En janvier 2020, "Le Consentement" sortait en librairie. Son autrice Vanessa Springora y racontait sa relation d'emprise avec l'écrivain Gabriel Matzneff, âgé de 50 ans quand elle n'en avait que 14. Dans un contexte de libération de la parole et alors que les César s'apprêtaient à vivre l'une de leurs cérémonies les plus chaotiques avec le prix du Meilleur Réalisateur remis à Roman Polanski, provoquant le départ d'Adèle Haenel et Céline Sciamma, le récit avait fait beaucoup de bruit.
Un peu plus de trois ans après, les mots de Vanessa Springora sont devenus des images. Grâce à la scénariste et réalisatrice Vanessa Filho, à qui l'on doit Gueule d'ange. Très intéressée par le sujet de la protection des mineurs, auquel elle aurait pu se consacrer si elle n'avait pas fait du cinéma, elle s'empare de cette histoire très difficile, portée par Jean-Paul Rouve et Kim Higelin.
Sorti ce mercredi 11 octobre dans nos salles, le long métrage a-t-il convaincu ses premiers spectateurs ? Alors qu'il obtient une moyenne de 3 sur 5 du côté de la presse, il monte à 3,4 du côté du public, grâce aux 69 personnes qui l'ont noté à ce jour.* Et la grande majorité des critiques postées sur AlloCiné est positive.
Avec des mots qui reviennent régulièrement : "choquant", "intense", "glaçant". Voire "suffocant", terme employé par Maklbab : "Prenant de bout en bout. Interprétation magistrale. Une atmosphère suffocante autour d'une emprise qui ne peut laisser personne indifférent. A voir absolument."
Un avis auquel celui de Jean-Pierre Jumez fait écho : "Un film d'horreur à la mécanique implacable. On sort terrifié par les dégâts que crée un monstre tour à tour charmeur et absolument terrifiant, incroyablement incarné. Parler de détails de réalisation serait hors de propos."
"La réelle prouesse de ce film, en plus d'être une bonne adaptation, c'est de parvenir, à travers l'image, à bouleverser les consciences et à choquer les esprits : oui, les violences faites aux enfants sont sous estimées. Oui, cela a été longtemps cautionné par une société ayant perdu ses repères moraux. Oui, ces violences perdurent et les victimes sont marquées au fer rouge, pour le restant de leurs jours", dit, de son côté, Baba S, tout en regrettant quelques longueurs.
Et en saluant l'interprétation de Jean-Paul Rouve, qui revient quasi-systématiquement dans les points forts du film parmi les critiques positives : "dans les meilleurs rôles de l'année 2023" pour lecinema_clem, "absolument glaçant" selon Paul-François Schaetz, "exceptionnel" pour Jeanne G. tandis que Paul C et Lydiabeetlejuice soulignent à quel point l'acteur est "méconnaissable" avec le crâne rasé.
Jean-Paul Rouve "exceptionnel" ou "en porte-à-faux" ?
Malgré ce contre-emploi surprenant, l'acteur ne fait pourtant pas l'unanimité. Notamment chez Jamon-de-Balona, qui apprécie la retranscription de l'emprise amoureuse et conclut ainsi : "Cela reste un bon film, même si je n'ai pas apprécié le jeu de Jean-Paul Rouve." Pour Laureleanne, sa prestation est "en porte-à-faux", alors que Tchitcha pointe un paradoxe du doigt.
"Rouve nous livre une performance incroyable mais elle est ratée car il a choisi d'incarner le mal absolu, un personnage si caricatural qu'il semble plus inspiré des comics ou des thrillers que de la réalité", peut-on lire dans sa critique qui précise que le film n'est pas à la hauteur du livre "qui, lui, est exceptionnel". "Peut-être aurait-il dû rencontrer de vrais pédocriminels plutôt que de singer Hannibal Lecter. Il faut un minimum d'humanisation pour être crédible. Sans disculper pour autant."
Mais son avis se conclut sur l'importance que revêt le long métrage vis-à-vis des victimes de pédophilie. Et c'est peut-être sur ce point que les critiques, positives comme négatives, se rejoignent. Paul C parle ainsi de "claque nécessaire" tandis que JuLa considère Le Consentement comme "essentiel". "Il est nécessaire de voir ce film résolument actuel", affirme de son côté Jade.
Donner une place au cinéma à des sujets tels que celui-ci relève d'une force incontestable et surtout est d'une nécessité primordiale
Si le résultat ne "laisse pas indifférent" (Malkbab), à cause notamment des choses que l'on peut montrer ou non et sur lesquelles s'interroge Baba S tout en incitant à "à regarder pour ne jamais oublier", le bien-fondé de l'entreprise ne fait pas débat. Et Romy Deal rappelle à quel point cette adaptation était périlleuse, mais néanmoins courageuse et importante.
"Merci Vanessa Filho d'avoir su mettre en image et ainsi donner de manière adroite et brillante du volume au texte important de Vanessa Springora", lit-on dans sa critique. "Donner une place au cinéma à des sujets tels que celui-ci relève d'une force incontestable et surtout est d'une nécessité primordiale. Alors merci."
Le Consentement est à voir au cinéma depuis le 11 octobre. Et à lire avant ou après.
* Moyenne relevée le jeudi 12 octobre à partir des notes et critiques visibles sur AlloCiné