La renaissance de Star Trek sur petit écran se déroule bien. Alors que Discovery s'apprête à passer la troisième, c'est au tour de Picard de se lancer (sur Amazon Prime Vidéo en France)... et de faire revenir Patrick Stewart, héros de The Next Generation qui s'est également illustré au cinéma jusqu'en 2002. Et c'est aux côtés de quelques-uns des nouveaux venus de ce show, plus terre-à-terre que ce que l'on imagine de la saga, que l'acteur est venu présenter cette aventure, au Comic-Con Paris puis à notre micro.
AlloCiné : Vous a-t-il fallu longtemps avant d'accepter de faire votre retour dans le rôle de Jean-Luc Picard ?
Patrick Stewart : Je n'ai pas le sentiment d'être de retour car c'est un monde différent au sein de l'univers Star Trek. Je savais que je ne voulais plus remettre le pied à bord de l'Enterprise, ni rester assis dans le fauteuil du capitaine avec le reste de l'équipage autour de moi. Je les adorais, tous autant qu'ils étaient, et j'apprends à adorer ma nouvelle équipe, mais cela a fini par devenir irresistible. J'ai poliment décliné la proposition à deux reprises, puis ils m'ont expliqué avoir écouté ce que j'avais dit sur mon envie d'avoir autant de diversité que possible pour ce qu'il reste de la dernière partie de ma carrière. Et c'est ce qu'Akiva [Goldsman], Alex [Kurtzman], Michael [Chabon] et Kirsten [Beyer] m'ont apporté. Ils ont m'ont convaincu que ça n'était pas le monde que j'avais connu pendant les douze années de The Next Generation. Chaque jour passé sur le plateau était donc une nouvelle expérience.
La série montre Picard qui est rattrapé par son passé. Est-ce aussi votre histoire avec ce personnage ?
Patrick Stewart : Je ne pense pas. Jouer m'intéresse de plus en plus en ce moment. Ça a toujours été le cas car j'ai négligé ma famille, ma vie et tout le reste pour être acteur. Mais je suis intrigué, aujourd'hui, par la façon dont une personne parvient à exprimer différemment ce qu'elle veut dire en tant qu'artiste. Et les temps que nous vivons sont intéressants, car ce qui nous apparaissait comme des certitudes concrètes a été chamboulé par bien de choses au cours des dernières années. Je parle au nom de la scène britannique, mais la diversité, le contraste, l'expérimentation et la nouveauté que l'on peut voir actuellement sont vraiment stimulants. Je suis convaincu qu'il s'agit d'une réponse au monde dans lequel nous vivons actuellement.
Les temps que nous vivons sont intéressants, car ce qui nous apparaissait comme des certitudes concrètes a été chamboulé par bien de choses au cours des dernières années.
Comment, vous les nouveaux, décririez-vous vos personnages respectifs et leur implication dans l'histoire ?
Michelle Hurd : Raffi est un personnage intéressant, et je pense que je suis amoureuse d'elle. Elle est compliquée, hantée par des décisions qu'elle a prises par le passé et avec lesquelles elle se débat encore - comme nous tous parfois. Sa relation avec Picard est compliquée. Elle a commencé à travailler avec lui après The Next Generation, et il y a eu un moment particulièrement délicat qui a créé un conflit en elle et exacerbé certains vices, comme l'alcool. Mais c'était également une hackeuse de génie, une analyste de systèmes de sécurité qui est vraiment très douée dans son travail, très intelligente. Comme beaucoup de personnes hantées par quelque chose, votre travail devient ce qui vous sauve la vie, car quand vous n'êtes pas au travail, vous êtes en lutte alors que travailler vous permet de vous focaliser sur autre chose et de rester un peu plus sain. Il se trouve qu'elle est aussi sarcastique, et plutôt délicieuse.
Santiago Cabrera : Moi je joue Chris Rios, ancien pilote de Starfleet qui se débat encore avec certains des démons qui l'ont conduit à en partir. Et c'est quand il rencontre la personnification de Starfleet, Jean-Luc Picard, et qu'il est amené à interagir avec lui qu'il est plongé dans cette histoire.
Isa Briones : J'incarne Dahj, une jeune femme d'à peine 20 ans qui vient d'être acceptée dans l'école de ses rêves et qui va lui permettre de s'adonner à sa passion. Tout va bien pour elle jusqu'à ce qu'un incident tragique se produise et qu'elle ne sache pas à qui se fier et se pose des questions sur son passé, sur ce qu'elle est. Et il se trouve que c'est du côté de Picard qu'elle trouvera les réponses.
Evan Evagora : Et moi je joue un jeune romulien [extra-terrestre originaire de Vulcain installé sur la planète Romulus, ndlr] qui s'appelle Elnor. C'est un expert au combat au corps-à-corps qui est plutôt doué lorsqu'il s'agit de se battre au sabre. Il a été elevé au sein d'une secte de guerriers.
Vous évoquiez la façon dont le monde de "Picard" est différent. Quelle est pour vous la particularité de cette série, et en quoi s'écarte-t-elle des précédentes ?
Evan Evagora : Le récit est moins épisodique.
Isa Briones : Et cela donne plus de temps pour creuser les personnages. Il y a de vrais arcs narratifs et des informations sur le passé de chacun.
Evan Evagora : Même lorsque nous sommes à Starfleet, les scènes ont été tournées différemment que dans The Next Generation.
Patrick Stewart : La structure de l'univers Star Trek, la partie que nous en connaissons du moins, a été endommagée. Et les solutions trouvées pour tenter de tout reconstruire n'ont pas marché, ou ont été malhonnêtes ou destructrices. C'est une chose que nous voyons au quotidien dans le monde actuel, et c'est l'un des éléments qui m'ont intéressé et convaincu d'y remettre un orteil. J'ai passé la dernière décennie à chercher de nouvelles façons de faire les choses, trouver comme une autre voix en tant qu'acteur, et quand ce projet est arrivé, j'ai réalisé qu'il y avait la possibilité d'expérimenter et ne pas se reposer sur le passé. Nous n'allions pas refaire ce que nous avions fait auparavant, grâce à cette nouvelle compagnie à laquelle nous devons Picard, et cela m'a apporté une toute autre motivation que celle de l'époque de The Next Generation. Ce qui rend la vie intéressante.
Michelle Hurd : Comme Patrick l'a dit, il est aussi question de diversité, ce qui colle à l'esprit original de Star Trek. Nous sommes représentées et j'aime me dire qu'en 2400, nous sommes toujours là, qu'il y a toujours des créatures multi-ethniques avec des cheveux frisés, en vie et bien portantes. Il est important de continuer à représenter des personnes qui ne le sont pas sous d'autres formes et sur d'autres plateformes. Et j'aime la façon dont, dans notre série, notre ensemble est composé de créatures imparfaites. Parfaitement imparfaites. De la même façon que certains des aspects de nos personnages représentent le public dans son ensemble : je ne pourrais, par exemple, pas dire que vous vous reconnaîtrez totalement en moi, mais quelques aspects pourraient vous parler.
Ce que j'aime, dans notre manière de raconter des histoires, c'est que c'est subtil. Vous ne réalisez pas nécessairement le côté réfléchissant de ce que vous regardez lorsque vous êtes devant. Vous êtes plutôt divertis par quelque chose d'intéressant, avec des personnes complexes, puis une épreuve, un dilemme vont résonner en vous. Tout le mérite en revient à nos scénaristes, qui ne peuvent s'empêcher de s'inspirer de ce qui se passe dans notre monde en ce moment. Ce que les gens traversent et le besoin de faire entendre leur voix sur une plateforme accessible à tant de personnes. C'est ce qui rend Picard belle et unique.
Patrick Stewart : C'est exact. Tous les personnages de The Next Generation étaient, en quelque sorte, parfaits. Et beaux. Même s'il leur arrivait des choses, ils restaient honnêtes, justes, décents. Aucun des personnages de cette série ne le sont (rires) Et ça rend l'ensemble encore plus intéressant.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Paris le 27 octobre 2019
"Star Trek Picard" est diffusée en France sur Amazon Prime Video en US+24, au rythme d'un épisode par semaine :