Adapté du roman du même nom de Victor Hugo paru pour la première fois en 1862, Les Misérables de Robert Hossein voit Jean Valjean, ancien forçat, changer d'identité pour devenir M. Madeleine. Tandis que l'Inspecteur Javert est toujours à ses trousses, il prend sous son aile la petite Cosette, martyrisée par un couple d'aubergistes, les Thénardier.
Après avoir mis en scène "Les Misérables" en spectacle musical avec un certain succès, au Palais des Sports de Paris, Robert Hossein cherche à adapter le célèbre roman de Victor Hugo sur grand écran. Planchant rapidement sur un scénario, qu'il rédige avec l'aide d'historiens, il ne voit personne d'autre que Lino Ventura pour se glisser dans la peau de Jean Valjean.
Mais le comédien refuse catégoriquement la proposition pour deux raisons principales : les rôles en costumes ne l'intéressent pas et il ne se sent pas légitime dans la peau de ce personnage déjà joué par plusieurs grandes stars (comme Jean Gabin). Le réalisateur, déçu, n'abandonne pas pour autant et revient à la charge. Lino Ventura décline à nouveau, mais de manière moins radicale :
"Il craignait, vu son admiration pour Gabin, de prendre le même rôle derrière lui. Decaux et moi, nous avons su expliquer à Lino que le sens qu'on allait donner à l'histoire, la manière dont on allait la traiter rendaient un son très différent. On mettrait davantage l'accent sur le côté mythique de Jean Valjean, l'homme de tous les courages et de tous les sacrifices."*
Ces sportifs devenus stars de cinémaToutefois, lorsque Lino Ventura explique à ses enfants qu'il a refusé le rôle, ceux-ci lui répondent qu'il serait parfait en Jean Valjean. Devant cet enthousiasme, l'acteur change d'avis et annonce à Robert Hossein la bonne nouvelle. Comblé, le metteur en scène termine le scénario, trouve les financements (sept milliards de centimes, un record pour un film français) et monte son équipe.
D'une durée de six mois, le tournage se déroule aux alentours de Sarlat en Dordogne, et se révèle difficile en raison du froid. Mais Lino Ventura ne se plaint pas : il s'investit totalement et fait de nombreuses suggestions à Robert Hossein, qui les accueille avec intérêt. Le cinéaste, bien que confronté à plusieurs problématiques liées à toute grosse production, est en admiration devant le comédien :
"Lino, c'est Jean Valjean davantage même que Lino Ventura. Un Valjean tout à fait moderne, avec sa sensibilité, sa bonté et sa profonde tristesse. Parce que Fantine meurt sans déchirement, Valjean a maintenant cet air étonné. Au-delà de sa violence de forçat en rupture de banc, il y a en lui cette naïveté et cette lumière indispensables. C'est un enfant, une âme pure."*
A sa sortie, Les Misérables connaît un grand succès critique et la prestation de Lino Ventura est particulièrement saluée. La réussite est également commerciale puisque le film réalise environ 3,8 millions d'entrées sur le sol français.
* Source : "Lino Ventura" de Gilles Durieux, Flammarion