Attention, cet article révèle des événements de la troisième saison de Riverdale.
Les entorses à la réalité, c’est quelque chose de nécessaire dans les fictions. S’il fallait regarder une brute retranscription de la réalité, le spectacle serait le plus souvent ennuyeux. Chaque oeuvre entretient un rapport particulier avec le « réalisme ». Dans les séries adolescentes, il y a celles dont la fidélité est une volonté (Skins, 13 Reasons Why ou Skam, par exemple) et il y a les autres, plus pop (Gossip Girl) ou poétiques (Friday Night Lights, Les Grands).
Avec Riverdale, il n’a jamais fallu s’attendre à une vision naturaliste de l’adolescence américaine. Roberto Aguirre-Sacasa s’est plus investi dans une vision méta, jouant avec les genres et les allégories. C’est drôle, fun,… quand c’est bien fait. Seulement cette troisième saison a décidé de pousser l’exercice encore plus loin. Trop loin ?
Les luttes de gangs, les vigilantes, même Archie en apprenti mafieux parvenaient à garder un semblant de cohésion. C’était souvent « bigger than life ; over the top » mais la série n’avait jamais triché sur ses intentions, quitte à frôler les sorties de route. Riverdale, c’était l’adolescence selon un prisme pop et ludique. Du fantasme où l’on rejoue ses séquences cultes en mode teen. Seulement ce qui fonctionnait à peu près sur des standards équivalents (le slasher, le drame lycéen,...) devient plus problématique quand la série s’attaque aux films de prison.
Comprendre qu’un Prison Break light, ça passerait encore mais qu’une version qui mixe Oz et Fight Club, plus vraiment. Quand la série cite Carrie la saison précédente ou Breakfast Club dans celle-ci, elle est à sa place et dans ses fonctions. Mais rejouer une séquence de Gladiator (Archie doit combattre son adversaire après avoir reçu un coup de surin) dans une version teen de Fight Club, avant de refaire La grande évasion, le tout assaisonné d’une obscure version de Donjons & Dragons, c’est très confus.
La série se rend coupable de ne plus chercher à être un minimum plausible. A partir du moment où tout est permis, comment continuer à croire au récit ? Car le problème n’est pas tant de rompre avec l’idée de réalisme ou d’authenticité mais d’accumuler les séquences improbables. C’est une chose de ne pas être dupe quant au spectacle proposé, c’en est une autre de tordre toutes les conventions dramatiques. Le risque étant de s’aliéner un public désintéressé à force d’errance chaotique.
Riverdale : La machine à broyer les genresPeut-être faut-il s’accorder sur la légèreté générale de la série et ne pas y voir autre chose qu’un divertissement adolescent, qui ne se prend pas au sérieux ? Après tout, la série s’est toujours un peu amusée du ridicule. Mais le risque, c’est de finir par rire d’elle et plus avec elle. On parle de « jump the shark » pour raconter le moment où une série bascule et finit par faire n’importe quoi. Cela vient d’un épisode d’Happy Days dans lequel Fonzie saute au-dessus d’un requin en ski nautique. Avec The Great Escape (saison 3, épisode 5), Riverdale a peut-être effectué son saut, également.