L’enrobage lugubre de Saint Ange, de sa salle d’eau dégoulinante de saleté au petit square environné d’une tombe où s’activent en grinçant tourniquets et balançoires, ne se place jamais au service du récit, ne témoigne d’aucun attachement à ces enfants victimes de l’horreur de la Seconde Guerre mondiale : il se contente de « faire genre », de participer d’une intention, à l’instar des personnages qui n’existent pas pour eux-mêmes mais exclusivement en figures dynamisant une toile sinon figée. Pascal Laugier n’apporte rien de lui – ou peut-être n’a-t-il, tout simplement, rien à apporter –, ne partage aucune vision singulière : par l’obscénité de sa caméra et de sa mise en scène, il n’insuffle ni âme ni mystère à une intrigue à laquelle nous, spectateurs, n’avons pas le droit de collaborer, cantonnés à la posture de témoins d’un tour de passe-passe ridicule qui aborde avec indécence une période sombre de l’Histoire de France, la vidant de ses enjeux sensibles, la réduisant à un propos souterrain grotesque. Nous avons l’impression désagréable d’avoir sous les yeux le premier jet d’un étudiant en cinéma qui n’a encore rien vécu mais qui, par professionnalisme, divulgue ses inspirations évidentes sous une lenteur d’exécution et quelques partis pris redondants (des gros plans sur des visages captés de profil) qui n’émeuvent jamais, ne procurent aucune émotion artistique.
Perdu quelque part entre Les Disparus de Saint-Agil (Christian-Jaque, 1938) et El espinazo del diablo (Guillermo del Toro, 2001), Pascal Laugier signe une production atone et prétentieuse qui se complaît dans les sévices maternels endurés par Anna sans aborder le traumatisme et la maternité avec le respect et la pudeur nécessaires.