Fils de Jacques Amalric, éditorialiste à Libération, et de Nicole Zand, critique littéraire au Monde, Mathieu Amalric se voit proposer en 1984 par Otar Iosseliani, un ami de la famille, de jouer la comédie dans Les Favoris de la lune. Après ce premier contact avec le cinéma (et une année d'hypokhâgne), le jeune homme, qui ne se destine pas au métier d'acteur, enchaîne les tournages en tant qu'accessoiriste, régisseur ou cantinier. Stagiaire assistant réalisateur sur Au revoir les enfants, il travaille aussi auprès de Monteiro et Romain Goupil.
En 1996, Mathieu Amalric accède à la notoriété en tant que comédien : remarqué dans Le Journal du séducteur, il incarne Paul Dedalus, le séducteur maladroit et indécis de Comment je me suis disputé... d'Arnaud Desplechin, prestation pour laquelle il décroche le César du Meilleur espoir en 1997. Nouveau chouchou du cinéma d'auteur, il tourne avec Techiné (Alice et Martin), Assayas (Fin août, début septembre) ou Jean-Claude Biette et devient le compagnon de route - et de randonnée - des frères Larrieu (Un homme, un vrai en 2003).
Parallèlement à ses activités d'acteur, Mathieu Amalric s'illustre dans la réalisation, d'abord en 1997 avec Mange ta soupe, long-métrage aux accents autobiographiques qui lui vaut les éloges de Godard. Suivent Le Stade de Wimbledon (2001), promenade poétique et mystérieuse avec Jeanne Balibar (qui fut sa compagne), La Chose publique, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs en 2003. Mais c'est en 2010 qu'arrive la consécration avec le très burlesque Tournée, présenté à Cannes en compétition officielle et récompensé par le Prix de la mise en scène, faisant la joie d'Amalric et de sa troupe vedette de stripteaseuses.
Cette double casquette ne l'empêche pas de faire des allers-retours devant la caméra : enfant chéri du cinéma d'art et d'essai, il retrouve en 2004 Desplechin pour Rois et reine, dans lequel il incarne Ismaël, garçon interné par erreur dans un hôpital psychiatrique, une performance saluée par un César du Meilleur acteur. De nouvelles perspectives s'ouvrent alors pour Amalric, sollicité aussi bien par Claude Miller ou Pascal Thomas.
A Cannes, en 2007, il est omniprésent : bouleversant en paraplégique dans Le Scaphandre et le Papillon, il fait aussi partie de la troupe réunie par Valeria Bruni Tedeschi (Actrices) et campe le héros du dérangeant La Question humaine. Acteur fétiche des cinéastes "auteurs" (comme Damien Odoul ou Bertrand Bonello), il reste avant tout un pilier de la famille Desplechin (Un conte de Noël) et intègre celle de l'aîné Resnais (Les Herbes folles, 2009, Vous n'avez encore rien vu, 2012).
Malgré des choix parfois très élitistes, Mathieu Amalric a la particularité de ne pas être étiqueté pour autant : éclectique, il participe à des projets plus accessibles et fantaisistes, comme lorsqu'il prête sa voix au chat du Rabbin dans le film d'animation éponyme (2011), avant d'apparaître sous les traits d'un violoniste suicidaire dans le très hybride Poulet aux prunes (id.).
Par ailleurs, le comédien est capable de naviguer entre cinéma d'auteur et superproductions. En France, il est ainsi à l'affiche de Mesrine : L'Ennemi public n°1, et son talent traverse même les frontières : en l'espace de six ans, il s'est fait une place à l'échelle internationale en travaillant sous la houlette de Spielberg (Munich, 2005) ou Cronenberg (Cosmopolis, 2012), incarnant même le méchant du dernier James Bond (2008).
Très actif, Mathieu Amalric multiplie les prestations dans des films originaux, comme The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson ou Arrête ou je continue de Sophie Fillières. Dans l'hilarant Le Grand Bain (2018) de Gilles Lellouche, l'acteur de 52 ans reprend goût à la vie grâce à la natation synchronisée. Aimant retrouver les mêmes metteurs en scène, il est à l'affiche de Jimmy P. (Psychothérapie d'un Indien des plaines) (2013), Trois souvenirs de ma jeunesse (2015) et Les Fantômes d'Ismaël (2017) de Desplechin, puis à celle du J'accuse (2019) de Roman Polanski, centré sur l'affaire Dreyfus.
Parallèlement à ces nombreuses prestations devant la caméra, Mathieu Amalric réalise La Chambre bleue (2014), adapté du roman de Georges Simenon, ainsi que Barbara (2017), une évocation poétique de la vie de la célèbre chanteuse avec Jeanne Balibar dans le rôle-titre. Tous les deux sont présentés au Festival de Cannes.