Saison 1 : « OVNI(s) », série télévisée comique française imaginée par Clémence Dargent et Martin Douaire, réalisée par Antony Cordier porte miraculeusement son nom. Il s’agit bien en effet d’un véritable « OVNI » s’élevant dans le ciel assombri depuis plusieurs décennies du cinéma comique français. Replonger le téléspectateur dans cette décennie des seventies, réputée comme bénie des dieux par ceux qui l’ont connue est forcément intrigant pour ceux nés trop tard à force d’en avoir les oreilles rebattues. L’aborder par le prisme de la musique rock ou de la libération des mœurs a déjà été fait et paraissait de toute façon offrir une voie trop balisée. En cette période où la conquête spatiale est un peu au point mort, l’idée d’aller poser ses valises sur une autre planète en tenterait certainement beaucoup, affligés par ce qu’il est en train d’advenir à notre malheureuse Terre ainsi qu’à ses habitants. Les OVNI(s) chers à Jean-Claude Bourret qui était un présentateur vedette à l’époque, constituaient donc une formidable occasion de fédérer moult générations derrière une série qui saurait concocter un savant mélange entre reconstitution historique crédible, dérision taquine et gentille moquerie sur un phénomène qui quoiqu’on en dise, prête encore à sourire. Tous les ingrédients ont été collectés par les scénaristes qui sont même allés chercher le jeune Steven Spielberg débarquant au CNES pour y trouver l’idée d’une suite à « Rencontre du troisième type » (1977) et qui après avoir rencontré la bande d’allumés du GEPAN (Groupe d’Etudes de Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés, cellule du CNES active de 1977 à 1988), en repartira avec l’idée d’« E.T » pointant son doigt vers le ciel en implorant : « Rentrer Maison ». L’ensemble patiemment et onctueusement mélangé avec une touche assez marquée de poésie a été confié à un casting parfaitement choisi pour seconder un Melvil Poupaud en état de grâce qui démontre encore un peu plus ici l’étendue de son talent qui lui fait désormais embrasser toute la gamme des émotions à l’image des Noiret, Rochefort, Marielle et Serrault mais aussi de Michael Caine, grand acteur anglais dont il a hérité d’une part du charisme, n’hésitant jamais à se mettre minable pour mieux retomber sur ses pattes. Daphné Patakia, Quentin Dolmaire et Michel Vuillermoz constituent l’équipe du GEPAN que Didier Mathure (Melvil Poupaud), scientifique de renom rejoint comme un passage au purgatoire avant de pouvoir rebondir après que la fusée Cristal dont il était le concepteur, vient d’exploser en plein vol. Une équipe hétéroclite et un brin lunaire mais aussi complétement investie que leur nouveau directeur va avoir du mal à dissoudre comme le lui a demandé son supérieur, interprété par un inénarrable Laurent Poitrenaux. Mieux encore, scientifique un peu froid et peu enclin à l’empathie, il va apprendre au cours de toutes les péripéties que lui réservent les OVNIS que la certitude absolue n’est pas de ce monde et que le doute doit impérativement nourrir le progrès technologique. Une notion trop longtemps perdue de vue dont on mesure les effets délétères aujourd’hui. C’est une sorte de chemin initiatique que va suivre un Didier Mathure qui en réalité ne l’est pas vraiment (mature). Le tout porté par les musiques planantes de Tangerine Dream et de Jean-Michel Jarre nous invite fortement à nous perdre dans le ravissant et pénétrant strabisme de la jeune Daphné Patakia. On notera la participation de la toujours très classe et talentueuse Nicole Garcia ainsi que celle de Géraldine Pailhas, touchante en épouse d'un Didier Mathure dont elle ne sait jamais vraiment lequel lui fait face. On parle bien sûr d’une saison 2. Espérons pour eux comme pour les téléspectateurs que les auteurs seront aussi inspirés. " S’il vous plait Monsieur Mathure. Je veux travailler au GEPAN !!!".
Saison 2 :C’est sans doute avec le plus grand plaisir que ceux qui avaient apprécié la première saison d’ « OVNI », série constituant pour le coup un véritable Objet Télévisuel Non Identifié dans le paysage télévisuel français un peu ronronnant, découvrent la saison 2 de cette production Canal Plus. On retrouve Didier Mathure (Melvil Poupaud) et sa petite équipe d’éberlués sympathiques dans de nouvelles aventures « ovniennes » complétement jouissives, conçues pour ceux qui aiment l’humour décalé mais aussi avoir le nez dans les étoiles. L’intrigue est encore une fois loufoque au possible, permettant à chacun des acteurs récurrents de la première saison de jouer une partition totalement maîtrisée. Melvil Poupaud tout d’abord en chef d’orchestre de cette symphonie baroque, scientifique surdoué se laissant aspirer dans le trou noir des OVNIS qui grignotent petit à petit sa rationalité d’ancien major de Polytechnique. Michel Vuillermoz ensuite qui démontre comme d’autres avant lui que la Comédie Française peut mener à tout y compris au rôle d’enquêteur du GEPAN complétement déjanté, homosexuel assumé avant l’heure. Sans oublier bien sûr la ravissante et toute jeune Daphné Patakia dont le léger strabisme lui donne ce regard pénétrant qui vous emmène tout droit sur Mars. Tout comme le non moins jeune Quentin Dolmaire ,complétement lunaire à qui le « pat d’ éph » va comme un gant. A leurs côtés, Géraldine Pailhas, Jonathan Lambert, Nicole Garcia, Elodie Bouchez, Olivier Broche et Alice Taglioni sont complétement synchrones, même si, pas partis aussi loin dans le cosmos. Le tout doit beaucoup à ses acteurs, au scénario et à la reconstitution d’époque. Mais c’est assurément la musique de Thylacine qui fournit la touche indispensable à la poésie nimbant cette formidable série dont on n’oubliera pas non plus le réalisateur Anthony Cordier. Une seconde saison très réussie même si elle se laisse quelquefois aller opportunément à des messages dans l’air du temps un peu convenus et dont la dernière scène nous laisse espérer une suite. Prions le ciel étoilé pour que ce ne soit pas une vue de l’esprit comme les OVNIS, car on y croit dur comme fer maintenant, ayant déjà accroché à nos murs les anciennes photos jaunies de Jean-Claude Bourret, précurseur du phénomène OVNI, autrefois moqué et ringardisé.