L’Italie, Vittorio De Sica en aura fait un des piliers de son œuvre, après l’avoir traversée durant son enfance. Né à Sora, il n’est âgé que de quelques mois lorsque sa famille déménage à Naples. Ville qu’elle quittera au début de la Première Guerre Mondiale pour Florence, puis Rome, pour un arrêt définitif. C’est là qu’il suit des études de comptabilité et met à profit les talents d’acteur exercés pendant le conflit, dans des pièces jouées pour les soldats hospitalisés. Grâce à un ami de ses parents, il décroche en effet son premier rôle au cinéma, dans L'Affaire Clémenceau (1917).
Il ne met pas ses études entre parenthèses pour autant, et attend même d’avoir son diplôme pour retourner vers le jeu. Mais au théâtre ce coup-ci, qu’il fréquente exclusivement entre 1923 et 1932, année où il se fait remarquer par les spectateurs des salles obscures grâce à son rôle dans la comédie Les Hommes, quels mufles !. Sans quitter les planches, où il créé sa propre compagnie, en 1933, Vittorio De Sica se fait alors de plus en plus présent au cinéma, témoignant de sa fidélité envers des réalisateurs tels que Mario Camerini, Amleto Palermi ou Carlo Ludovico Bragaglia, qui lui offrent surtout des comédies.
Passé à la réalisation à partir de 1940, Vittorio De Sica reste dans le même genre, mais ne marque pas vraiment les esprits, que ce soit avec Roses écarlates, Madeleine, zéro de conduite ou Mademoiselle Vendredi, qui aura néanmoins le mérite de révéler l’actrice Anna Magnani, qui deviendra l’une des figures du néoréalisme italien. Un courant auquel le metteur en scène participe, sans elle, dès 1944, avec Les Enfants nous regardent, qui marque la première de ses seize collaborations avec Marcello Mastroianni (en tant qu’acteur ou réalisateur), mais surtout son explosion auprès du public.
La confirmation ne se fera d’ailleurs pas attendre. Mettant en images des scripts qu’il a notamment co-écrits avec Cesare Zavattini, l’une des figures de proue du néoréalisme, De Sica ausculte les ravages causés par la Seconde Guerre Mondiale sur son pays, avec Sciuscia, La Porte du ciel et – surtout – Le Voleur de bicyclette, encore considéré comme son plus grand film aujourd’hui. De moins en moins en vue, à cause d’un gouvernement qui affiche un optimisme de façade, le mouvement s’éteint petit-à-petit, et le metteur en scène lui fait ses adieux avec Miracle à Milan (1951) puis Umberto D. (1952), l’un de ses films les plus personnels puisqu’il y rend hommage à son père.
Si la carrière du cinéaste ne s’achève pas avec le néoréalisme, le succès, lui, se fait moins fréquent, malgré une activité toujours aussi soutenue. Un peu refroidi par le désastre public d’Umberto D., Vittorio De Sica revient alors à un registre plus léger. Très présent devant et derrière la caméra, il se fait remarquer grâce à son rôle dans Madame de... (1953), et des réalisations telles que L'Or de Naples et La Paysanne aux pieds nus, qui vaut à Sophia Loren une flopée de récompenses, parmi lesquelles le Prix d’Interprétation à Cannes et l’Oscar de la Meilleure Actrice. Egérie de son cinéma de 1954 à 1974, celle-ci se voit d’ailleurs consacrée à diverses reprises à travers le monde, grâce à Hier, aujourd'hui et demain, Mariage à l'Italienne, Les Fleurs du soleil et Le Voyage, sa dernière collaboration avec De Sica, qui est aussi l'ultime film de ce dernier.
Décédé le 13 novembre 1974, des suites de l’ablation d’un kyste dans les poumons, Vittorio De Sica termine donc sa carrière ainsi, peu de temps après avoir signé un dernier coup d’éclat grâce au Jardin des Finzi-Contini (1970) : auréolé de l’Ours d’Or à Berlin et de l’Oscar du Meilleur Film Etranger, ce film qui mêle drame, Histoire et guerre, genres qui ont justement contribué à en faire l’un des cinéastes italiens les plus importants.
Auteur : Maximilien Pierrette