Avez-vous déjà vu Jean Gabin en entraîneur de boxe façon Mickey dans les films sur Rocky Balboa ? Ça existe dans le film méconnu intitulé L'Air de Paris.
Dans L'Air de Paris, un titre peu vendeur pour un film de boxe, Gabin incarne Victor le Garrec, ancien boxeur devenu entraîneur et ayant l'espoir d'un jour découvrir un jeune talent dont il fera un champion. Lorsqu'il rencontre André Ménard (Roland Lesaffre), un cheminot présentant des dispositions pour le "noble art", il décide de lui apprendre tout ce qu'il sait.
Un succès en salle (de cinéma)
Après avoir tourné avec lui Le Quai des brumes puis Le Jour se lève à la fin des années 1930, Jean Gabin retrouvait le réalisateur Marcel Carné avec La Marie du port, l'un de ses premiers succès d'après-guerre. Quatre ans plus tard, le duo se retrouve pour L'Air de Paris, qui dépassera les 2 millions d'entrées en France.
Le scénario est un brin éculé : l'entraîneur de boxe trop passionné qui délaisse son entourage (ici sa femme Blanche, jouée par Arletty) et un jeune "poulain" distrait de son entraînement par une histoire d'amour, mais il y a heureusement d'autres choses.
Victor et André : un peu plus que des amis ?
Carné filme les scènes de boxe de façon extrêmement dynamique, en optant pour une caméra complètement immobile lors des scènes romantiques, accentuant la distraction qu'elles représentent pour le sportif. On note aussi un rapprochement homosexuel sous-jacent - comme il y en a parfois dans le cinéma de Carné, lui-même homosexuel - entre Victor et André. Le délaissement de Blanche (superbe Arletty) par Victor ne lui donnant que plus de force.
Mais n'en disons pas trop, et laissons le mot de la fin au film avec un extrait d'un dialogue marquant de Gabin :
"Avant toi, le gars qui m'aurait fallu m'était jamais passé dans les pattes. Puis t'es venu. Au moment où j'étais prêt à tout plaquer. (...) Et j'ai vu tout de suite ce que tu pouvais devenir, ce que moi j'avais rêvé d'être. Et j'ai tout misé sur toi. Grâce à moi t'allais devenir quelqu'un et grâce à toi, j'allais réussir quelque chose (...)".
En 1954, le Festival du film de Venise lui remettra la coupe Volpi du Meilleur acteur pour, à égalité, L'air de Paris et Touchez pas au grisbi.