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    Gossip Girl : on a vu le premier épisode du reboot événement
    Jérémie Dunand
    Jérémie Dunand
    -Chef de rubrique télé / Journaliste
    De Beverly Hills à Dawson, en passant par Buffy, Newport Beach, ou La Vie devant nous, il grandit accompagné des lycéens de Capeside ou de Sunnydale. Un goût pour les récits initiatiques qui ne l’a pas quitté depuis, alors qu’il vibre encore devant Skam France ou les rediffusions de Gossip Girl.

    Neuf ans après la fin de la série originale, "Gossip Girl" est de retour sous la forme d'un reboot centré sur une nouvelle génération de lycéens. Avant son arrivée en France sur Warner TV, on a pu voir le 1er épisode, lancé hier sur HBO Max.

    Avait-on vraiment besoin d'une nouvelle version de Gossip Girl ? C'est la question que l'on se pose depuis l'annonce en 2019 de la commande par la plateforme américaine HBO Max d'un reboot de la série culte, chapeauté par une partie de l'équipe d'origine. À savoir le scénariste Joshua Safran, qui officie ici en tant que showrunner, et les producteurs Josh Schwartz et Stephanie Savage (Newport Beach).

    Lancé ce jeudi 8 juillet aux États-Unis, et attendu dans les mois à venir en France sur Warner TV, ce Gossip Girl 2.0 voit la blogueuse anonyme refaire surface neuf ans après les événements du final de la série originale et sa disparition des radars. Afin de venir mettre à mal le règne de terreur de la nouvelle Queen Bee du lycée Constance Billard, Julien Calloway (Jordan Alexander), et de son groupe d'ami.e.s.

    Et si le premier épisode, qui pose les bases du récit et nous présente (un peu trop furtivement parfois) les nombreux personnages récurrents de cette nouvelle version, parvient assez facilement à capturer l'esprit et l'essence des aventures de Blair et de Serena, il laisse aussi l'impression quelque peu amère que rien n'a vraiment changé depuis 2012. Et que l'intérêt d'un tel reboot, qui cherche à surpasser son prédécesseur (déjà loin du chef-d'oeuvre) sans vraiment y parvenir, est quelque peu limité.

    Gossip Girl, nouvelle génération
    Gossip Girl, nouvelle génération
    Sortie : 2021-07-08 | 60 min
    Série : Gossip Girl, nouvelle génération
    Avec Jordan Alexander, Whitney Peak, Tavi Gevinson
    Presse
    2,3
    Spectateurs
    2,5
    Disponible sur MAX

    L'ombre de Serena, Blair, Chuck et les autres n'est jamais loin

    À nouveau rythmé par la voix-off de Kristen Bell - n'est-ce pas là la vraie bonne nouvelle de la série ? - le reboot de Gossip Girl nous ramène donc en plein coeur de l'Upper East Side, où la jeunesse dorée de Manhattan s'adonne visiblement toujours aux mêmes mesquineries et jeux de pouvoir imaginés depuis les marches du MET. Même si, aujourd'hui, les manigances de Jordan et de son crew sont davantages destinées à leurs professeurs qu'à leurs petits camarades.

    Autour de Jordan, influenceuse star de l'école et fille d'un géant de l'industrie musicale, gravitent Obie (Eli Brown), son petit ami richissime pour qui l'argent familial est surtout ressenti comme une culpabilité, Monet (Savannah Smith) et Luna (Zion Moreno), ses fidèles acolytes qui manquent un poil de personnalité pour l'instant, et Audrey (Emily Alyn Lind), dont le sarcasme cache difficilement qu'elle s'ennuie dans une relation monogame avec Aki (Evan Mock).

    Sans oublier Max Wolfe (Thomas Doherty), séducteur invétéré pansexuel qui ne se pose aucune limite et qui a déjà tout du cousin éloigné de Chuck Bass. Même si on ose espérer que, contrairement à lui, il ne troquera pas l'amour de sa vie contre un hôtel d'ici la fin de la série.

    L'équilibre de ce "club des sept" est cependant bien vite chamboulé par l'arrivée à Constance Billard de Zoya Lott (Whitney Peak), une adolescente de 14 ans originaire de Buffalo qui a décroché une bourse d'étude qui lui permet de rejoindre ce lycée privé de renom. Et qui n'est autre que la demi-soeur de Julien, qu'elle n'a jamais connue car leurs pères respectifs se détestent.

    Évidemment, les deux soeurs sont ravies de se rencontrer enfin et Julien semble prête à intégrer Zoya au sein de son cercle social. Un peu trop rapidement au goût de certain.e.s d'ailleurs. Mais Gossip Girl n'étant pas connue pour raconter des histoires de lycéens révisant leurs examens en parfaite harmonie, on sent rapidement venir l'affrontement entre Julien et Zoya, que les scénaristes mettent peu de temps à introniser comme étant les Blair et Serena de ce reboot. Qui vont adorer se détester au fil des épisodes et des saisons ?

    Le problème, c'est justement qu'en rapprochant ses deux héroïnes de Blair et de Serena, qu'en faisant de Monet et de Luna des quasi clones de Kati et d'Isabel, ou encore en fusionnant Dan et Nate pour donner naissance à Obie, les scénaristes de Gossip Girl version 2021 peinent à proposer quelque chose de neuf.

    Certes, ils ont la bonne idée de faire de ce reboot une sorte de "suite" dans le sens où elle fait référence aux précédents personnages et à l'historique mouvementé de la blogueuse. Certes, les héros tous très blancs et hétéros pour la plupart de la série originale laissent ici place à un casting plus divers et à davantage de fluidité dans les sexualités mises en scène. Mais cela ne suffit pas, à l'ère de la bien meilleure Generation sur HBO Max toujours, ou d'Elite qui repousse les limites du sexy, du sulfureux (et du mauvais goût) sur Netflix.

    A l'image de ses personnages, trop gentils pour le moment, ou en tout cas bien plus que ne l'étaient Blair, Jenny, ou Chuck à la "grande époque", ce reboot manque de mordant. Et si nous n'avons vu qu'un seul épisode et que nous sommes évidemment curieux de donner sa chance au produit avant de vraiment statuer sur son sort, la presse américaine, qui a pu voir quatre des douze épisodes de la première saison, n'a pas l'air bien plus emballée par les trois volets suivants.

    HBO Max

    Une série un peu trop hors du temps

    A l'image des six saisons diffusées entre 2007 et 2012 sur The CW, le reboot de Gossip Girl est heureusement plus que jamais pertinent culturellement, mêlant références à Succession et bande-son rythmée par Ariane Grande, Frank Ocean (et son "Super Rich Kids" presque trop à-propos), ou encore Billie Eilsh. Mais c'est sur le plan social que la série se prend, pour l'instant, quelque peu les pieds dans le tapis.

    En effet, en continuant de raconter le quotidien fait de paillettes, de démesure, et de soirées branchées de l'élite new-yorkaise, et en mettant encore moins en avant les disparités sociales qui existent entre ses protagonistes que dans la version d'origine (après tout, Zoya est censée être la Jenny/Dan Humphrey de la série), le reboot passe sûrement à côté de l'opportunité d'analyser pleinement notre époque.

    Car dans un pays comme les États-Unis, plus que jamais rongé par les inégalités et un racisme grandissant, on refuse de croire que la seule chose qui ait changé en neuf ans soit la domination toute-puissance des réseaux sociaux, et surtout d'Instagram, qui ont mis au placard les blogs. Et on se dit qu'une version un peu plus réaliste de Gossip Girl, avec de vrais ados d'aujourd'hui, aurait pu être amplement plus intéressante. D'autant plus que les scénaristes ont fait le choix d'ancrer la série dans une réalité post-Covid - on comprend que les lycéens font leur retour à l'école après un an de cours sur Zoom. Sans jamais rien en faire pour le moment.

    Bref, même si le but de Gossip Girl a toujours été de faire rêver le public et de nous divertir à grands coups de drames soapesques en tous genres, la vision proposée aujourd'hui par Joshua Safran paraît un peu trop "so 2007" pour pleinement fonctionner en tant que renouveau de la franchise. Car la révolution qu'on nous avait vendue n'est pas vraiment au rendez-vous.

    Et même si le premier épisode esquisse un début de commentaire sur le statut d'influenceur aujourd'hui à travers Julien, qui dit avoir "travaillé toute sa vie son image pour en arriver là", Gossip Girl 2.0 semble surtout, pour le moment en tout cas, intéressée par le regard qu'elle porte sur la série originale. À laquelle elle fait sans cesse référence, directement ou indirectement.

    Comme si elle était consciente que, malgré toute sa bonne volonté et la talent de ses comédiens, il lui manquait un atout principal : Leighton Meester, qui parvenait à rendre n'importe quel dialogue drôle et acerbe dans le peau de Blair, et qui manque cruellement au reboot.

    HBO Max

    Un "twist" audacieux qui promet de diviser

    La seule vraie réussite de ce premier épisode est à chercher du côté de la "résurrection" de Gossip Girl, dont la mission est désormais d'exposer au grand jour tous les mensonges - et non plus les secrets - de la jeunesse dorée de New York. Alors que l'identité de Gossip Girl était le mystère principal de la série originale, qui nous a tenu en haleine durant six saisons (pour finir en déception), les scénaristes ont choisi ici une toute autre approche qui risque de déstabiliser les téléspectateurs. Et de diviser les fans.

    Mais, il faut bien l'avouer, dans une optique de redynamisation de la franchise, c'est une idée plutôt brillante. En effet, le téléspectateur apprend dès ce premier épisode qui se cache derrière le compte Instagram anonyme. Un "twist" par rapport à l'original qui déplace la question de "Qui est Gossip Girl ?'" vers "A quoi sert vraiment Gossip Girl ?" et "Comment être Gossip Girl ?", avec toutes les questions morales qui en découlent.

    Mais aussi beaucoup d'humour à la clé puisqu'on imagine déjà les nombreuses situations où la, le, ou les Gossip Girl devront choisir s'ils veulent vraiment dévoiler tel ou tel secret. Et en assumer les conséquences.

    A ce niveau-là, Gossip Girl est donc bien une petite "révolution". Et ceux qui connaissent par coeur la série originale ne manqueront pas, non plus, de remarquer que cette nouvelle version donne une bien plus grande place aux professeurs de Constance Billard, puisque plusieurs d'entre eux font partie des personnages principaux de la série.

    À l'image de Kate Keller, incarnée par Tavi Gevinson. Une autre grosse différence qui promet, semble-t-il, de donner enfin une vraie importance aux adultes. Et qui annonce une guerre plutot jouissive entre les ados terribles de l'Upper East Side et leurs enseignants qui en ont marre de vivre dans la terreur.

    Reste désormais à savoir si la série saura maintenir l'intérêt de ses fans sans le mystère de l'identité de la blogueuse anonyme. Et si les épisodes suivants seront un peu plus riches en dramas et en folie. Car ce premier épisode est tout bonnement trop sage.

    Et si on ne doute pas que la présence vocale de Kristen Bell, le magnétisme de Jordan Alexander (la seule à vraiment sortir du lot pour le moment), et le triangle amoureux qui semble se dessiner entre Max, Audrey, et Aki (les deux derniers désirant en secret le premier) suffira à en rendre accros certains, les plus exigeants y verront surtout une tentative un peu ratée, et vaine, de renouveler une série qui n'était déjà à l'époque qu'un guilty pleasure souvent ridicule et problématique. Et qui a fini par devenir tout simplement irregardable dès la saison 5.

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