Razorback est un excellent film de monstre de Mulcahy. C’est l’exemple type du film de monstre redoutablement efficace et qui pourtant ne montre pratiquement jamais la créature.
Au casting pas d’acteurs très connus, mais ils assurent vraiment. Gregory Harrison est très bon, offrant un personnage évolutif en plus, bien gentil et un peu naïf au début mais qui va gagner peu à peu en assurance et même devenir sans pitié. Face à lui Arkie Whiteley, qui apporte une petite touche d’humanité bienvenue au milieu de tous ces bouseux, tandis que Bill Kerr, qui complète le casting principal s’empare lui d’un personnage assez classique dans le registre mais qu’il maitrise pleinement. A noter aussi des seconds rôles à la hauteur, notamment des méchants très investis, et une Judy Morris qui sait nous attacher à son rôle dans la première moitié du film.
Le scénario est futé. D’abord il réserve de vraies surprises, avec une cassure nette passée 25 minutes environ, qui va surement en surprendre plus d’un. Ensuite Mulcahy nous sert un film avec presque pas de créature, et pourtant Razorback est très prenant. Il faut dire que le film est doté d’un style vraiment original, et son approche « onirique » voire franchement fantastique du sujet, qui pourra rappeler l’esthétique du magistral Dust Devil le distingue tout de suite de la concurrence. Par ailleurs jusqu’au-boutiste, le film se veut vraiment sombre, désespéré, et cela lui confère une personnalité très agréable. Clairement Razorback n’est pas quelconque, et cela est un très bon point.
Visuellement ce film est surement l’un des meilleurs de Mulcahy. La mise en scène est impeccable. Les attaques sont très bien réalisées, le réalisateur contourne à merveille le fait de ne pas avoir une créature très crédible, et Mulcahy est un génie de l’atmosphère quand il le veut, et il le prouve ici avec des plans parfois de toutes beautés. A cela s’ajoute comme souvent chez le réalisateur un travail sur les décors et surtout sur la photographie qui fait merveille. L’atmosphère de Razorback est envoutante, et même si c’est clairement typé années 80 c’est souvent magnifique. Evidemment la musique, planante à souhait rajoute encore un peu d’ambiance supplémentaire. A noter qu’il n’y a pas beaucoup d’effets horrifiques, mais le film sait se montrer craspec par moment.
Clairement Razorback est un film très réussi de Mulcahy. Pour ma part c’est un film intelligent, doté d’une forte personnalité, et qui a su transcender son petit budget et ses difficultés pour offrir quelque chose qui reste marquant plus de trente ans après sa sortie. Les amateurs de films de monstre l’apprécieront sans nul doute, mais je crois que ce film est encore plus à recommander aux amateurs de films d’atmosphère. Razorback envoie vraiment de ce côté-là. Je n’ose pas pousser jusqu’à 4.5, car on sent quand même quelques aspérités, peut-être dû à l’âge il est vrai, avec un rythme parfois un peu lent, quelques facilités scénaristiques (l’arrivée du héros par exemple tout de suite plonger dans l’aventure) qui tranchent avec des choses plus surprenantes. 4.5, mais le 5 n’est pas loin.