lui tant de moments heureux, inoubliables. Je suis reconnaissante à la vie de l'avoir mis plusieurs fois sur mon chemin, le bon chemin. Mon affection la plus profonde va à ses proches et à ses enfants tout particulièrement. Addio Jean-Paul".
Hommages politiques
Toutes les personnalités politiques, ou presque, se sont logiquement fendues d'un hommage. On citera surtout la réaction d'Emmanuel Macron justement, qui l'avait décoré en 2019. "En lui, nous nous retrouvions tous", évoquant "un trésor national, tout en panache et en éclats de rire, le verbe haut et le corps leste, héros sublime et figure familière, infatigable casse-cou et magicien des mots".
"Jean-Paul Belmondo incarnait tout entier sa passion pour le théâtre et le cinéma. Il avait un jeu flamboyant, une présence sans égale et la rage des textes. Impossible de se lasser de ses performances éblouissantes" a écrit l'ancien ministre de la Culture, Jack Lang, dans un communiqué de presse.
Et d'ajouter : "Avec son sourire narquois et ses yeux malicieux, il nous aura fait frémir tant de fois ! Cascadeur des plateaux, vedette adorée de nos écrans, il était notre héros élégant et désinvolte préféré. Acolyte de Gabin, amant de Jean Seberg, il savait se fondre dans chacun de ses personnages. Le charisme et la gouaille de ce dragueur romantique nous subjuguaient dans toutes les situations.
Que ce soit dans des drames, des comédies, des films d'auteurs ou d'aventures, l'éloquence truculente de cet acteur incontournable nous emportait toujours dans un tourbillon d'émotions. Il était aussi le roi de l'improvisation et lorsqu'il jouait, nous restions bouche bée, comme à bout de souffle, suspendus à ses lèvres. [...]
Jean-Paul Belmondo, avec son jeu si unique et si honnête, a participé à la révolution du cinéma français. Derrière la caméra d'un certain Jean-Luc Godard, de Truffaut, et de tant d'autres, il était l'emblème iconique de ces artistes de caractère qui ont porté une nouvelle esthétique cinématographique. Bebel, le Magnifique, le titi parisien du 7ème art occupait une place à part dans nos cœurs et il y restera à tout jamais."
Même la Préfecture de Police de Paris s'est fendue d'un message célébrant l'acteur disparu. "Un grand flic de cinéma vient de s’éteindre. Héros de films à succès et roi de la cascade, Jean-Paul Belmondo avait suscité de nombreuses vocations pour le métier de policier".
Nombreux hommages outre Atlantique
Outre Atlantique, on salue l'élégante réaction d'Antonio Banderas, qui a écrit quelques mots sur Belmondo : "C'est un triste jour pour la culture. Un grand acteur et une icône du cinéma français et européen nous a quittés. Repose en paix Jean-Paul Belmondo".
Elijah Wood a de son côté posté deux photos sur son compte Twitter, soulignant la journée noire de ce lundi pour le cinéma : outre le décès de Jean-Paul Belmondo, le fabuleux acteur Michael K. Williams, inoubliable Omar Little dans The Wire, est également mort hier à l'âge de 54 ans...
Si Patricia Arquette rend hommage "à un génie et une icône de la Nouvelle Vague" sur son compte Twitter, Edgar Wright souligne tristement qu'avec la disparition de Bébel, "le cinéma ne sera plus jamais aussi cool".
Epilogue...
"En fait, je préfère mourir à la fin. Ca fait toujours un meilleur final, et puis ca évite les happy ends dont la niaiserie n'est jamais loin" écrivait Jean-Paul Belmondo dans son autobiographie, et rappelé fort justement par le quotidien Libération qui fait sa une, superbe, sur l'immense acteur que fut Belmondo.
Avec son décès, c'est tout un pan du cinéma français, immense, souvent populaire, parfois exigeant, qui disparaît avec lui. Le gouvernement ne s'y est d'ailleurs pas trompé : l'Elysée a annoncé qu'un hommage national sera rendu aux Invalides ce jeudi pour saluer la mémoire du plus Magnifique acteur du cinéma français.