Bushwick - de Cary Murnion et Jonathan Milott - Sortie le 25 août sur Netflix
Avec Dave Bautista, Brittany Snow
DE QUOI ÇA PARLE ?
En sortant du métro pour aller chez sa grand-mère avec son petit-ami, Lucy se retrouve dans les rues de Buschwick un quartier de Brooklyn, plongé dans un véritable bain de sang. Dans un contexte de séparatisme vis-à-vis de l’Union, les milices texanes envahissent New York pour en faire leur base d’opérations sur la Côte Est et s’en servir d'outil de négociations. Face à ce chaos, Lucy se réfugie dans le sous-sol de Stupe, un robuste vétéran. Ce dernier l’aide à traverser, à contrecœur, les quelques blocs de Bushwick la séparant de la maison de sa grand-mère – en supposant que celle-ci existe toujours.
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AlloCiné : Pourquoi avoir choisi de tourner Bushwick en plan-séquence ?
Cary Murnion : Nous avons tourné le film de cette façon pour rendre l’histoire plus authentique, plus réaliste. Nous faisons un voyage avec le personnage de Lucy et nous voulions que le public ressente l’action et l’émotion de la même manière qu’elle.
On se dit au départ, « oh, ça ne va pas être si compliqué, elle doit rejoindre une maison à deux pas de l’endroit où le film démarre », et puis finalement, on comprend vite les défis qu’elle va devoir relever pour survivre dans cette situation extrême. L’important pour nous était que le spectateur puisse vraiment ressentir toutes ces émotions.
Nous ne voulions pas tomber dans le film d’action hollywoodien classique avec des ralentis qui font croire que c’est trop cool de tuer des gens.
Jonathan Milott : Nous tenions aussi à retirer le glamour que peut susciter la violence au cinéma, nous ne voulions pas tomber dans le film d’action hollywoodien classique avec des ralentis qui font croire que c’est trop cool de tuer des gens. Ici, on suit nos personnages de près et on souffre avec eux quand ils se prennent une balle, qu’ils sont blessés. Cet aspect-là était très important pour nous.
Pouvez-vous nous en dire plus sur la préparation de ces séquences, j’imagine qu’elles doivent être rigoureusement chorégraphiées ?
CM : Jonathan et moi vivons à Brooklyn, là où nous avons tourné le film. Du coup, nous avons passé énormément de temps dans cette zone-là et des mois avant le tournage, nous écumions les rues pour faire des repérages, prendre des photos. Nous avons ensuite fait beaucoup de répétitions avec les acteurs et l’équipe technique. Nous mettions en place le point de départ puis le point d’arrivée et entre les deux il fallait s’assurer que l’action ne soit pas ennuyeuse et ensuite laisser vivre les acteurs dans cet environnement car ils ne sont pas des robots.
Cannes 2017 : Bushwick, un Birdman dopé à l'adrénaline, secoue la Quinzaine des réalisateursJM : Ce qui est bien également, c’est que le fait de faire des répétitions avec les acteurs permet de s’assurer que chaque étape du plan-séquence fonctionne parfaitement. Un jour, nous faisions des repérages dans un lieu que nous aimions beaucoup, c’était dans la maison d’une vieille dame qui vivait avec beaucoup de chats.
Et là, juste avant de passer la porte, Dave Bautista, le héros du film, nous dit : « Je suis allergique aux chats ». Du coup si nous n’avions pas fait de répétitions, cela aurait été un désastre de se retrouver dans cette situation pendant le tournage. Là, nous avons pu refaire des repérages et trouver un nouvel endroit.
Dave Bautista était très impliqué en amont, notamment sur le développement de l’histoire et sur son personnage.
En parlant de Dave Bautista, j’ai vu qu’il était également producteur délégué du film. Dans quelle mesure a-t-il été impliqué dans le processus de création ?
CM : En effet, Dave était très impliqué en amont, notamment sur le développement de l’histoire et sur son personnage. On le connaît surtout pour son rôle de Drax dans Les Gardiens de la Galaxie, qui est un personnage très loin de sa personnalité, tout comme son personnage dans le monde du catch, est très différent de lui. Nous souhaitions que Stupe soit donc plus proche de la personnalité de Dave, qui est vraiment quelqu’un de sensible.
C’était important pour vous d’injecter de l’humour dans ce déluge d’action ?
CM : Tout à fait, c’était indispensable car dans une situation si intense comme celle que nous avons mise en place, nous devions faire des blagues. On a appris ça via de nombreux documentaires qui montraient par exemple des soldats écrire des plaisanteries sur leurs casques. En apportant de la légèreté, on fait un meilleur travail. Cela permet aussi aux spectateurs de respirer un peu avant de repartir vers une scène dramatique.
JM : C’est une des grandes choses apportées par Dave Bautista, toutes ces blagues, notamment lors d’une scène vers la fin du film où il fait un long monologue qui nous en dit plus sur son personnage.
On voit aussi une nouvelle facette de Dave Bautista, une facette sensible et émotionnelle, on le voit notamment pleurer…
CM : Et c’était authentique ! Nous connaissions juste les bases de ce qu’il allait dire, le reste n’était pas écrit, il l’a improvisé. Il est là, assis, on le regarde, et petit à petit on voit les larmes couler. Je ne pense pas qu’il s’y attendait car il était complètement dévasté après. Il avait sorti beaucoup d’émotions et c’était très intense. Nous avons fait 3 prises et il allait de plus en plus loin à chaque fois. Il devait penser à une chose très personnelle pour arriver à atteindre une telle émotion, il ne nous a rien dit mais je pense que c’est le cas.
JM : Nous avons eu beaucoup de chance car s’il n’avait pas été capable de faire ça, nous n’aurions pas été en mesure de l’y obliger en le menaçant de le frapper car il est bien plus costaud que nous (rires).
Pensez-vous qu’un tel scénario peut vraiment se passer dans la vraie vie ?
CM : Je pense que nous n’en sommes pas loin. Nous avons commencé à réfléchir à ce film il y a 6 ou 7 ans et depuis, beaucoup de choses se sont passées comme le Brexit, les élections tendues en France et aux USA. Il y aussi tout ce qui se passe en Russie, en Ukraine… Tout cela nous amène à penser que ce scénario est possible.
Quand la vie des gens est menacée à un tel point, ils finissent fatalement par riposter et les choses peuvent très vite prendre une grande ampleur. Cela montre que si on ne se met pas autour d’une table pour discuter, cela peut très vite dégénérer.
JM : En tant qu’américains, nous avons été très surpris par l’élection de Donald Trump, il y a eu beaucoup de haine, pas mal de clashs. Du coup on a l’impression que si le Président continue à faire des choses qui énervent le peuple et met le pays à cran, qui sait ce qui se passer ?
CM : C’était aussi le cas en France pour vos élections, les gens se battaient de manière assez violente verbalement et on pouvait ressentir ce bouillonnement intérieur. Nous verrons bien comment ça se passe d’ici quelques années.
Bushwick, au-delà du film d’action, est donc aussi un film très politique…
CM : Tout à fait, nous réfléchissions d’abord à des idées sur l’éventualité que les USA envahissent un autre pays. Mais nous souhaitions finalement faire un film d’action qui soit fun et qui puissent contenir certaines idées politiques compatibles avec du divertissement. Il fallait aussi inclure les personnages de Dave et Brittany Snow dans cette équation, qu’ils prennent du plaisir à les incarner tout en faisant passer des messages en filigrane.
Pour nous, le plus important, c’est que le plus de personnes possible voient le film.
Que pensez-vous de la polémique sur Netflix soulevée par Pedro Almodovar au début du Festival de Cannes ? (Bushwick est produit par Netflix).
CM : Pour nous, le plus important, c’est que le plus de personnes possible voient le film. Netflix permet cela. C’est primordial, notamment pour les films indépendants comme le nôtre. Nous n’avons pas le budget d’un Fast & Furious par exemple, qui passerait dans de nombreux cinémas. Si le film était sorti au cinéma, cela aurait été uniquement dans un petit parc de salles.
Netflix permet donc à de nombreux spectateurs de voir ce genre de films et en ce qui nous concerne, c’est réellement ce qui compte le plus.
Pouvez-vous nous dire un mot sur votre prochain projet ?
CM : Tout à fait, nous développons actuellement un film de monstres. Nous travaillons aussi sur un projet de film de braquage qui se déroulerait à Los Angeles. Nous aimerions également réaliser un film d’espionnage.
Du coup, comment travaillez-vous ensemble ?
CM : Jonathan et moi nous connaissons depuis plus de 20 ans, nous sommes comme des frères. Nous pouvons donc nous dire les choses de manière très franche et honnête. Nous discutons beaucoup, nous faisons un gros travail de préparation ensemble pour être sûrs que nous sommes sur la même longueur d’ondes.
Au moment du tournage, nous prenons les commandes chacun à notre tour selon les scènes que nous devons tourner. Il n’y a pas une personne qui travaille avec les acteurs et l’autre avec la caméra, nous collaborons sur tous les aspects du film.
JM : Comme des frères, nous pouvons nous disputer, ne pas être d’accord, avoir des débats passionnés mais au final, nous mettons tout en œuvre pour faire le meilleur film possible.
Des films comme Logan ou Deadpool nous ont beaucoup plu, nous préférons quand un cinéaste s’empare d’un super-héros pour le subvertir.
En voyant Bushwick et son déluge d’action, des producteurs pourraient vous appeler pour mettre en scène un film de super-héros…
(rires) CM : Des films comme Logan ou Deadpool nous ont beaucoup plu, nous préférons quand un cinéaste s’empare d’un super-héros pour le subvertir et se l'approprier. C’est très excitant de procéder comme cela et ces 2 films représentent ce que nous aimerions vraiment faire si nous faisions un film de ce genre.