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    Le Consentement : le phénomène TikTok commenté par sa réalisatrice
    Maximilien Pierrette
    Journaliste cinéma - Tombé dans le cinéma quand il était petit, et devenu accro aux séries, fait ses propres cascades et navigue entre époques et genres, de la SF à la comédie (musicale ou non) en passant par le fantastique et l’animation. Il décortique aussi l’actu geek et héroïque dans FanZone.

    Le Consentement" a vu sa fréquentation grimper de 40% pendant sa deuxième semaine d'exploitation. Un phénomène qui serait expliqué notamment par le réseau social TikTok, sur lequel la réalisatrice Vanessa Filho revient avec nous.

    Sorti le 11 octobre dans nos salles, Le Consentement connait un rebond de fréquentation inattendu. "59 266 entrées pour sa première semaine d'exploitation. 82 582 pendant la seconde. Soit une hausse de fréquentation de 39% entre le 18 et le 24 octobre, alors que des mastodontes tels que Une année difficile et Killers of the Flower Moon venaient d'arriver dans les salles.

    Rares sont les films à avoir réalisé une performance aussi impressionnante que celle du Consentement, dont la hausse serait en grande partie dûe à une tendance sur TikTok, où les vidéos liés au film adapté du livre de Vanessa Springora ont été vues plus de 20 millions de fois.

    Le Consentement
    Le Consentement
    Sortie : 11 octobre 2023 | 1h 58min
    De Vanessa Filho
    Avec Jean-Paul Rouve, Kim Higelin, Laetitia Casta
    Presse
    3,0
    Spectateurs
    3,6
    louer ou acheter

    Avec plus de 160 000 entrées en salles à ce jour, Le Consentement a déjà fait mieux que les 107 437 de Gueule d'ange, premier long métrage de sa réalisatrice Vanessa Filho. Qui revient avec nous sur ce phénomène qui entoure son film, où il est question de la relation d'emprise entre Vanessa Springora et l'écrivain Gabriel Mazneff, alors qu'elle n'était âgée que de 14 ans.

    AlloCiné : Comment avez-vous découvert cette hausse de la fréquentation et pris conscience du phénomène ? Suiviez-vous le parcours de votre film au box-office avant cela ?

    Vanessa Filho : Je suivais un peu les chiffres, mais avec distance, parce que le film appartient au public maintenant. On ne peut jamais présager de ce qu’il va se passer. On porte un film pendant des années, on se bat parce que c’est important, on espère toujours le partager avec le plus grand nombre, mais rien n’est certain.

    Et puis progressivement, nous avons réalisé que les entrées se maintenaient, doucement, ce qui signifiait qu’il y avait eu un bouche à oreille. Que certains avaient dû convaincre les personnes qui avaient eu peur d’aller voir un film sur ce sujet dans un premier temps. Et cela m’a déjà touchée au cœur.

    Et puis, il y a une semaine, ma productrice Carole Lambert m’a appelée pour me dire que sa fille, qui est lycéenne, lui avait montré des vidéos, des témoignages sur TikTok : des adolescentes, et des adolescents aussi, qui se filmaient avant et après le visionnage du film, qui s’impliquaient. C’était tellement émouvant ! J’ai repensé à tous ces mails que j’avais reçus au début du casting de la part de jeunes filles qui m’écrivaient pour se livrer sur l’impact que le livre de Vanessa Springora avait eu dans leur vie.

    Les exploitants des salles de cinéma avec lesquels j’ai parlé m’ont dit que cela faisait longtemps qu’ils n’avaient pas vu autant d’adolescents présents pour un film de ce genre

    Cet engouement dans les salles se ressent également sur TikTok, où les publications liées au "Consentement" cumulent à ce jour plus de 20 millions de vues. Avez-vous regardé certaines des vidéos ? Qu’est-ce qui vous a particulièrement marqué dans ce qui en ressort ?

    Oui, bien sûr, j’ai regardé ! J’étais si émue de ressentir à quel point la jeunesse était concernée et touchée par l’histoire de Vanessa. Je voulais aussi, dans ce film, parler de l’adolescence, de cet âge crucial et charnière, pour parler d’eux. Voir tous ces adolescentes et adolescents s’emparer du film, c’est merveilleux !

    J’ai même vu des messages accompagnant des vidéos postées où certains qui ne se connaissent pas se donnent des rendez-vous pour aller le voir ensemble. On a fait ce film pour dénoncer les abus sexuels, les abus de pouvoir qui prédominent encore dans notre société. Pour prévenir aussi. Ce sont eux qui feront bouger les lignes et détermineront un avenir autre.

    Jean-Paul Rouve, Carole Lambert, Vanessa Springora, Kim Higelin, Vanessa Filho, Elodie Bouchez, Marc Missonnier Marc Ausset Lacroix / Bestimage
    Jean-Paul Rouve, Carole Lambert, Vanessa Springora, Kim Higelin, Vanessa Filho, Elodie Bouchez, Marc Missonnier

    Avez-vous pu échanger avec certaines des personnes ayant posté ces vidéos, ou avec des spectateurs ?

    Je reviens d’une tournée en province pendant laquelle j’ai pu présenter le film et débattre avec le public. J’étais parfois accompagnée de Kim Higelin et de Vanessa Springora. Nous étions toutes les trois au Festival du Film Féministe aux Lilas. Les échanges étaient extrêmement forts.

    J’ai rencontré beaucoup de victimes d’abus sexuels pour lesquelles le film était nécessaire, tout comme la représentation de la sexualité et de toute la violence inhérente à cette histoire. Parce que pour elles, il fallait ne pas édulcorer la cruauté de ce qu’elles avaient vécu, cette cruauté même qui avait détruit leurs vies, et les avait enferrées dans le silence pendant tant d’années.

    J’ai notamment remarqué que, lorsque des adultes questionnaient la violence de certaines images, des adolescents dans la salle prenaient le micro pour dire que, de leur côté, ce n’était pas ce qui les avait le plus choqués, car ils avaient surtout été sensibles à la violence psychologique de l’emprise, des mots, à la souffrance du personnage.

    Cela m’a rappelé notre premier échange avec Kim après le casting. Elle avait vingt ans à ce moment-là. Nous avions parlé ensemble des scènes intimes et sexuelles décrites dans le scénario. Elle m’avait dit que ce qui lui faisait le plus peur à jouer n’était pas cela, que c’était plutôt la violence psychologique de cette histoire, la manipulation, et la violence du quotidien.

    Le succès du film se manifeste notamment lors des séances du soir. Est-il prévu d’aller échanger avec le public à l’issue de certaines de ces séances ? Pour comprendre la raison de ce phénomène ou dialoguer avec eux sur les sujets du film ?

    J’aimerais vraiment continuer à accompagner le film, oui. Continuer à dialoguer avec le public. Ce sont, à chaque fois, des moments privilégiés d’échange et de parole libérée. Ce sont des vraies rencontres. J’ai échangé avec des spectatrices et spectateurs de tous les âges. Au fil des présentations, je remarquais de plus en plus de jeunes filles dans la salle, et puis de plus en plus d’adolescents qui les accompagnaient.

    Et lors des débats, ils prenaient de plus en plus la parole pour exprimer leurs émotions et donner leur avis. Les exploitants des salles de cinéma avec lesquels j’ai parlé m’ont dit que cela faisait longtemps qu’ils n’avaient pas vu autant d’adolescents présents pour un film de ce genre.

    On a fait ce film pour dénoncer les abus sexuels, les abus de pouvoir qui prédominent encore dans notre société. Pour prévenir aussi

    Savez-vous si le succès du film a un impact sur les ventes du livre de Vanessa Springora ?

    Je ne sais pas mais, ce qui est certain, c’est qu’après chaque rencontre avec le public, beaucoup parmi ceux qui n’avaient pas encore lu le livre m’ont confié leur désir de le lire sans attendre !

    Aviez-vous un objectif en termes d’entrées au moment de la sortie du film ? A-t-il été revu à la hausse dernièrement ?

    Aujourd’hui, je répondrai que je suis heureuse de partager, que ce film qui avait pour intention de prolonger le combat initié par Vanessa Springora continue d’exister, qu’il puisse encourager la parole à se libérer, et faire œuvre de prévention.

    Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Paris le 27 octobre 2023

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