Avec "Engrenages", "Le bureau des légendes" est sans aucun doute la série phare de Canal Plus. D'un côté, la plongée dans le quotidien souvent sordide des agents d'un commissariat parisien, de l'autre l'univers plus feutré dans lequel évoluent les agents de la DGSE. Conçue et en partie réalisée par Eric Rochant, réalisateur talentueux et très sûr de son art (quelquefois un peu trop?), la série démarrée en 2015 est longue jusqu'alors de 5 saisons de chacune 10 épisodes. Elle prend pivot autour de Guillaume Debailly dit "Malotru", agent "sous légende", figure emblématique du bureau du même nom qui gère tous les espions devant opérer dans toutes les parties du globe où la France peut voir ses intérêts avantagés ou compromis. Interprété par Mathieu Kassovitz,
l'agent double jusqu'alors un exemple pour tout son service car jamais pris en défaut, se laisse embarquer dans une histoire d'amour en Syrie qui va le faire sortir de sa trajectoire en reniant son engagement puis finir par compromettre gravement la plupart de ses collègues
. Comme dans "Engrenages" chaque saison suit parallèlement au thème central deux ou trois intrigues servant à varier les suspenses et faire monter la tension grâce à l'attente. Malheureusement, au fil des saisons ces intrigues ne présentent pas toutes le même intérêt et finissent parfois par produire l'effet inverse de celui recherché, en dissipant quelque peu l'attention, contrairement à "Engrenages" qui n'a jamais failli dans le domaine. Toutefois la psychologie des personnages est finement ciselée avec des acteurs qui développent tous avec talent leur rôle. L'autre grand mérite du "Bureau des légendes" est d'offrir une vision sans doute plus réaliste du monde de l'espionnage qui n'est pas fait de surhommes mais d'êtres humains qui doivent déployer des trésors d'énergie mentale pour contenir leurs émotions afin d'être toujours dignes de leur mission. Il ne faut malgré tout pas faire la fine bouche, hormis la petite restriction émise pus haut et se féliciter que l'univers des séries vienne fièrement relever le niveau d'ensemble peu engageant faute d'ambition et d'imagination de notre cinéma national. Pour conclure, il faut signaler la performance de Florence Loiret-Caille, alter ego de Mathieu Kassovitz sur l'ensemble des cinq saisons qui imprime à son personnage un mélange parfait de détermination et de sensibilité au service d'une ambition sans mesure qui masque une grande détresse personnelle que le scénario a la grande intelligence de ne jamais déflorer, laissant sa part de mystère à Marie-Jeanne Duthilleul. A recommander donc.