Christopher Gans réalise ici un des premiers bons films d'adaptation de jeu vidéo. En effet, si Silent Hill n’est pas dénué de défauts plus ou moins agaçants, il conjugue un respect et un amour profond du matériau d’origine avec cette ambition un peu folle d’en tirer un grand cinéma exigeant. Il est vrai qu'il manquait ce film qui ferait une sorte de liaison entre l'univers du cinéma et celui du jeu vidéo, les respectant autant l’un que l’autre tout en bénéficiant du regard d’un vrai cinéaste, pas un cynique mais un amoureux à la fois gamer et cinéphile. On peut dire que Silent Hill est enfin un film qui parvient à respecter les deux univers à une certaine maîtrise de la mise en scène. Pourtant, le film est loin, très loin d'être parfait. Ainsi, entre le côté un brin simpliste de sa résolution construite autour du sempiternel flashback, une direction d’acteurs pas toujours au top et surtout une enquête parallèle complètement ancrée dans le monde réel qui, en plus d’anéantir le trouble de la perception de cet univers, handicape considérablement le tempo de la narration, Silent Hill ne manque pas de vrais problèmes. Problèmes auxquels s'ajoute le plus gros, celui du manque total de peur ressentie devant l'écran, qui contraste avec cette expérience incroyable de la terreur pure que constituent les premiers opus de la saga en jeu vidéo. Il est vrai que le cinéma se doit d’abandonner l’obscurité majoritaire dans le cadre et l’absence logique d’interaction entre le spectateur et le récit. Car ce qui fait la force du jeu vidéo, c'est d'interagir avec le joueur tandis que le cinéma ne peut faire autre chose que de guider le spectateur qui ne peut qu'être passif. Mais le film et l’approche de Christophe Gans sont tout l’inverse de ce qu’a fait Paul W.S. Anderson sur Resident Evil. Le cynisme est ici absent, le respect total et en se limitant pas à des clins d’œils crétins, et chaque liberté prise se voit chargée de sens. Malheureusement, s'il n'y avait pas ce récit imposé par une production canadienne frileuse mettant en scène les personnages incarnés par Sean Bean et Kim Coates, seuls éléments masculins du film, dans une enquête prétexte à souligner le détachement du réel, le film aurait non seulement gagné en rythme mais aurait également tissé des liens émotionnels plus importants avec ses vrais personnages, tous féminins, ce qui est dommage. Chaque sirène qui retentit dans le film entrâine le spectateur dans un monde cauchemardesque et malsain très bien mise en scènes avec de beaux décors. Les acteurs ont quant à eux potables et parviennent à rendre le film crédible. Alors oui, Silent Hill ne fait pas peur comme le jeu, ne parvient pas à reproduire l’immersion et l’identification émotionnelle du jeu, mais y substitue une vision à la fois purement intellectuelle dans son approche du principe d’adaptation, et essentiellement sensitive dans le chemin emprunté pour en arriver à sa conclusion.